Chronique

Quand Mme Béliveau inspire Subban…

Fallait-il s’attendre à autre chose de P.K. Subban ?

Après avoir été l’histoire du premier match pour de mauvaises raisons – son coup de hache à Mark Stone et son expulsion de la rencontre –, voilà qu’il a aussi été au cœur du deuxième affrontement. Mais cette fois, pour les bons motifs.

L’énergique défenseur du Canadien a disputé un match formidable. Ses élans en territoire adverse et ses lancers vers Andrew Hammond ont souvent étourdi les Sénateurs. Et son but en deuxième période, inscrit d’un puissant tir dans le haut du filet, a constitué un moment fort du duel.

« P.K. a été P.K. », a dit Michel Therrien. En effet. Et ce fut aussi le cas après la rencontre en répondant aux questions de Renaud Lavoie, après avoir été choisi avec raison première étoile du match.

Saluant d’abord les gens en français – « Bonjour, comment ça va tout le monde ? – », Subban a souligné le retour au jeu réussi de Max Pacioretty, ce qui a augmenté les décibels d’un autre cran. Un animateur de foule n’aurait pas fait mieux.

Le défenseur du Canadien a ensuite raconté une histoire touchante à propos de sa rencontre avec Élise Béliveau, l’épouse du grand Jean, après avoir été chassé du match de mercredi. Une histoire sur laquelle il a donné plus de détails quelques minutes plus tard dans le vestiaire des siens.

« J’avais mon habit sur le dos quand je l’ai croisée dans un corridor après la deuxième période, a-t-il raconté. Elle m’a dit : “Je suis sûre que tu seras meilleur lors du prochain match.”

« Puis, ce soir, je suis devenu encore plus énergisé en l’apercevant dans les gradins. Elle m’a montré qu’elle portait mon chandail. C’est une des choses les plus sympathiques que j’ai jamais vues.

« On connaît tous l’impact de Jean Béliveau sur le hockey, l’organisation du Canadien et le Canada tout entier. Savoir que je profite de l’appui de sa si belle épouse me donne une confiance extraordinaire. Je voulais mieux jouer pour elle. »

— P.K. Subban

Élise Béliveau était toujours présente dans les gradins lorsque Subban a raconté l’anecdote à la foule. Elle a levé les bras au ciel pour le remercier. Ce fut un moment très spécial. Et une magnifique conclusion pour cette soirée amorcée avec des images de l’ancien numéro 4 durant la cérémonie d’ouverture.

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Mercredi, durant son point de presse de 10 minutes alors qu’il commentait son coup à l’endroit de Stone, Subban semblait déjà prêt à en mettre plein la vue à ses rivaux dès la première occasion.

Car au bout du compte, même s’il a dit comprendre la décision des officiels, Subban estimait toujours que son cinglage s’inscrivait dans le cours normal des choses. Il a d’ailleurs souligné avoir reçu des coups beaucoup plus durs dans sa carrière.

Déjà pris à partie par l’organisation des Sénateurs, qui a réclamé sans succès sa suspension, Subban ne s’est sûrement pas fait de nouveaux amis à Ottawa hier.

La célébration après son but fut tout, sauf sobre. Un genou à terre, il a touché son cœur de la main à deux reprises, avant qu’Andrei Markov ne saute à son cou, lui donnant même un bisou sur le casque !

« Je pense qu’il m’en a donné deux durant la rencontre, a lancé Subban en riant. Si j’avais une blonde, elle serait jalouse ! »

— Et que t’a-t-il dit ?

— Je ne sais pas trop, il parle souvent en russe ! Cette saison, je ne l’ai jamais vu aussi heureux que ce soir. J’ai à peine 25 ans, mais son jeu me donne de l’énergie à tous les matchs. Il m’enseigne à être un pro chaque jour. Alors ça ne me dérange pas s’il m’embrasse de temps à autre ! »

Cette célébration, survenue en deuxième période, aurait sans doute mieux convenu à un but en prolongation. Mais on devine que, dans les circonstances, marquer contre les Sénateurs a fait doublement plaisir à Subban, un extraordinaire hockeyeur doublé d’un showman hors du commun.

« J’ai toujours voulu être un joueur capable de faire une différence dans les gros matchs », a-t-il ajouté, rappelant cependant que cette victoire était d’abord une affaire d’équipe.

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Si les sans-grades ont été à l’origine de la victoire du Canadien mercredi, les vedettes de l’équipe ont assumé leur statut hier. La foule a explosé lorsque la formation de départ a été annoncée : Max Pacioretty était sur la glace pour la mise en jeu initiale. L’ovation qu’on lui a servie était pleine de chaleur.

Pour un premier match complet en deux semaines, le 67 s’est bien débrouillé. Il a même inscrit le premier but du Canadien sur une passe superbe de David Desharnais, beaucoup plus efficace lorsque le grand ailier est à ses côtés. Ces deux-là ont le don de se retrouver sur la patinoire.

Quant aux Sénateurs, ils ont montré beaucoup de courage et se sont battus avec énergie jusqu’à la fin. Mais ce déficit de deux matchs à zéro ne sera pas facile à combler.

Subban a cependant mis ses coéquipiers en garde : « Ils joueront le meilleur match de leur saison dimanche. Nous devrons être prêts. »

C’est vrai. Mais on ne peut nier que le Canadien a désormais un gros avantage dans cette série.

LE GROS LOT MCDAVID

Une équipe de la LNH raflera le gros lot ce soir.

À 20 h, le numéro gagnant de la loterie LNH sera tiré. À l’enjeu, le premier choix au repêchage de juin prochain, assurément Connor McDavid, le plus bel espoir du hockey professionnel depuis Sidney Crosby.

Du coup, McDavid deviendra le visage public de l’organisation chanceuse. Son apport ira bien au-delà de l’aspect sportif. Sa nouvelle équipe en fera le moteur de ses campagnes de publicité et augmentera ses ventes de produits dérivés.

Si McDavid se retrouve dans un marché où le hockey est un sport secondaire, comme la Caroline (Hurricanes) ou l’Arizona (Coyotes), son arrivée va promouvoir la vente d’abonnements saisonniers et, ultimement, les revenus locaux de télévision.

En clair, les conséquences financières de cette loterie sont énormes. On n’a rien vu de tel dans la LNH depuis 2005, lorsque les Penguins de Pittsburgh ont sélectionné Crosby au premier rang. Trois ans plus tard, ils ont atteint la finale de la Coupe Stanley, avant de la remporter en 2009.

L’équipe qui choisira au deuxième rang obtiendra aussi un espoir de premier plan, l’Américain Jack Eichel. Son talent est immense, mais il ne génère pas le même buzz que McDavid.

Cette année, tous les clubs exclus des séries éliminatoires sont dans la course au premier choix. Leur position au classement général détermine leur pourcentage de gagner le tirage. Ainsi, les Sabres de Buffalo, pire équipe de la saison, détiennent 20 % des chances de déboucher le champagne. En revanche, les Bruins de Boston, qui ont raté de peu les séries, n’en ont que 1 %.

La perspective de mettre la main sur McDavid a entraîné un effet négatif cette saison. Des directions d’équipe ont procédé à des ventes-débarras afin de terminer en queue de peloton. Les Sabres sont sans doute heureux de leur coup, puisqu’ils sont sûrs d’obtenir l’un des deux joueurs les plus convoités. Mais les Coyotes glisseront au troisième rang si eux ou les Sabres ne gagnent pas la loterie.

Un système qui récompense une organisation qui rend sciemment les armes est forcément vicié. Après tout, le but dans le sport professionnel est de gagner. Que des équipes larguent un certain nombre de joueurs en retour de choix au repêchage à la date limite des transactions est une chose ; vider l’équipe de manière quasi systématique en est une autre. L’intégrité de la compétition est touchée. Leurs partisans, ne l’oublions pas, ont continué de verser le gros prix pour leurs billets.

Récemment, le magazine Sportsnet suggérait une solution draconienne pour éviter pareil scénario : éliminer le repêchage. Tous les joueurs admissibles seraient autonomes et les équipes tenteraient de les embaucher en fonction du plafond salarial.

Bien sûr, cela ne se produira pas. Mais j’aimerais bien que McDavid se retrouve avec une équipe s’étant battue toute la saison, ce qui est le but du jeu, après tout !

Tenez, les Blue Jackets de Columbus ont été un exemple de résilience. Même si leurs chances de participer aux séries étaient presque nulles, ils ont connu un mois de mars extraordinaire. Voilà pourquoi je leur souhaite de remporter la loterie sous le nez des Sabres ou des Coyotes. Leurs chances de choisir au premier rang sont de 6 %

Le tirage suscite un immense intérêt aux quatre coins de la LNH. À Toronto, on croise les doigts. Les Maple Leafs ont 9,5 % des chances de rafler la mise. L’arrivée de McDavid dans le plus gros marché médiatique de la LNH aurait un extraordinaire impact.

L’an prochain, les trois premiers choix au repêchage seront déterminés par la loterie. En clair, l’équipe qui terminera au dernier rang de la LNH pourrait glisser jusqu’au quatrième. C’est un pas dans la bonne direction.

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