Opinion  Coopération internationale

Une petite contribution motivée par de grands idéaux

Le volontariat international développe chez l’individu des qualités peu sollicitées dans nos sociétés orientées vers la performance

Pourquoi partir comme volontaire à l’étranger ? 

Cette question m’a été posée à maintes reprises lors de mon dernier passage à Montréal. Chaque cas étant unique, je tâcherai d’y répondre à partir d’une expérience personnelle acquise en tant que volontaire à Tarapoto, dans l’Amazonie péruvienne. 

Tout d’abord, il est important de spécifier que je suis une volontaire. Je ne suis ni missionnaire, ni bénévole. Le programme canadien de coopération volontaire internationale pour lequel je travaille, UNITERRA, recrute des professionnels pour appuyer des partenaires locaux en vue d’améliorer les conditions socio-économiques des populations locales en Afrique, en Asie et en Amérique latine.

Personnellement, je me suis lancée dans cette aventure pour des raisons communes à bien des jeunes diplômés. Je désirais m’épanouir tant sur le plan professionnel que personnel, tout en apportant ma modeste contribution afin que les générations futures héritent d’une planète où il ferait mieux vivre. Or, aujourd’hui, après plus d’un an à œuvrer sur les défis de cette région du Pérou, je suis à même de constater combien cette expérience est enrichissante.

D’un point de vue professionnel, trois caractéristiques se sont avérés essentielles à mon travail : la débrouillardise, la créativité et l’adaptation. Trois qualités – je le réalise aujourd’hui – qui n’avaient jamais vraiment été sollicitées au cours de mes expériences précédentes, où il m’était plutôt demandé de répondre avec efficacité à des objectifs bien précis. Bien que le mandat qui m’a été confié exige un suivi sur les résultats obtenus, je bénéficie d’une grande autonomie quant à la manière de les atteindre.

La réalité du terrain est en effet empreinte de plusieurs changements politiques, climatiques et socioéconomiques qui m’obligent à faire preuve de flexibilité, de créativité et de perspicacité pour adapter et élaborer des mesures qui seront soutenables à long terme. Car le plus grand défi de mon travail demeure le fait que ces mesures puissent perdurer et exister après mon départ. Mener à bien un projet est une chose, mais faire en sorte que d’autres se l’approprient et le poursuivent est une toute autre histoire.

Sur le plan personnel, l’enrichissement acquis à l’étranger m’est inestimable. Je suis confrontée à de nouvelles visions, croyances, coutumes, hiérarchies, et bien plus. J’ai ainsi appris petit à petit à me mettre à la place de l’autre, à connecter avec sa réalité et à comprendre ses besoins.

Grâce à cette ouverture, j’y déconstruis entre autres les « normes et valeurs carriéristes » propres à notre société nord-américaine grandement basée, qu’on le veuille ou non, sur l’hyperconsommation.

Car il faut savoir que la voie du volontariat, c’est : faire assez d’argent pour vivre, mais pas assez pour investir ; être autonome, mais sans avoir de réelles perspectives d’avancement puisqu’il n’existe aucun poste « supérieur » ; développer des projets stimulants, mais sans réellement acquérir ces « hard skills » si valorisées par la vision productiviste actuelle ; marquer les gens avec lesquels on travaille, en sachant bien, une fois de retour, que le titre « volontaire » comportera toujours une connotation impropre aux stéréotypes de la « réussite ».

Alors, pourquoi partir comme volontaire à l’étranger ? Ce n’est ni pour dynamiser une carrière, ni pour jouer au missionnaire postcolonial. On part pour vivre une expérience unique qui s’insère dans une démarche personnelle et professionnelle où l’empathie, la créativité et la débrouillardise doivent prévaloir. 

Est-ce pour changer le monde ? Je rêve, bien sûr, à de grands changements collectifs, mais pour l’instant, le volontariat me permet d’apporter ma contribution dans une infime portion de l’Amazonie péruvienne, et il engendre dans une plus large mesure le désir d’un projet de vie orienté vers le respect de l’autre et de l’environnement.

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