Chronique

Visites libres chez les stars

Alors, les photos des maisons à vendre de nos stars québécoises, on les publie ou on les ignore ? Et le prix de vente de ces luxueuses résidences, le point le plus litigieux de ce débat, on l’évoque ou on le tait ?

Réglons une chose immédiatement. La somme précise payée par Louis-José Houde pour son cottage de 15 pièces à Outremont n’est aucunement d’intérêt public. L’humoriste barbu a parfaitement raison d’être en beau pétard que cette parcelle de son intimité ait fait le tour du web 153 fois.

Sur le plateau de Déjà dimanche !, Louis-José Houde, que l’on voit rarement aussi fâché, a fustigé Le Journal de Montréal, qui a récemment dévoilé les détails de cette transaction évaluée à 2,4 millions. C’est du niaisage, c’est ridicule, c’est dégueulasse : le comique ne l’a vraiment pas trouvé drôle, lui qui protège jalousement sa vie privée.

D’ailleurs, aucune photo de Louis-José House et de sa copine Magalie Lépine-Blondeau n’a encore été prise ou publiée.

Par contre, là où l’humoriste se trompe, c’est à propos de l’intention derrière ces rubriques sur « l’argent des stars ».

Les médias ne relaient pas ces infos – toutes accessibles au public, soit dit en passant – pour embêter les vedettes, mais bien pour générer des clics et doper le nombre de partages de leurs articles sur Facebook. Aussi simple que ça.

La vie des gens riches et célèbres a toujours suscité de la curiosité et de la fascination. Fortement influencée par des sites web hyper populaires comme TMZ, la couverture des nouvelles artistiques québécoises s’américanise de plus en plus. Même nous, à La Presse, publions parfois de ces propriétés appartenant à des joueurs du CH et autres personnalités connues.

Entre vous et moi, c’était inévitable. Certains photographes pigistes montréalais se spécialisent même dans le style « paparazzi d’aéroport », ce qui aurait été inimaginable il y a quelques années.

Je n’en suis pas particulièrement fier, mais comme plusieurs d’entre vous, j’ai consulté la fiche de la nouvelle demeure de l’animateur du spectacle de la fête nationale du Québec et pénétré virtuellement dans chacune des pièces, dont les cinq chambres à coucher et les trois salles de bains. Allô la curiosité malsaine.

Quelques semaines plus tôt, scénario identique pour Marie Mai, qui a mis sur le marché sa maison d’un demi-million à Saint-Bruno-de-Montarville. Les photos, avec ses Félix alignés près du piano, ont abondamment circulé. Sur Twitter, la popstar a également exprimé son agacement par rapport à cette intrusion dans son sanctuaire.

Ce ne sont pas tant les visites libres virtuelles qui dérangent dans ce mini-scandale immobilier, mais plutôt l’indication sur le salaire annuel de nos célébrités que révèle le prix de vente ou d’achat de leurs domiciles.

Si Louis-José Houde s’offre un cottage à 2,4 millions, c’est parce qu’il engrange beaucoup de sous. Il est riche. Très riche, même. Quand le « chalet » de Gregory Charles à Dunham, dans les Cantons-de-l’Est, s’affiche à 1,6 million, on se doute que l’animateur-chanteur ne s’inquiète pas pour ses fins de mois.

Il se situe exactement là, le gros tabou : la richesse. Au Québec, on ne parle pas d’argent. On en parle quand on est cassé ou endetté. Pas quand il entre à pleines poches.

Pourtant, les Louis-José Houde, Gregory Charles et Marie Mai de notre showbiz n’ont pas volé leur argent. Ils ont travaillé fort pour le gagner et le méritent amplement. Pourquoi ne pourraient-ils pas en profiter ? L’immobilier, c’est un investissement intelligent, non ?

Aux États-Unis, il existe des listes annuelles des artistes les plus fortunés. Personne ne rouspète quand son nom y apparaît, au contraire. C’est un signe de réussite, de succès.

Imaginez si un tel classement existait ici. Notre colonie artistique, généralement peu brusquée par la presse pipole, mettrait bien des mois à s’en remettre.

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