Abolition des frais accessoires

Une journée à la Polyclinique Pierre-Le Gardeur

Il est 7 h 50 à la Polyclinique médicale Pierre-Le Gardeur de Terrebonne. Une vingtaine de patients attendent l’ouverture des portes. Certains ont le nez rougi. Dans un coin, une femme aux yeux cernés secoue doucement la poussette de son bébé qui pleure par intermittence. Tout juste avant 8 h, le Dr Luc LaSalle arrive en coup de vent. Il pose sa valise et commence aussitôt son service.

8 h 10 

Le premier patient du Dr LaSalle est un garçon d’une douzaine d’années qui a mal à la gorge, tousse un peu et fait de la fièvre depuis quatre jours. Sur la table d’examen, le jeune garçon semble épuisé. Le Dr LaSalle ausculte sa gorge, ses oreilles et ses ganglions en posant plusieurs questions au patient et à ses parents. Le Dr LaSalle procède finalement à un prélèvement de gorge. Il quitte la salle, l’échantillon en main, et promet de revenir dans quelques minutes.

8 h 20 

Aussitôt sorti, le Dr LaSalle dépose le prélèvement dans une solution qui permettra de guider son diagnostic. En attendant le résultat, il entre dans une deuxième salle. Un homme d’une cinquantaine d’années attend. Se tenant l’épaule droite, il a le visage crispé. Le patient explique avoir une tendinite diagnostiquée récemment. Les médicaments qu’il prend pour le soulager ne suffisent pas. La douleur est telle qu’il ne dort pas. Le Dr LaSalle enchaîne les questions tout en inspectant l’épaule du patient, qui lâche des grognements de douleur. Le médecin prend une fiole de xylocaïne, de cortisone et une seringue, puis fait une injection dans l’épaule au patient. Après quelques instants, l’homme semble plus soulagé. Une vingtaine de dollars seront facturés au patient pour cette injection. Une pratique qui ne sera plus possible lors de l’abolition des frais accessoires, jeudi, explique le Dr LaSalle, qui discute un peu avec le patient et lui fournit une ordonnance avant de le quitter.

8 h 40 

Le résultat du test de gorge du premier patient du Dr LaSalle est négatif. Le médecin retourne voir le garçon et fait un deuxième test, qui sera envoyé à l’hôpital. « On vous appelle s’il y a quelque chose. Mais sinon, ça va passer, dit-il. S’il y a encore de la fièvre vendredi, revenez me voir. Dites-le au bureau en avant », dit le Dr LaSalle.

9 h 13 

Après avoir traité deux infections urinaires, le Dr LaSalle se présente devant un homme d’une quarantaine d’années qui dit ne pas dormir depuis quelques jours. Il a rendez-vous avec son médecin de famille dans plusieurs jours, mais il ne peut plus attendre. Il semble en détresse. Après quelques questions, le Dr LaSalle apprend que le patient a récemment perdu un être cher. L’homme est au bord des larmes. Le Dr LaSalle prend le temps de le rassurer. « Un deuil normal dure de six à huit mois. C’est normal d’avoir de la peine », dit-il. Le Dr LaSalle poursuit la discussion, puis l’homme repart, soulagé, avec une ordonnance pour quelques somnifères.

DE 9 h 22 À 13 h 15 

Les cas s’enchaînent à un rythme soutenu : diarrhée du voyageur, Tinea versicolor, mononucléose, mal de dos, d’épaule, de genou, plaie non guérie de césarienne… Le Dr LaSalle traite aussi une femme avec une douleur à un coude qui nécessite une infiltration et une autre qui a un abcès à l’épaule.

13 h 30 

Une femme âgée d’une soixantaine d’années est tombée sur la glace et a très mal à un poignet. Elle s’est présentée à la clinique à midi. Après avoir vu rapidement le Dr LaSalle, qui l’a envoyée faire une radiographie, elle est maintenant de retour. Le Dr LaSalle repère rapidement la fracture du poignet sur la radiographie. Le Dr LaSalle présente le diagnostic à la dame et lui propose deux options : une attelle plâtrée gratuite ou un plâtre en fibre de verre pour une cinquantaine de dollars. La dame opte pour le plâtre. À 13 h 40, la dame peut retourner chez elle, le bras plâtré, non sans avoir pris un rendez-vous de suivi. « On ne peut pas rouspéter : quel service ! lance-t-elle. Je vais aller me chercher un billet de loto en sortant ! »

« Si on ne peut plus charger les plâtres ici, on ne pourra plus offrir le service. Les patients vont devoir prendre rendez-vous à l’hôpital et y aller le lendemain. Ils vont perdre du temps. C’est dommage », dit le Dr LaSalle, qui continue ensuite de traiter des patients jusqu'en début de soirée.

Ce texte provenant de La Presse+ est une copie en format web. Consultez-le gratuitement en version interactive dans l’application La Presse+.