Chronique

Ken recherche Barbie sur Instagram

Entre vous, moi et les grosses lunettes d’Olivier Primeau, la nouvelle ère de la téléréalité, amorcée hier soir par XOXO à TVA, ressemble énormément à l’ancienne.

Des gars découpés au couteau, des tatouages qui dévorent les corps, des filles minces au « fort caractère », des discussions saupoudrées de franglais, des doigts griffus et des bulles qui pétillent dans les verres, XOXO ne réinvente pas la formule à succès de l’émission Cupidon, mais la passe au tamis des réseaux sociaux.

Vous ne suscitez pas assez de réactions sur Instagram ? Désolé, mais adios, chica. Trois candidates ont ainsi été renvoyées sèchement, dans un moment cruel qui a provoqué un malaise dans le New City Gas, un immense bar du quartier Griffintown, à Montréal.

Ce que XOXO valorise plus que tout, c’est la quantité d’abonnés sur Instagram, le nombre de vues sur YouTube et le total de mentions « j’aime » sur Facebook. C’est l’amour calculé au temps du numérique, et ce n’est pas toujours joli.

Hier soir, les 90 minutes de XOXO ont servi de très looong prétexte à la « grande sélection des filles », un peu comme du bétail dans une foire agricole de région.

Les producteurs avaient même classé les jeunes femmes « en ordre d’impact », de la plus populaire à la moins suivie. 

Euh. Bonjour, le retour à la cafétéria du secondaire, où les cool filaient devant les nerds.

Honnêtement, ça ne vaut pas la peine d’en dire très long sur les 18 concurrentes qui ont eu l’immense honneur de déposer leurs valises dans le mini-penthouse en carton de leur conseiller attitré.

Elles quitteront l’aventure aussi rapidement qu’un fonctionnaire fédéral quand sa montre indique 17 h. Dans le lot, plusieurs portent des prénoms de téléréalité comme Molly, Rébéka, Angelyna et Cindy-Ann. La dernière participante, Élise, 20 ans, a eu la brillante idée de dire qu’elle se couchait tous les soirs à 21 h après avoir bu sa camomille. Pas le discours le plus vendeur pour une téléréalité axée sur le party. Non, elle n’a pas été repêchée.

À XOXO, ce sont les cinq garçons qui contrôlent la partie. Jake, mannequin de 25 ans, aime être vu, déborde de confiance en lui et philosophe que « quand ça va le faire, ça va le faire ». 10-4, mon big.

Mike, 27 ans, gagne sa vie comme un influenceur sur Instagram, où il compte 736 000 abonnés (c’est hyper important, n’oubliez pas). Mike a du « charisse » et les gens pensent qu’il vit en « Califournie ».

Ah oui, Mike pose aussi pour des couvertures de romans Harlequin, des livres qu’il n’ouvre pas, car jamais il ne visite de librairie. Einstein peut dormir en paix.

Manuel, 25 ans, ex-joueur de football et maintenant conseiller financier, a les valeurs à la bonne place (c’est où, ça ?). « Les mères de mes blondes, y m’aiment. Parce que je suis capable d’avoir une conversation sur n’importe quoi », s’est-il vanté.

Simon, barman de 27 ans, définit sa personnalité complexe comme un « sweet mélange entre de l’intensité et de la passion ». Et il tripe sur les livres de croissance personnelle. On lui souhaite de lancer tous ses désirs les plus fous dans l’univers et d’accéder à son pouvoir caché.

Nathan, 20 ans, a été le moins mauvais des cinq. Il dessine et les filles intelligentes l’attirent. Faudra voir s’il en dénichera une parmi les 18 chanceuses.

À l’animation, Anouk Meunier a souvent crié devant une foule survoltée. C’était agaçant. Par contre, elle a bien dirigé tout ce trafic humain.

Quant aux trois conseillers, c’est le flamboyant styliste Cary Tauben qui a le plus ressorti. Le propriétaire du Beachclub, Olivier Primeau, fait de la très bonne télé, tandis que l’artiste peintre et ex-lofteuse Elisabetta Fantone a apporté la touche d’humanité qui manquait beaucoup hier.

Bon retour à l’école !

Vous préférez vos docuréalités moins trash et plus nourrissantes ? Regardez Télé-Québec ce soir à 20 h pour 180 jours. C’est excellent. Imaginez De garde 24/7, mais dans une école secondaire défavorisée et multiethnique de Longueuil.

Pendant une heure, la caméra nous balade dans les corridors de la polyvalente Gérard-Filion. C’est jour de rentrée pour tous les élèves et la direction. Pénurie d’enseignants, frais élevés ou bagarre entre deux jeunes, ce premier épisode aborde plusieurs problèmes touchant le réseau public.

La directrice de l’établissement, Sylvie Dupuis, nous sert de guide dans 180 jours, qui se conclura avec le bal des finissants. L’émission pénètre dans les classes de profs expérimentés (M. Blais) comme débutants (M. Ladéroute), des niveaux 1 à 5. Pas de discrimination ici.

Cette docuréalité intelligente ne dégage pas de parfum d’infopub sur le dévouement extrême de son personnel. Quand ça va mal, on le montre. Des policiers accompagnent même une directrice adjointe dans la gestion d’un cas grave d’intimidation au sein d’un groupe de filles.

Ce qui m’a le plus frappé ? Dans une classe de cinquième secondaire, personne ne connaissait Michel Tremblay. Par contre, ils savaient tous qui était Rachid Badouri. Ces derniers n’ont pas fréquenté l’école des Saints-Anges comme Thérèse et Pierrette !

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