OPINION RÉFÉRENDUM EN CATALOGNE

L’enjeu fondamental du « droit de décider »

Le 14 septembre dernier, l’Institut de recherche sur l’autodétermination des peuples et les indépendances nationales (IRAI) a rendu public à Barcelone le rapport du Groupe d’experts internationaux sur le processus d’autodétermination du peuple catalan par l’IRAI.

Rédigé par un groupe d’universitaires de réputation internationale, la Danoise Nina Caspersen (Université York, Royaume-Uni), le Britanno-Canadien Matt Qvortrup (Université Coventry, Royaume-Uni), l’Argentine Yanina Welp (Université de Zurich, Suisse) et moi-même, ce rapport a examiné les aspects historiques, sociologiques, politiques et légaux du processus d’autodétermination mis en branle par le gouvernement et le Parlement de la Catalogne.

Ce processus comprend la tenue d’un référendum prévue pour le dimanche 1er octobre 2017 et à l’occasion duquel les Catalans répondront à la question suivante : « Voulez-vous que la Catalogne devienne un État indépendant sous la forme d’une république ? »

Dans le déroulement du processus en cours, un enjeu fondamental, soit celui du « droit de décider », c’est-à-dire le droit du peuple catalan de se prononcer librement et démocratiquement sur son statut politique, a émergé.

Après avoir constaté qu’une très forte majorité de Catalans sont en faveur d’un tel droit, qu’ils appuient ou non l’indépendance de la Catalogne, le rapport rappelle que le droit de décider trouve son fondement dans le droit à l’autodétermination des peuples consacré par la Charte des Nations unies et les Pactes internationaux relatifs aux droits de l’homme, et peut également s’appuyer sur des développements récents du droit européen ainsi que sur le droit constitutionnel comparé, notamment sur l’avis de la Cour suprême du Canada formulé dans le cadre du Renvoi relatif à la sécession du Québec qui ancre le droit de décider dans le principe démocratique.

Quelques observations

Plusieurs autres observations formulées dans les quatre parties du rapport et relatives au processus d’autodétermination du peuple catalan actuellement en cours méritent d’être soulignées.

• On assiste à la montée de l’indépendantisme non seulement parmi les décideurs politiques, mais également au sein de la société civile de Catalogne à la suite de la sentence du Tribunal constitutionnel espagnol de 2010, déclarant inconstitutionnelles plusieurs dispositions d’un nouveau Statut d’autonomie ayant pourtant été approuvé par les Parlements de Catalogne et d’Espagne, de même que par le peuple catalan par référendum ;

• La Loi sur le référendum d’autodétermination adoptée par le Parlement catalan le 6 septembre dernier respecte, pour l’essentiel, les standards internationaux en matière d’organisation de référendums ;

• Étant une décision de nature politique, la reconnaissance par les États de la Communauté internationale d’une déclaration d’indépendance de la Catalogne est difficile à prédire. La réponse de Madrid jouera très certainement un rôle déterminant, mais les États de la communauté internationale pourraient ne pas être indifférents à la volonté d’indépendance de la Catalogne exprimée de façon pacifique et démocratique.

Au moment où l’État espagnol multiplie les gestes tendant à nier le droit de décider du peuple catalan, il importe de rappeler que plusieurs pays ont choisi de respecter la volonté démocratique de leurs peuples et d’accepter que le principe démocratique soit pleinement mis en œuvre.

Le Québec et l’Écosse sont deux exemples où le principe démocratique a prévalu, mais il y en aura plusieurs autres à venir dans de nombreuses régions du monde.

Tout au long de son histoire, le peuple catalan a su préserver son identité distincte par des moyens démocratiques – y compris des référendums. Il se trouve aujourd’hui à la croisée des chemins en cherchant à mener à terme un processus d’autodétermination dans l’exercice de son droit de décider.

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