Opinion

Le cannabis, option de rechange aux opioïdes ?

Durant la période précédant les récentes élections provinciales, le Parti libéral au pouvoir avait annoncé son intention d’intensifier sa lutte contre la dépendance aux opioïdes et l’usage inapproprié de ces analgésiques en investissant, entre autres, 35 millions de dollars dans des programmes de sensibilisation du public, de recherche et de rétablissement.

Contrairement à plusieurs autres provinces canadiennes, le Québec a été moins affecté par la crise des opioïdes, mais il semblerait que le ministre de la Santé d’alors, Gaétan Barrette, ne voulait prendre aucun risque. 

Nous devrons peut-être attendre quelque temps avant de connaître les priorités du nouveau gouvernement caquiste en matière de soins de santé, mais s’il tient ses promesses électorales, il s’attardera d’abord à la lutte contre l’obésité et à l’amélioration des soins de longue durée pour les aînés. 

Les Québécois feraient une erreur de croire qu’ils ne seront pas affectés par la crise des opioïdes, et nous avons maintenant l’occasion de contrer ses ravages en réfléchissant à des moyens de prévention. 

Selon les données préliminaires mises à jour, il y a eu près de 4000 décès apparemment liés à la consommation d’opioïdes au Canada en 2017, dont 92 % étaient accidentels.

Bien que 78 % de ces décès soient survenus chez des hommes de race blanche, le pourcentage le plus élevé (28 %) de décès accidentels est survenu chez les personnes âgées de 30 à 39 ans. Entre janvier et septembre 2017, 72 % des décès accidentels apparemment liés à la consommation d’opioïdes impliquaient le fentanyl ou les analogues du fentanyl, comparativement à 55 % en 2016. Ces statistiques sont assez convaincantes, mais elles n’expliquent pas toutes les causes de ces décès ni le rôle du fentanyl comme coupable. 

Lorsque les gens souffrent de douleurs aiguës, ils désirent un soulagement rapide. Si la douleur n’est pas soulagée assez rapidement, le patient a tendance à prendre une dose plus élevée que celle qui est recommandée. Il n’est donc pas surprenant de constater que cela puisse mener à une surdose fatale. 

Solution ou mirage ?

En raison de mon éducation et de mon expérience dans l’industrie biopharmaceutique et comme je suis marié à une oncologue, j’ai appris que la douleur changeait les gens. Je suis convaincu que la plupart des personnes ne veulent pas intentionnellement abuser des médicaments sur ordonnance ou que celles qui souffrent de douleurs chroniques incontrôlables ne veulent pas vivre dans l’espèce de brouillard que produisent certains médicaments.

Je crois que nous sommes d’accord sur le fait qu’il serait préférable que nous puissions tous avoir accès à un soulagement sécuritaire de la douleur pour une condition médicale diagnostiquée. 

Le cannabis est-il la solution pour réduire la consommation d’opioïdes ? Je crois que plusieurs médecins estiment que le cannabis pourrait aider à réduire la consommation d’opioïdes – ce qui manque, ce sont les données pour le prouver. Tant que ces données ne seront pas disponibles, ne vous attendez pas à ce que les professionnels de la santé autorisent l’utilisation du cannabis comme solution de rechange aux opioïdes pour contrôler la douleur. En fait, nous avons encore beaucoup à apprendre sur l’innocuité et l’efficacité du cannabis. 

Il est urgent de sensibiliser les médecins, les professionnels de la santé, les patients, les soignants et le public à l’importance de comprendre ce qui est connu et ce qui ne l’est pas concernant les effets potentiels positifs et néfastes pour la santé du cannabis. 

La bonne nouvelle, c’est que Santé Canada a récemment approuvé un essai clinique pour étudier un médicament qui contient du cannabis appelé PPP001, ce qui signifie qu’il y a davantage de solutions concrètes pour faire face à la crise et réduire la douleur des patients que nous le pensions. Lors des recherches, le fentanyl fera peut-être concurrence au cannabis comme solution de remplacement éprouvée pour le soulagement de la douleur aiguë liée au cancer. Cet essai de phase 3 approuvé par l’organisme de règlementation de la santé de notre pays démontre que le manque de preuves est ce qui empêche les médecins d’utiliser le cannabis ou des produits contenant du cannabis comme traitement médical. 

Des recherches rigoureuses concernant le cannabis pourront répondre à des questions importantes et pourraient permettre de mieux soulager les patients aux prises avec des douleurs chroniques et les symptômes qui y sont associés comme la dépression, l’anxiété, la perte d’appétit et l’insomnie. Ces recherches pourraient également représenter une solution à la dépendance aux opioïdes qui affecte la société nord-américaine. 

De plus, dans tous les endroits où le cannabis et les produits cannabinoïdes sont approuvés comme médicaments, ils seront vendus dans les pharmacies, ce qui garantira leur qualité et le contrôle du dosage. Au Canada, par exemple, les citoyens seront couverts par les formulaires d’assurance afin que le coût ne soit pas un obstacle pour les patients. 

La recherche nous rapproche de plus en plus du jour où les médecins et la communauté médicale disposeront des preuves nécessaires pour prescrire avec confiance le cannabis comme option thérapeutique. Je me réjouis de faire partie de ce processus révolutionnaire.

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