Entrevue avec François Legault

Il faut « stimuler l’économie, plutôt que réduire la dette »

Québec présentera sa mise à jour économique mardi. Profitant de l’occasion, François Legault veut lancer le débat sur l’utilisation des surplus budgétaires. Il a choisi son camp : réduire les impôts des particuliers. Et miser sur l’éducation et les investissements privés pour stimuler l’économie. Pour amorcer la discussion, il prépare une tournée des médias. Entrevue avec le chef de la Coalition avenir Québec (CAQ).

Le gouvernement du Québec génère des surplus. Que faut-il faire :  réduire la dette ou stimuler l’économie ? 

Il n’y a pas eu de débat de société au Québec sur l’utilisation des surplus. Et il est temps d’en avoir un. Au cours des dernières années, à l’international, la pensée des économistes, de gauche comme de droite, a évolué. De plus en plus, un consensus se développe pour stimuler l’économie, plutôt que réduire la dette. On n’a pas eu cette discussion ici. Pour ma part, je pense qu’il est urgent d’utiliser nos outils pour relancer l’économie. 

Pourquoi est-ce à ce point urgent ? 

Sur 61 États et provinces en Amérique du Nord, le Québec arrive au 57rang en termes de pauvreté. Et ce qu’on vit, c’est le monde à l’envers. Des pays avec de meilleures performances que nous s’inquiètent de leur économie. Alors que nous, avec une croissance prévue par Desjardins de seulement 1,2 % cette année, on se préoccupe de la dette. Je sais que le premier ministre, Philippe Couillard, n’est pas un économiste. Mais il fait une grave erreur en suivant la position dogmatique de son ministre des Finances.

Que proposez-vous pour stimuler l’économie ? 

Il faut utiliser une partie des surplus budgétaires et des versements prévus au Fonds des générations pour baisser les impôts et se redonner de l’oxygène. Il faut remettre 500 $ par contribuable, soit 1000 $ par famille. Ça représente 1,7 milliard. Ça compenserait en partie les 1300 $ que les familles ont de moins dans leurs poches, depuis deux ans. Il faut aussi investir quelques centaines de millions en éducation. Et stimuler l’investissement privé.

Le Fonds des générations a été institué pour ne pas léguer aux générations futures une trop grande dette publique. Vous ne voyez pas de problème à y puiser ? 

Le gouvernement envisage de verser 2 milliards dans ce Fonds cette année. Pour les cinq prochaines années, il prévoit y verser près de 15 milliards. C’est bien beau, parler de dette pour les générations futures, mais c’est aussi important de leur donner les moyens d’avoir une économie qui crée pour elles de la richesse. On a du rattrapage à faire. Présentement, on ne peut pas à la fois se payer les meilleurs services, baisser la dette et relancer l’économie. En utilisant une partie des versements dans le Fonds des générations, on appuie sur l’accélérateur économique, sans sacrifier nos services, et on maintient quand même le cap sur l’équilibre budgétaire.

Le gouvernement a choisi d’autres moyens de réduire, à terme, le fardeau fiscal. Selon La Presse, le gouvernement annoncera, lors de sa mise à jour économique, qu’il abolit la taxe santé en 2017. Qu’en pensez-vous ? 

Si c’est le cas, ça représenterait, en moyenne, 160 $ par famille. C’est rire des contribuables. On est loin du 1000 $ qu’on propose. Et je ne m’attends pas à d’autres mesures d’importance. Ce qui m’inquiète, c’est que je soupçonne le gouvernement d’attendre à la veille des élections de 2018 pour faire une baisse substantielle des impôts. Ce serait une manœuvre purement politique. Pourtant, c’est maintenant qu’il faut le faire. C’est maintenant que les familles et l’économie du Québec en ont vraiment besoin.

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