Dans le domaine résidentiel, l’amiante peut se retrouver dans le plâtre, le ciment, l’isolation, les tuiles de plancher et de plafond, ainsi que le revêtement mural. Une fois projetées dans l’air et inhalées, les particules d’amiante peuvent causer à long terme des maladies graves, comme le cancer.
Pourtant, les spécialistes estiment que le grand public est peu conscient des risques. « Il y a encore de la sensibilisation à faire, particulièrement à l’ère où les gens regardent beaucoup d’émissions de rénovations et décident de mener leurs projets eux-mêmes, sans faire appel à des professionnels », explique François-William Simard, vice-président à l’Association des professionnels de la construction et de l’habitation du Québec.
Il explique que de nombreux Québécois s’inspirent de ce qu’ils voient à la télévision en s’occupant de la phase de démolition pour économiser des sous, sans être conscients des risques pour leur santé. « Si monsieur ou madame Tout-le-Monde détruit des murs et qu’il y a de l’amiante dans le gypse, des particules peuvent se retrouver dans l’air et devenir un grand problème », ajoute-t-il.
Lors des démarches d’achat d’une propriété, les questions sur l’amiante sont peu fréquentes, selon Mathieu Lagarde, courtier pour l’équipe Christine Gauthier de RE/MAX.
« Tant et aussi longtemps qu’on n’en découvre pas durant l’inspection, les clients ne nous en parlent pas. C’est un sujet méconnu, spécialement au sein de la jeune génération d’acheteurs, qui n’a pas été élevée en étant exposée aux risques de l’amiante dans les médias. »
— Mathieu Lagarde, courtier pour l’équipe Christine Gauthier de RE/MAX
Même son de cloche chez Abas Sakande, chargé de projets pour l’entreprise en construction Groupe Langevin. « Les gens ne sont pas suffisamment au courant. Ils ont plus peur de la moisissure que de l’amiante, alors que cette dernière est très dangereuse. Si vous inhalez des particules, vous ne serez pas nécessairement malade en quelques jours. Ça peut prendre des années avant de ressentir les effets. »
Il déplore aussi que certains professionnels de la construction prennent le sujet à la légère. « Je vous assure que plusieurs entrepreneurs font des rénovations, sans en tenir compte. »
Prévention
Toutefois, les méthodes de prévention et de décontamination existent. Les entrepreneurs certifiés savent identifier les matériaux pouvant contenir de l’amiante. Ils peuvent alors prélever des échantillons et les faire examiner par un laboratoire indépendant, afin de déterminer si les risques sont faibles, modérés ou élevés. « Une panoplie de mesures de protection sont ensuite prescrites en fonction de chaque degré de risque », souligne M. Simard.
Des vêtements de protection aux gestes à faire, tout est pensé pour empêcher la poussière de contaminer l’aire de travail. « On fait des tests journaliers dans l’espace de travail, explique l’employé du Groupe Langevin. À la fin des travaux, on vérifie pour s’assurer que tout est conforme. »
Moins qu’avant ?
Puisque les matériaux contenant de l’amiante ne sont plus permis dans la construction résidentielle depuis 1980, les constructions faites au cours des quatre dernières décennies sont largement à l’abri de ces problèmes. Et les travaux de rénovation réalisés sur les vieilles propriétés font peu à peu disparaître les risques de contamination, depuis 40 ans. « Il n’y a pas de statistiques compilées sur le sujet, alors c’est difficile de quantifier s’il y a encore beaucoup de maisons contenant de l’amiante, précise François-William Simard. Mais si on suit la logique des rénovations qui font disparaître sa présence, il devrait y en avoir de moins en moins. Mais il y en a encore et les mesures de précaution sont toujours nécessaires. »
Le courtier immobilier Mathieu Lagarde affirme néanmoins qu’il faut parfois relativiser la situation. « On a déjà géré la vente d’une maison dans laquelle on trouvait une plaque isolante de quatre pieds par quatre pieds, en haut du système de chauffage, qui contenait probablement de l’amiante. Comme la plaque était en ciment, il n’y avait rien de volatil. Mais les acheteurs ont eu peur et ils ont demandé une baisse de prix ridicule en fonction de la valeur de la propriété. »
Résultat : la transaction n’a pas eu lieu et le vendeur a préféré payer quelques centaines de dollars pour faire enlever la plaque, plutôt que d’accepter un prix de vente déraisonnable.
« C’est souvent moins cher pour le vendeur de faire décontaminer que d’accepter l’estimation des coûts des travaux faite par l’acheteur. Toutefois, si le vendeur n’a pas les moyens de payer les experts en décontamination, il doit déclarer la présence d’amiante et considérer le tout dans le prix. »
— Le courtier immobilier Mathieu Lagarde
Avec les années, le courtier et son équipe ont décidé de prévenir les négociations potentiellement ardues au sujet de l’amiante, en conseillant à leurs clients de commander des préinspections. « On préfère découvrir la présence de vermiculite [un isolant qui contient parfois de l’amiante] avant de mettre une propriété sur le marché, dit-il. On la fait tester, et s’il n’y a pas d’amiante, il n’y a pas de problème. On évite surtout de créer de gros doutes dans la tête des acheteurs, alors que la présence de vermiculite n’est pas toujours grave. »