Humour

Sugar Sammy primé en France

Sugar Sammy a remporté hier soir l’Étoile de l’humour du Parisien, ex æquo avec le comédien et réalisateur Fabrice Éboué. Les deux lauréats succèdent à Jamel, Alex Lutz, Dany Boon et Florence Foresti, primés les années précédentes. Diffusée vendredi soir sur la chaîne C8, la cérémonie des Étoiles couronne les coups de cœur culturels de la rédaction du populaire journal de la capitale de l’Hexagone, Le Parisien. Parmi les autres vainqueurs, mentionnons Muriel Robin (meilleure comédienne à la télé), ainsi que Roman Frayssinet, gagnant de l’Étoile Espoir de la relève en humour. Originaire du Val-de-Marne, dans la région parisienne, Frayssinet a été formé à l’École nationale de l’humour de Montréal (promotion 2015). À 24 ans, l’humoriste est un habitué des scènes montréalaises. Il a fait, entre autres, la première partie de… Sugar Sammy et présenté son spectacle solo, Alors, à l’Olympia en septembre dernier.  — Luc Boulanger, La Presse

Chronique

44 années d’igloos avec Guy Rondou

Il y a la gloire que l’on convoite et pour laquelle on serait prêt à vendre sa mère. Et il y a celle qui nous tombe dessus, sans raison, sans même qu’on ait eu à lever le petit doigt. C’est ce qui est arrivé à Guy Rondou, un jour de 1974.

Le premier disque de Beau Dommage venait d’être lancé. Les radios diffusaient en boucle les succès de cet opus, aussi bien dire l’ensemble des chansons. « Une tante m’a téléphoné pour me dire qu’elle avait entendu mon nom dans une chanson d’un nouveau groupe », raconte Guy Rondou.

« J’ai dans la tête un vieux sapin, une crèche en d’ssous

Un saint Joseph avec une canne en caoutchouc

Était mal faite pis j’avais frette

Quand je r’venais d’passer trois heures dans un igloo

Qu’on avait fait, deux ou trois gars, chez Guy Rondou »

« J’ai fait quelques recherches pour me rendre compte que l’auteur de la chanson était Pierre Huet, un ami d’enfance, poursuit Guy Rondou. J’ai alors compris que l’on parlait vraiment de moi. »

Et paf ! Le p’tit gars de Villeray dont le nom apparaît à la fin du premier couplet de la chanson 23 décembre venait d’entrer dans la légende.

« On me parle régulièrement de cette chanson, dit Guy Rondou. Encore l’autre jour, je suis allé passer un test de résonance magnétique. Le médecin m’a dit : “Vous savez que vous avez un nom célèbre ?” Il n’avait pas compris que j’étais le Guy Rondou de la chanson. »

Bien malgré lui, tous les ans durant la période des Fêtes, et plus particulièrement le 23 décembre, Guy Rondou devient une sorte de personnage folklorique.

Dans leur voiture ou dans leur maison, des milliers de gens chantent ce nom sans savoir s’il a été inventé de toutes pièces pour favoriser une rime ou s’il est rattaché à un être vivant.

« Ce que raconte Pierre est vrai, ajoute-t-il. On habitait au deuxième étage d’un triplex, rue Christophe-Colomb, entre Jean-Talon et Everett. Ma grand-mère était au rez-de-chaussée. C’est dans cette cour que Pierre Huet, Robert Perron, Régis Caron, Jean-Pierre Parent et moi faisions des igloos. »

Ces moments magiques, empruntés à l’enfance de cinq garçons libérés de devoirs et de leçons « jusqu’au 7 janvier », ont eu lieu à l’aube des années 60. Ils sont revenus à la mémoire de Pierre Huet alors que, en compagnie de Michel Rivard, Robert Léger et les autres membres de Beau Dommage, les premières chansons du groupe ont été créées.

« J’ai fait ce texte alors que je vivais chez mes parents, se souvient Pierre Huet. Je l’ai remis à Michel qui en a fait une musique. C’est aussi simple que cela. »

Même si la chanson 23 décembre est devenue un grand classique de Noël, elle n’a pas été écrite dans ce but. « Je voulais juste raconter des souvenirs d’enfance, dit Pierre Huet. Le 23 décembre était une date charnière pour les enfants. C’était le début des vacances. Je parle aussi de Dupuis Frères qui était le grand magasin des francophones de Montréal. C’est tout cela que je voulais rassembler. »

Pour ceux qui se posent la question, Pierre Huet n’est pas allé au réveillon habillé en communiant. « Ma mère avait loué mon habit chez Sauvé Frères, sur la Plaza St-Hubert. Croyant bien faire, elle avait eu l’idée de louer aussi un chapeau. J’avais l’air de Charlie Chaplin. J’ai porté ce costume à ma première communion, mais pas à Noël. Appelons ça une licence poétique. »

Quant au fameux Monsieur Côté, il n’a pas été le professeur des cinq garçons qui ont fréquenté l’école Saint-Arsène. « J’ai étudié plus tard au collège Saint-Ignace [baptisé Mont-Saint-Louis après la fermeture, en 1969, de celui qui était situé rue Sherbrooke], dit Pierre Huet. Monsieur Côté était mon professeur de syntaxe. C’était un homme formidable. J’ai voulu lui rendre hommage en le mettant dans la chanson. »

Alors que le groupe Beau Dommage était devenu immensément populaire, les membres avaient participé à un événement-bénéfice au TNM. « Je m’étais porté volontaire pour aller chercher des sandwichs, raconte Pierre Huet. À mon retour, la gang m’a dit : “Devine qui est passé nous voir ? Monsieur Côté !” Je l’avais raté. Je n’ai pas pu le saluer. »

Dans la chanson, il est également question de Doug Harvey (« La même année où j’ai passé / Le temps des Fêtes avec su’a tête une tuque d’hockey / Parce que j’voulais me faire passer pour Doug Harvey »). Encore là, l’auteur a jonglé avec la réalité. « Mon idole, c’était plutôt Jean-Claude Tremblay, dit Pierre Huet. Mais ça me donnait un pied de trop. J’ai dû me rabattre sur Doug Harvey. »

Ce qui est certain, c’est que Guy Rondou a existé et existe encore. Il a aujourd’hui 68 ans et vit tranquillement dans un village des Laurentides après une longue carrière comme courtier en services financiers.

Il est papa de trois enfants et grand-papa de quatre petits-enfants. « Un cinquième est présentement en route », dit-il fièrement.

Il y a plusieurs années, lors d’un tournoi de golf, une connaissance l’a mis en contact avec Pierre Huet.

« On va luncher au moins une fois par année tous les deux, dit Guy Rondou. Chaque 23 décembre, il m’envoie un courriel pour me souhaiter bon anniversaire. Ça démontre bien l’importance de cette chanson dans ma vie. »

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