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Jouer à se réinventer
La Presse
Pourquoi faire bouger un avatar à l’écran quand on peut contrôler un ami en chair et en os ? Vous voulez vivre l’expérience de piloter un vaisseau spatial sans aucun écran ? Et pourquoi pas vous amuser à remanier le gouvernement Trudeau ?
Ces jeux inattendus, et des dizaines d’autres, c’est un peu la tradition au pôle Technoculture, Arts and Games (TAG) de l’Université Concordia. Pas question ici de concurrencer Ubisoft ou Electronic Arts avec des jeux vidéo à grand déploiement, au potentiel commercial explosif.
Le mot-clé, c’est la recherche pure. Et notamment de jeux sans écran. « On est quand même dans une société axée sur l’écran, alors qu’il y a beaucoup d’autres types de jeux, qui vont notamment être axés sur le corps, explique Lynn Hughes, directrice et cofondatrice du TAG. Nous sommes axés sur la création de jeux sans écran. »
Même quand un ordinateur est impliqué dans un des jeux développés dans son pôle de recherche, elle préfère utiliser la notion de « jeux numériques » plutôt que vidéo. Certains de ses étudiants participent à la recherche plus traditionnelle, avec une thèse s’intéressant à un des multiples aspects sociaux, culturels ou artistiques du jeu. D’autres choisissent des formules hybrides, entre la thèse et la conception de jeux pour l’illustrer.
Si Montréal est reconnu comme une des capitales du jeu vidéo, Concordia s’est imposée depuis quelques années comme un des espaces de recherche critiques, où l’on tente notamment d’explorer des pistes originales avec une portée sociale. On veut faire contrepoids à la « ludification », cette tendance qu’on associe aux jeux superficiels, aux mécaniques simplistes sans aucune vision.
Lynn Hughes, avant d’être professeure ou directrice du TAG, est d’ailleurs elle-même conceptrice de jeux depuis une quinzaine d’années. Sa spécialité : l’interaction entre joueurs.
« On n’essaie pas de reprendre ce que l’industrie fait, précise-t-elle. Nous fabriquons des jeux expérimentaux, tentons de mêler par exemple jeu vidéo et documentaire, parfois avec écran, parfois sans. Mais toujours avec un regard critique. »
Inauguré à la fin du mois de mars 2016, Milieux est un institut de recherche « transdisciplinaire » de l’Université Concordia. Son mandat est de repenser et transformer l’art, la culture et la technologie. Concrètement, Milieux regroupe sur plusieurs étages de l’édifice EV, rue Sainte-Catherine Ouest, sept groupes de recherche, dont les dénominations officielles ne sont pour l’instant qu’en anglais. On y trouve ainsi Community and Differential Mobilities, Media History, Post-Image, Performance, Immersion and Interactivity, Textiles and Materiality, Technoculture, Art and Gaming ainsi qu’Indigenous Futures. Ce sont ces trois derniers groupes que
présente dans ce dossier.