Candidat sélectionné au poste de chef du SPVM

« Personne n’est né criminel », dit Fady Dagher

La police doit « servir toute la population, toutes les populations », a affirmé Fady Dagher, jeudi, au lendemain de sa sélection comme prochain chef du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM).

Se qualifiant d’« incorruptible », il a annoncé vouloir mener un service de police qui travaille « dans l’humilité » et qui réussit le « mariage » entre répression et prévention. L’actuel chef de la police de Longueuil veut « un service de police beaucoup plus inclusif, qui saisit les enjeux des populations en voie de marginalisation, qui saisit les enjeux de l’immigration ». Car « personne n’est né criminel ».

M. Dagher a été sélectionné mercredi par le comité de la Ville de Montréal chargé de trouver un nouveau chef de police, un coup de théâtre imprévu par les observateurs. L’information a rapidement fuité. Jeudi, il franchissait une nouvelle étape vers sa nomination officielle en effectuant ses premières sorties publiques.

Celui qui a travaillé au SPVM de 1992 à 2017 a refusé d’entrer dans les détails de ses plans pour l’organisation, mais a exposé sa vision générale.

« Ce qui m’inquiète beaucoup, c’est qu’on réagit aux crises. Mais on est capables d’intervenir avant les crises. »

— Fady Dagher, candidat sélectionné au poste de chef du SPVM

Il a précisé vouloir créer « un esprit de village » dans la communauté. Il faut que le SPVM tisse des liens avec la population en dehors des moments de grande tension, parce que sinon, « ça a l’air beaucoup plus d’un maquillage ».

Mais le prochain chef de police sera aussi capable d’être ferme envers les criminels : quand il est question « d’armes à feu, de fusillades, ce n’est pas le temps du dialogue. C’est le temps d’intervenir ».

« La perle rare »

En après-midi, la mairesse de Montréal Valérie Plante s’est félicitée du choix de son administration.

« On cherchait la perle rare », a-t-elle affirmé, en conférence de presse à l’hôtel de ville. « Cette personne, c’est Fady Dagher. Sa nomination […] est tout à fait cohérente avec les gestes qu’on pose depuis plus d’un an pour assurer la sécurité de toutes les Montréalaises et de tous les Montréalais. » Elle a vanté « l’avant-gardisme » de son prochain chef de police.

« Sa feuille de route est impressionnante », a ajouté la mairesse. « Il a développé un modèle de sécurité qui est innovant à la Ville de Longueuil. […] M. Dagher comprend bien la réalité de Montréal. C’est un Montréalais, il habite toujours Montréal d’ailleurs. »

« Fady représente l’avenir de la police. »

— Valérie Plante, mairesse de Montréal

Après l’allocution de la mairesse, M. Dagher a répondu aux questions des médias.

Il a refusé de dire s’il croyait que le SPVM comptait suffisamment de policiers ou s’il voulait reproduire ses expériences de Longueuil à Montréal. Les problèmes sont les mêmes, a-t-il toutefois précisé : le 911, « c’est incroyable à quel point c’est rendu un fourre-tout. Le policier, ce n’est pas un magicien, a-t-il dit. Ce n’est pas à [lui] de régler les problèmes de la société au complet ».

Sur le profilage racial, il a adopté un angle d’attaque déconcertant : « J’en ai fait, du profilage racial, a-t-il reconnu sans ambages. Je l’ai fait de façon complètement inconsciente, sans m’en rendre compte, jusqu’à ce que je le subisse moi-même. […] Les dommages collatéraux sont majeurs, les impacts sur la dignité humaine sont énormes. » Il préconise des mesures d’accompagnement pour les policiers qui font du profilage non intentionnel, mais des mesures disciplinaires contre ceux qui sont mal intentionnés.

« Il a fait du bon travail »

Le choix de M. Dagher continuait de susciter des réactions, jeudi.

Le syndicat qui représente les policiers de Montréal a accueilli la nouvelle positivement. « La Fraternité souhaite à monsieur Fady Dagher la bienvenue et la meilleure des chances », a-t-il affirmé sur les réseaux sociaux. « C’est avec ouverture et la main tendue que la Fraternité rappelle néanmoins qu’outre la violence armée, d’autres importants défis l’attendent, notamment l’établissement des conditions nécessaires au recrutement d’un nombre fortement majoré de policiers et policières dans un contexte de concurrence, de pénurie de recrues ainsi que de retraites et de démissions nombreuses. »

Le président de la Ligue des Noirs du Québec, Max Stanley Bazin, s’est réjoui de cette sélection. « L’approche humaine de Fady Dagher, c’est sûr que ça va changer les choses. Il a une expérience de terrain, il a fait du bon travail à la tête de la police de Longueuil et il s’est mis en avant pour changer la culture policière qui est décriée par la Ligue des Noirs du Québec », explique-t-il en entrevue avec La Presse.

Avec cette nomination, la Ligue des Noirs du Québec se dit plus ouverte à collaborer avec la police. « On pourrait éventuellement ouvrir des rencontres entre des jeunes et les policiers, et faire en sorte que ces jeunes aient plus confiance en la police », conclut son président.

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