La « réduflation », ou en avoir moins pour le même prix

Alors que l’augmentation des prix des produits de base, les frais d’expédition plus élevés et la pénurie de main-d’œuvre font augmenter les coûts pour les fabricants de produits alimentaires, des experts affirment que la diminution de la quantité de nourriture incluse dans un emballage est un moyen subtil de s’adapter à l’inflation sans augmenter les prix.

Les fabricants de produits alimentaires réduisent régulièrement la taille de leurs emballages pour compenser la hausse de leurs coûts tout en maintenant leurs prix stables, une stratégie de vente au détail parfois appelée « réduflation », contraction de « réduction » et « inflation ».

« Les transformateurs alimentaires ont tendance à être durement touchés par la hausse des coûts des intrants », a noté Sylvain Charlebois, directeur du Laboratoire d’analyse agroalimentaire de l’Université Dalhousie.

« Ils veulent rester compétitifs dans un marché inflationniste, et pour ce faire, ils jouent avec les quantités au lieu d’augmenter les prix des produits. »

Moins de biscuits Oreo

La stratégie de réduction des emballages fait en sorte que les consommateurs en ont moins pour leur argent lorsqu’ils achètent toutes sortes de produits, allant des biscuits aux croustilles en passant par le fromage et le jus d’orange.

Un emballage original de biscuits Oreo, par exemple, a diminué d’environ 3 biscuits, à 270 grammes contre 303 grammes, soit une réduction d’environ 10 % en poids.

Un porte-parole de Mondelēz Canada, qui fabrique la marque de biscuits emblématique, a déclaré que la société avait réduit la taille de certains emballages d’Oreo plus tôt cette année.

« Il est important de noter que ce changement est le résultat de plusieurs facteurs, notamment les coûts des produits de base nettement plus élevés qui constituent un défi dans l’ensemble de l’industrie depuis un certain temps. »

– Noah Farber, porte-parole de Mondelēz Canada

« Nous travaillons fort pour nous assurer d’offrir un bon rapport qualité-prix à nos consommateurs, mais nous ne ferons jamais de compromis sur le goût ou la qualité d’Oreo, qui est apprécié par des millions de consommateurs à travers le monde. »

Les consommateurs peuvent également remarquer qu’il y a moins de croustilles dans un sac, de craquelins dans une boîte ou de barres tendres dans un emballage. Un sac de croustilles Lay’s pèse désormais 165 g plutôt que 180 g, les barres tendres Quaker Chewy sont livrées avec 5 barres au lieu de 6, ou 120 g au lieu de 156 g, et le fromage Armstrong pèse 600 g au lieu de 700 g, selon les données compilées par M. Charlebois.

Les producteurs alimentaires ont également repensé les bouteilles de jus d’orange pour créer une plus grande bulle creuse au fond, donnant aux consommateurs l’impression que la bouteille est de la même taille tout en réduisant la quantité de jus, a-t-il souligné.

Les contenants de jus d’orange Oasis, par exemple, contiennent désormais 1,5 litre au lieu de 1,65 litre, tandis que les contenants de jus Tropicana contiennent 1,54 litre plutôt que 1,75 litre, a illustré M. Charlebois.

« C’est subtil parce qu’ils modifient les emballages, a-t-il déclaré. Cela vous donne l’illusion que vous achetez en fait la même quantité pour le même prix, mais ce n’est pas le cas. »

Un irritant

La tactique de « rétrécissement » irrite les consommateurs, de récentes publications sur les réseaux sociaux qualifiant la stratégie de « sournoise ».

Mais M. Charlebois note que le prix par 100 grammes ou 100 millilitres est divulgué aux consommateurs dans les épiceries, et que la réduction de la taille des emballages pourrait avoir un impact positif sur le gaspillage alimentaire.

« Ma plus grande préoccupation avec la “réduflation” est de savoir comment nous suivons les taux d’inflation des aliments au Canada », a-t-il déclaré, notant que nous pourrions sous-estimer l’inflation des aliments si la réduction de la taille des emballages n’est pas prise en compte.

Statistique Canada a dit que son indice des prix à la consommation (IPC) compare le coût d’un panier fixe de biens et services au fil du temps. L’agence fédérale a indiqué que ses spécialistes des produits de base sont en mesure de procéder à un ajustement de la quantité qui tient compte des changements dans la taille des emballages afin de garantir que les augmentations de prix se reflètent dans l’IPC.

Un porte-parole de Produits alimentaires, de santé et de consommation du Canada, un groupe industriel représentant les fabricants de produits alimentaires au Canada, n’était pas disponible pour une entrevue.

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