Chronique 

Vive la pop culture !

« Ah non, j’aime pas ça, ça fait trop mainstream. »

L’ami qui m’a balancé cela l’a dit avec une moue dédaigneuse. On parlait de musique et du groupe The Chainsmokers que j’aime bien. Parce que cette formation rejoint un trop vaste public, elle est moins bonne, moins pertinente à ses yeux.

Une fois de plus, j’étais sonné par cet argument que j’entends régulièrement et avec lequel j’ai toujours eu beaucoup de mal. Autant je prends plaisir à découvrir des artistes musicaux pointus que personne n’écoute ou des œuvres rares d’un obscur compositeur de musique de film d’origine grecque ou lithuanienne, autant je ne boude pas mon plaisir quand il s’agit d’écouter de la musique bien faite et qui se retrouve sur les palmarès des radios commerciales. Si c’est bon pour moi, c’est bon pour moi. Point.

Ce débat que vous entendez souvent, vous allez pouvoir l’explorer et l’approfondir avec l’excellent ouvrage que le journaliste français Hubert Artus consacre à l’histoire de la pop culture. À coup d’exemples de toutes sortes, et fort bien présentés, il raconte l’ascension de cette forme de culture qui célébrera bientôt son 100anniversaire.

Née après la Seconde Guerre mondiale avec les pulps (ces romans grand public publiés sur du papier bon marché contenant de la pulpe de bois) et les Actions Comics, la pop culture a connu une véritable explosion dans les années 60 en Angleterre. Les Beatles ont été la figure de proue de ce mouvement qui n’a pas cessé d’évoluer depuis en s’adaptant aux valeurs de chacune des époques. Les années 70, 80 et 90 ont été bonnes pour la pop culture.

La première œuvre picturale issue de la pop culture a été créée en 1956. Elle est de Richard Hamilton. Intitulée Just what is it that makes today’s homes so different, so appealing ?, cette œuvre faisait partie d’une exposition baptisée This is Tomorrow qui a eu lieu à la Whitechapel Art Gallery de Londres.

Il s’agit d’un collage qui rassemble les principaux codes et les fondements de l’imagerie de la pop culture et du pop art. Objets symbolisant le modernisme de l’époque, univers de la publicité et de la consommation, vision d’un monde idyllique et aseptisé, tout cela est réuni dans cette œuvre de petit format aujourd’hui propriété de la Kunsthalle de Tübingen, en Allemagne.

La pop culture, contraction de « popular », qui veut dire « ce qui vient de la rue », est, pour l’auteur, « une alternative à ce qui vient des universités, des élites, des milieux autorisés ». Le terme vient aussi de l’expression « to pop up », car la pop « est un élan, un mouvement de la marge vers le centre », écrit Artus.

Le pop art serait né en réaction aux « approches trop intellectuelles » des dadaïstes et des modernistes. Mais attention, la pop culture a plusieurs visages. Elle est aussi alternative, militante et subversive. Pour comprendre cela, on n’a qu’à regarder du côté du pape du pop art, Andy Warhol, et de ses condisciples. Rappelons aussi que Jack Kerouac, William Burroughs et Allen Ginsberg sont considérés comme les premiers écrivains « pop ».

La lecture de l’essai de Hubert Artus est fort instructive. Mais surtout, elle contribue à nous débarrasser de certains complexes. Elle vous procurera de solides arguments quand, au cours d’une discussion, un ami vous dira que « ce n’est pas bon, car c’est trop mainstream ».

Pop Corner

La grande histoire de la pop culture 1920-2020

Hubert Artus

Don Quichotte

285 pages

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