Médecine
Des questions et encore trop peu de réponses
La Presse
Plusieurs symptômes s’atténuent avec le temps et jusqu’à 20 % des autistes finissent par ne plus présenter ceux qui ont fait en sorte qu’un diagnostic a été initialement posé. « Chez eux, l’autisme ne disparaît pas pour autant comme par magie », a souligné Marc Woodbury-Smith, professeur au département de psychiatrie et de neurosciences comportementales de l’Université McMasters.
À son avis, les médecins ont simplement plus de mal à identifier les difficultés fonctionnelles qui continuent d’alourdir le quotidien de bon nombre de leurs patients une fois qu’ils ont atteint l’âge adulte.
De façon générale, on estime qu’il y a quatre garçons autistes pour une fille autiste. Le D
David Skuse, directeur du département des sciences neurologiques et comportementales du University College de Londres, avance, lui, que la vraie proportion est probablement de l’ordre de 2,5 pour 1. « Le problème vient de ce que l’autisme est plus difficile à diagnostiquer chez les filles, qui ont moins de comportements répétitifs que les garçons et dont les difficultés sont moins visibles que les leurs », indique-t-il.À l’école, les filles qui souffrent d’autisme sans avoir encore reçu de diagnostic en ce sens ont souvent moins de mal à socialiser que les garçons. Par contre, indique le D
Skuse, les parents indiquent qu’elles font beaucoup de crises à la maison.« L’autisme, chez ces filles, se manifeste beaucoup par la dépression et par l’anxiété […]. Comme les outils de diagnostic ont été élaborés en fonction des manifestations de l’autisme chez le garçon, plusieurs filles passent sous le radar. »
— Le D
David Skuse, directeur du département des sciences neurologiques et comportementales du University College de LondresComme l’a indiqué le D
Woodbury-Smith, ils demeurent plus touchés par la maladie mentale que le reste de la population. Selon la littérature scientifique, plus de 60 % d’entre eux devront composer toute leur vie avec l’anxiété et avec des épisodes dépressifs. Ils vivent le plus souvent beaucoup d’instabilité dans leurs relations amoureuses et selon une étude citée par le D Woodbury-Smith, à peine 5 % d’entre eux finissent par se marier. Très peu d’entre eux auront des problèmes avec la justice. « Leur tendance à suivre les règles de manière très rigide fait en sorte que ce sont des citoyens qui respectent très bien la loi en général. »De la même façon, très peu d’entre eux fumeront ou auront des problèmes de dépendance, des habitudes qui sont toutes perçues comme étant « mauvaises » à leurs yeux.
« Nous sommes encore à la recherche d’un modèle génétique qui identifierait l’autisme, mais nous en sommes encore loin », explique le D
Stephan Sanders, professeur adjoint de psychiatrie à l’Université de Californie.Quelque 1000 gènes semblent être en cause et ce sont aussi bien des variations génétiques spontanées qu’héritées des parents qui poseraient problème, selon toute vraisemblance.
D’autres études évoquent aussi des causes environnementales. Une étude scandinave a aussi récemment évoqué le syndrome des ovaires polykystiques comme l’une des pistes d’étude.
Saura-t-on un jour pendant la grossesse qu’on attend un enfant autiste ?
La difficulté de trouver la cause de l’autisme est telle qu’on est encore très loin de pouvoir le diagnostiquer pendant la grossesse, souligne le D
Stephan Sanders.« Et même si on le pouvait, que pourraient faire les parents avec l’indication qu’ils ont par exemple 10 % de risque d’avoir un enfant autiste ? En plus, cela ne leur dirait pas à quoi ressemblerait la vie de leur enfant. Serait-il en mesure d’aller à l’université ou pas, par exemple ? On ne pourrait pas le prédire. »
— Le D
Stephan Sanders, professeur adjoint de psychiatrie à l’Université de CalifornieComme la cause de l’autisme n’est pas encore cernée, le D
Sanders croit que pour l’instant, il est impossible de donner un avis médical aux parents à ce sujet, ne serait-ce qu’avec un minimum de certitude.La mémantine, plus communément prescrite aux gens qui ont l’alzheimer, le riluzole, habituellement donné aux personnes souffrant de sclérose latérale amyotropique, et l’ocytocine, une hormone administrée pour entraîner physiologiquement les contractions du travail lors de l’accouchement, font l’objet d’études.
En évoquant ces diverses pistes, la D
Evdokia Anagnostou, chercheuse et clinicienne à Toronto, n’a pas manqué de souligner à quel point ces traitements sont expérimentaux et qu’ils doivent faire encore l’objet de plusieurs études avant d’être plus largement prescrits, leurs effets secondaires pouvant être importants.