Trouver du beau à Montréal
En acceptant d’écrire ce texte, je me suis dit qu’il ferait office de thérapie personnelle. Me forcer à voir du beau dans mon Montréal. Parce que je dois l’avouer, je ne trouve pas beaucoup d’édifices épatants en ville… Trouver du beau à Montréal, c’est comme trouver du bon dans le Canadien de Montréal : ça dépend de notre degré d’optimisme…
Un ami en visite à Montréal m’avait dit : « C’est super sympa votre ville, mais ça vous tente pas d’essayer d’engager des architectes de temps en temps ? » Puis, en en rajoutant : « J’imaginais Montréal comme un Paris de l’Amérique du Nord, on dirait plus un Baltimore qui parle français ! »
Ayoye…
On a effectivement fait des choses impardonnables ces dernières années. À titre d’exemple, les deux nouveaux mégahopitaux de Montréal rendent malade juste à les regarder.
N’empêche, même avec toute la mauvaise foi du monde, si on cherche, il est possible de trouver de beaux édifices à Montréal.
Commençons avec notre premier trio : La Place Ville-Marie et la Place Westmount-Square de Mies van der Rohe restent raffinées et modernes même après 50 ans. L’édifice de la Sun Life, un classique monumental trop souvent oublié.
Dans ma liste de beau, c’est une évidence, je dois obligatoirement inclure Habitat 67 de l’architecte Moshe Safdie. C’est même LE beau de Montréal selon moi. Un endroit unique et toujours d’avant-garde… même après 50 ans !
Ce que vous ignorez peut-être, c’est que le projet initial devait être beaucoup plus imposant. Il s’étendait sur presque toute l’avenue Pierre-Dupuy et devait contenir des boutiques, des restaurants et même une école. Trop cher, on a coupé.
Dommage, si on avait terminé l’œuvre selon le projet initial, Montréal aurait possédé un complexe urbain ultramoderne se comparant (50 ans avant le temps !) au célèbre complexe 8 House par le cabinet danois BIG à Copenhague. C’est exactement le même concept ! Un édifice, une ville.
À la place, on a plutôt construit le Tropiques Nord, un édifice affreux, doté d’un « Playa del Carmen » intérieur.
Je me dois aussi de parler du Stade olympique. Arrêtons de chialer, c’est une œuvre architecturale magistrale. Du beau qu’on salit depuis trop longtemps.
En plus, c’est dommage pour les détracteurs du Stade, on sait maintenant qu’il se rénove très bien et qu’on obtient de superbes résultats. Le nouveau Centre sportif du Parc olympique incluant la célèbre piscine olympique est maintenant un endroit à couper le souffle, coloré et franchement moderne. Un paradis du sport.
Je sais, moi aussi j’étais sceptique. En plus, quand j’ai su que les employés de Desjardins déménageaient dans la tour du Stade, j’avoue avoir eu pitié d’eux. Pauvres employés ! Ils vont aller travailler dans une caverne de béton sans fenêtre. Puis j’ai observé les travaux d’enlèvement des dalles de béton sur la tour pour en dévoiler sa structure triangulaire cachée. Wow ! Franchement spectaculaire. Encore une fois, le Stade prouve qu’il est un joyau incomparable de Montréal.
Ne reste qu’à déménager les « pingouins sans ailes » du Biodôme, comme le demande constamment Roger Taillibert, pour redonner sa vocation sportive au vélodrome. Nous pourrions alors admirer de nouveau cette magnifique dentelle de béton qui en constitue le toit. Une immense coquille en forme de casque de vélo qui touche le sol en seulement 4 points. Si c’est pas du beau ça, je ne sais pas c’est quoi !
Ne restera que le nouveau toit rétractable à installer. Oups ! C’est un sujet tabou… Désolé.
Mais ne nous emballons pas… Il y a évidemment plein d’autres plus petits endroits fort beaux à Montréal.
L’édifice du Centre des Archives nationales de Montréal, rue Viger, est magnifique à l’intérieur. Un judicieux mariage d’ancien et de moderne. L’ancien couvent des Soeurs Grises sur Sherbrooke, entièrement rénové par l’Université Concordia en résidences étudiantes, est aussi superbe.
Le Stade de soccer de Montréal sur Papineau fait l’unanimité, la bibliothèque du Boisé à Saint-Laurent aussi. J’avoue mon affection pour la nouvelle bibliothèque Marc-Favreau, simple et efficace. La Biosphère est aussi un endroit superbe et sous-utilisé. Le dernier ajout du Musée des beaux-arts de Montréal est également pas mal.
Mais je remarque qu’à Montréal, mon « beau » implique la plupart du temps des vieux édifices des années 60 et 70. C’est l’époque où l’audace semblait permise à Montréal. J’espère que nous retrouverons rapidement le plaisir d’investir dans le beau. Car le beau de qualité reste longtemps beau « même après 50 ans ». Le Corbusier le disait très poétiquement : « Si le soleil entre dans la maison, il est un peu dans votre cœur ! » C’est beau, hein ?