Banque du Canada

Des économistes réclament de nouveaux objectifs

Après presque 30 ans d’une politique monétaire basée sur le contrôle de l’inflation, il est temps pour la Banque du Canada d’ajouter d’autres objectifs tout aussi souhaitables à sa mission, comme celui du plein-emploi.

C’est ce qu’a proposé hier un groupe de 61 économistes dans une lettre au ministre des Finances Bill Morneau, à qui ils demandent de modifier la Loi sur la Banque du Canada.

L’idée est de mieux refléter la réalité, explique Mario Seccareccia, professeur émérite au département de science économique de l’Université d’Ottawa et un des signataires de la lettre, avec Pierre Fortin, Pierre Paquette et d’autres économistes d’un peu partout au pays.

« Dans les faits, la Banque du Canada se préoccupe de bien d’autres facteurs dans l’élaboration de sa politique monétaire, notamment de l’endettement des ménages et des écarts de production, explique-t-il. Alors, pourquoi ne pas le dire clairement ? »

Le plein-emploi est un objectif tout aussi désirable pour le Canada et il devrait faire partie du mandat de la banque centrale, propose le groupe de spécialistes.

D’autres banques centrales sont guidées par un mandat multiple, notamment celle de la Nouvelle-Zélande, qui a décidé récemment d’inclure le plein-emploi dans sa mission, fait-il valoir.

Le contrôle de l’inflation autour d’un taux cible de 2 % est devenu l’objectif central de la politique monétaire canadienne en 1991, après une entente entre le gouvernement conservateur de Brian Mulroney et la Banque du Canada. Cette entente est renouvelée tous les cinq ans, et l’a été pour la dernière fois en 2016, pour une période qui ira jusqu’en 2021.

Le bon moment

Le groupe d’économistes estime que le moment est bien choisi pour entamer la discussion sur la possibilité pour la Banque du Canada d’adopter un mandat élargi. « D’une part, la banque centrale mène depuis 10 ans une politique monétaire qui a des objectifs multiples et, d’autre part, d’autres banques centrales le font », dit Mario Seccareccia.

En plus d’ajouter les mots « favoriser le plein-emploi productif » à l’article 1 de la Loi sur la Banque du Canada, les économistes proposent que la banque centrale justifie et explique ses décisions à la fin de chaque période de cinq ans, avant chaque renouvellement de son entente avec le gouvernement.

« Ce ne serait pas une grande révolution, admet le porte-parole du groupe. Mais ça serait un changement qui rendrait les choses plus transparentes et plus compréhensibles pour l’ensemble des Canadiens. »

Le ministre des Finances n’avait pas encore réagi hier à la proposition du groupe d’économistes, qui a reçu l’appui de la sénatrice Diane Bellemare, qui est aussi économiste.

Rendez-vous en juillet

La Banque du Canada laissera vraisemblablement demain son taux directeur inchangé, à 1,25 %. C’est du moins ce que prévoient la plupart des économistes, dont Sébastien Lavoie, de la Banque Laurentienne. « L’absence d’entente sur le renouvellement de l’ALENA et le ralentissement du crédit à la consommation et du marché immobilier sont parmi les facteurs qui poussent la banque centrale à reporter la prochaine hausse en juillet », estime-t-il. Benoit P. Durocher, de Desjardins, est du même avis. Il prévoit une hausse du taux directeur en juillet, et une autre à l’automne, peut-être en octobre. Jeudi, soit le lendemain de la réunion de la Banque du Canada sur le taux directeur, Statistique Canada publiera les chiffres sur la croissance économique du mois de mars, ce qui bouclera le premier trimestre de 2018 et alimentera la réflexion de la banque centrale.

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