De vraies institutions

Alex Coulombe joue les premiers rôles depuis 1905

Il y a de ces entreprises qui sont des institutions dans leur secteur d’activité. La Presse vous propose une petite tournée estivale pour aller à leur rencontre.

Québec — Dans l’est et le centre de la province, l’embouteilleur-distributeur indépendant plus que centenaire a une aussi grande notoriété que le cola-vedette qu’il distribue. La Presse est allée rencontrer son président Marc Coulombe pour comprendre comment ce qui aurait pu n’être qu’un acteur de soutien anonyme au service de la multinationale Pepsi est devenu au fil des ans une véritable institution.

Investir pour rester pertinent

En mai dernier, Alex Coulombe a mis la touche finale à un investissement de 6 millions pour moderniser sa chaîne de remplissage de canettes, qui produit à un rythme de 1200 canettes à la minute. Concrètement, l’achat de nouvelles machines donne plus de flexibilité à l’embouteilleur, car cela lui permet d’utiliser différents formats de canettes, comme les 222 ml, les 473 ml, les canettes minces de 355 ml. Avant, seule la canette conventionnelle de 355 ml pouvait être remplie.

De plus, de nouvelles emballeuses donnent plus de flexibilité en ce qui concerne les emballages, en carton ou en pellicule. L’embouteilleur peut maintenant conditionner les canettes en formats de 6, 10 ou 12 unités ou plus.

Depuis 20 ans, l’entreprise familiale a investi un minimum de 30 millions dans son usine de la rue Cyrille-Duquet dans le parc industriel Jean-Talon, en façade de l’autoroute Charest. Elle compte trois chaînes de production : une pour la canette, une pour la bouteille en plastique et une pour le sirop offert en sac pour les fontaines dans les restaurants.

« Il faut continuellement investir pour rester compétitif à l’intérieur du réseau Pepsi, explique Marc Coulombe, 55 ans. Sinon, le travail va se faire chez des embouteilleurs en Ontario et aux États-Unis. »

De génération en génération

Édouard Coulombe fonde l’embouteilleur d’eaux gazeuses avec son frère cadet Alexandre à Québec en 1905. Celui-ci devient seul maître à bord en 1927, et le fabricant de « liqueurs douces » prend le nom d’Alex Coulombe. L’entrepreneur meurt dans un accident de voiture en 1957. Son fils René occupe la présidence de 1960 à 2002, moment où Marc, fils de René et petit-fils d’Alex, lui succède. Depuis, la quatrième génération se prépare à saisir le flambeau. Les trois enfants de Marc travaillent au sein de l’entreprise familiale : Émilie, 30 ans, dirige les ventes ; Alexandre, 28 ans, s’occupe de la logistique ; et Catherine, 25 ans, est responsable des ressources humaines.

La décision qui a tout changé

Dans les années 30, Alex Coulombe produit ses propres boissons gazeuses. Il offre du soda mousse (cream soda), de l’orangeade, de la liqueur rouge (aux fraises) et de la bleue (aux raisins), mais pas de cola. La boisson brune n’est pas encore entrée dans les mœurs au Canada. À deux reprises, Pepsi, qui a mis les pieds à Montréal en 1934, propose à Alex Coulombe d’embouteiller son élixir. Culotté, Alex refuse l’offre alléchante chaque fois. La troisième tentative est toutefois la bonne, et Alex Coulombe devient embouteilleur Pepsi en 1935.

« C’est assurément la décision marquante qui a permis d’assurer la pérennité d’Alex Coulombe », reconnaît le président en entrevue.

« Au départ, les épiciers ne voulaient pas acheter de boisson brune, raconte le petit-fils d’Alex. Pour les convaincre, on plaçait dans une caisse d’orangeade deux bouteilles de Pepsi à leur insu. La semaine suivante, on en mettait quatre au lieu de deux et ainsi de suite. Quand on arrivait à vendre une caisse complète, le livreur, la semaine d’après, ajoutait officiellement une caisse de Pepsi à la commande. Si le client refusait, le livreur lui apprenait qu’il en avait vendu une caisse pleine sans le savoir la semaine précédente. »

Comment devient-on une institution ?

« Pour être présent aussi longtemps, il faut être capable de bien respecter notre clientèle et de l’écouter, répond Marc Coulombe. Par clientèle, il y a le consommateur, bien sûr, mais aussi les détaillants en alimentation et les restaurateurs qui vendent aux consommateurs. C’est essentiel de bien les écouter. »

Tout aussi important que les clients, il y a les 400 employés d’Alex Coulombe. « Sans ceux-ci, sans avoir leur respect, on ne pourrait pas continuer à œuvrer à travers le temps comme on le fait », ajoute-t-il.

Meilleure que la maison mère

Grâce à sa présence sur le territoire – la société a obtenu l’exclusivité au Centre Vidéotron –, aux commandites et aux actions de bonne entreprise citoyenne et à sa performance opérationnelle – en témoignent ses titres d’embouteilleur de l’année chez PepsiCo – , Alex Coulombe décroche d’excellentes parts de marché. Certes, le Québec est l’un des rares endroits sur terre où la famille Pepsi devance le clan Coke, mais ses parts restent supérieures à la moyenne provinciale. Régnant sur le centre et l’est du Québec, Coulombe accapare entre 63 % et 65 % du marché, avance la société, tandis que la moyenne provinciale se situe plutôt à 50 %. À noter que c’est la société Pepsi elle-même qui embouteille et distribue ses produits à Montréal dans l’ouest du Québec.

Et la croissance ?

En 1970, le Québec comptait 50 embouteilleurs Pepsi, souligne Marc Coulombe ; il en reste peut-être 5 pour tout le Canada. Comme les indépendants sont devenus rares. Coulombe doit grandir de façon organique. Cette croissance dépendra des nouveaux produits qui seront introduits dans le réseau Pepsi. Par nouveaux produits, M. Coulombe entend la formulation (diète, zéro, etc.), le format (473 ml, la mini à 222 ml et l’étroite de 355 ml) et l’emballage (la quantité par produit, 6, 10, 12, 24).

« Il y a 10 ans, notre portefeuille contenait 110 produits. Aujourd’hui, nous sommes à 250. Si ce qu’on voit aux États-Unis est précurseur de ce qui s’en vient, dit le président, nous serons peut-être à 400 produits dans cinq ans. »

Depuis 1984, Alex Colombe détient ses propres marques d’eau de source : Cristalline (avec deux « l » pour la différencier de l’eau française), une eau plate, et Montellier, une eau gazéifiée. Montellier est distribuée dans l’ensemble du Canada par l’entremise du réseau Pepsi depuis deux ans. « La catégorie eau est en croissance. À l’intérieur de celle-ci, la sous-catégorie qui est la plus en croissance, c’est l’eau gazéifiée », précise le président. En mai dernier, Alex Coulombe a lancé une nouvelle eau au goût de lime et propose l’eau Montellier dans un nouveau format de 355 ml dans des canettes minces.

Alex Coulombe Ltée

Secteur : embouteillage et distribution de boissons

Siège social : Québec

Fondation : 1905

Employés : environ 400

Clients : 5000

Parc automobile : 220 véhicules

Une usine à Québec

Centres de distribution : Sorel, Trois-Rivières, La Malbaie, Beauce

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