L’aéroport de Saint-Hubert a franchi, hier, une étape importante dans sa démarche afin de devenir un aéroport commercial attrayant pour les transporteurs au rabais en inaugurant une piste renforcée capable d’accueillir de plus gros avions.
Les travaux, dont la facture a été d’environ 17 millions de dollars, étaient rendus nécessaires par l’arrivée en fin de vie utile du revêtement et de l’éclairage de la piste. Comme l’aéroport est déjà utilisé par un transporteur commercial, Pascan Aviation, il était admissible au Programme d’aide aux immobilisations aéroportuaires du gouvernement fédéral. Celui-ci a, à ce titre, fourni 13 millions.
La direction de l’aéroport a toutefois aussi profité de l’occasion pour augmenter la capacité portante de la piste, ce qui lui permet d’accueillir de plus gros avions. Elle a, pour ce faire, réuni 4 millions de dollars additionnels.
La nouvelle piste pourra donc maintenant être utilisée par les avions commerciaux monocouloirs les plus populaires du monde, le Boeing 737 et l’Airbus A320, ainsi que l’A220, anciennement connu sous le nom de C Series.
Prêt à servir, mais...
Théoriquement, il manque encore un élément très important à l’aéroport de Saint-Hubert avant de pouvoir accueillir des vols commerciaux réguliers : une aérogare.
« On a besoin d’une aérogare, c’est la prochaine étape », convient Charles Vaillancourt, président du conseil d’administration de l’aéroport.
Il y a toutefois un bémol.
« Si un transporteur voulait opérer rapidement, on pourrait trouver un édifice temporaire, estime M. Vaillancourt. Il faudrait monter dans l’avion avec un escalier mobile. Nous accueillons déjà des vols nolisés. »
« Ce qu’il manque, c’est une zone sécurisée, avec une salle d’attente sécurisée, et un endroit pour le traitement des bagages. Je pense qu’il y a deux édifices dans lesquels on pourrait installer cela en attendant. »
— Charles Vaillancourt, président du conseil d’administration
Quant à l’aérogare, le projet est encore jeune. « On ne sait même pas encore où on voudrait la situer dans l’aéroport », note M. Vaillancourt. Un plan directeur est toutefois déjà en phase de conception et devrait être livré en février ou mars prochain.
De là, il faudra prévoir un montage financier pour lequel il existe plusieurs options, selon M. Vaillancourt. Les investisseurs institutionnels, notamment, ont récemment développé un appétit pour ce type d’infrastructures. D’autres entreprises pourraient souhaiter le financer en échange, par exemple, d’une exclusivité sur la vente de carburant.
La possibilité que la construction de l’aérogare soit payée par un transporteur, comme ce fut le cas quand Porter a fait renaître l’aéroport Billy-Bishop de Toronto, est toutefois exclue.
« C’est un cas assez exceptionnel, ce n’est pas dans le modèle d’affaires des transporteurs », estime M. Vaillancourt, selon qui il est par ailleurs impensable d’amorcer la construction sans un accord de principe avec au moins un transporteur s’engageant à l’utiliser.
Certains investisseurs et transporteurs ont déjà fait montre d’intérêt, affirme-t-il.
« Il y a des transporteurs qui commencent à penser que ça aurait du sens d’opérer depuis Saint-Hubert. »
Des citoyens inquiets
L’annonce d’hier n’est pas sans inquiéter la présidente du Comité antipollution des avions – Longueuil (CAPA-L), Johanne Domingue. Ce regroupement de citoyens a déposé en avril dernier une requête d’outrage au tribunal relativement au non-respect, selon lui, des horaires des écoles de pilotage établis dans une entente à l’amiable survenue en 2015.
Mme Domingue, qui siège à un comité sur la pollution acoustique créé dans le cadre de cette entente, a déploré n’avoir appris que par la voie des journalistes la tenue d’une annonce, hier matin. À sa connaissance, aucune étude n’a encore été réalisée sur l’impact sonore de l’arrivée à l’aéroport de plus gros avions.
« On parle d’être en harmonie avec la collectivité, mais on ne nous a pas consultés », déplore-t-elle.
Pour la mairesse de Longueuil, Sylvie Parent, les problématiques dénoncées par les citoyens touchent surtout les plus petits appareils utilisés par les écoles de pilotage, qui effectuent des manœuvres d’atterrissage et de décollage à répétition.
« Il y a déjà quelques gros avions qui utilisent l’aéroport, notamment des jets privés, et il n’y a pas de plaintes par rapport à ça », dit-elle.