« Je blâme notre président »
Des résidants d'El Paso ne souhaitent pas voir Donald Trump se rendre dans leur ville
Donald Trump doit se rendre aujourd’hui à Dayton, en Ohio, puis dans la ville texane d’El Paso, où beaucoup doutent de la détermination du président des États-Unis à combattre l’extrémisme après les deux tueries qui y ont fait 31 morts le week-end dernier.
Jordan Anchondo, Gloria Irma Marquez, Ivan Manzano, David Johnson… Les noms des 22 personnes tombées samedi au Texas sous les balles d’un tireur de 21 ans barrent les croix blanches dressées à leur mémoire dans le stationnement du centre commercial où beaucoup d’entre elles faisaient leurs provisions pour la rentrée scolaire.
Dans un silence pesant rompu épisodiquement par des chants et des airs de cornemuse, les visages fermés des centaines d’anonymes venus se recueillir lundi au soleil couchant balançaient entre langueur et colère.
« Je blâme notre président. Sa rhétorique, sa haine envers les gens qui n’ont pas la même couleur de peau, il n’a pas le droit de faire ça », a dénoncé Silvia Rios, habitante d’El Paso.
Un peu plus loin, près d’un monceau de fleurs, de ballons, de peluches et de bougies, Rosario Meyer estimait aussi que Donald Trump était « au cœur du problème », lui qui avait lancé sa campagne victorieuse de 2016 « en traitant les Mexicains de criminels, de meurtriers et de violeurs ».
Le milliardaire new-yorkais n’a pas vraiment édulcoré son langage depuis son arrivée à la Maison-Blanche, évoquant régulièrement une « invasion » des États-Unis par les milliers de migrants d’Amérique centrale qui viennent chaque mois y chercher l’asile.
Un terme repris par le jeune auteur de la tuerie d’El Paso dans un manifeste mis en ligne avant son passage à l’acte, fatal à au moins sept ressortissants mexicains.
Alors, beaucoup ont douté de la sincérité de Donald Trump lorsqu’il a condamné lundi « le racisme, le sectarisme et le suprémacisme blanc » dans une allocution solennelle depuis la Maison-Blanche.
Ils se demandent s’il sera capable d’éteindre l’incendie qu’il a, selon eux, lui-même contribué à attiser.
« Ce président, qui a alimenté la haine ayant rendu possible la tragédie de samedi, ne doit pas venir à El Paso. »
— Beto O’Rourke, candidat à la primaire démocrate pour la présidentielle de 2020, originaire d’El Paso
La conseillère du président Kellyanne Conway dénonce de son côté une « politisation » des tueries du week-end par l’opposition et assure que son patron « s’emploie à rassembler le pays ».
La ville de Dayton, dans l’État de l’Ohio, a été le théâtre dans la nuit de samedi à dimanche d’une autre tuerie dans laquelle neuf personnes ont perdu la vie.
« Je peux seulement espérer qu’il vienne ici, en tant que président des États-Unis, parce qu’il souhaite apporter quelque chose à notre communauté », a réagi sur CNN la mairesse démocrate de Dayton, Nan Whaley, « déçue » par le flou des propos présidentiels sur l’encadrement des ventes d’armes au lendemain de la double tragédie.
« Je ne suis pas certaine, franchement, qu’il sache de quoi il parle », a-t-elle estimé.
Donald Trump a réaffirmé hier matin sur Twitter être « la personne la moins raciste » du monde.
Il avait invité à la mi-juillet quatre élues démocrates issues de minorités à « retourner » d’où elles venaient. Et il s’en est violemment pris dernièrement à un élu noir de Baltimore et à sa circonscription « infestée de rats ».
En retweetant les présentateurs de l’une de ses émissions préférées, sur la chaîne Fox News, le dirigeant républicain laisse également transparaître un sentiment d’injustice à se voir montré du doigt pour des tueries qui ne datent pas de son arrivée au pouvoir.