Opinion  Histoire nationale

Les Patriotes n’étaient pas souverainistes

La lutte des insurgés de 1837 était surtout guidée par des principes politico-économiques

On présente faussement les Patriotes comme des souverainistes. Or, leur rébellion n’était pas une « guerre des races », mais plutôt une « guerre des classes » – exactement comme celle qui se déroulait au Haut-Canada au même moment.

Vers la fin de 1837, une rébellion armée a débuté à la fois dans le Haut- Canada et le Bas-Canada, pour des raisons semblables. Dans les deux cas, le pouvoir était concentré dans les mains d’un petit groupe : le « Family Compact » dans le Haut-Canada et la « Clique du Château » dans le Bas-Canada. Les classes aisées étaient associées au haut clergé pour se maintenir au pouvoir. Par exemple, Jean-Jacques Lartigue, l’évêque de Montréal, a recommandé l’obéissance civile.

Les Patriotes demandaient surtout un pouvoir plus grand pour les membres de l’Assemblée législative élue, incluant des responsabilités ministérielles et l’éligibilité pour nomination au conseil exécutif. C’était donc une lutte politico-économique contre une minorité locale contrôlant tout.

Il suffit d’étudier le nom des chefs patriotes pour constater que ce n’était pas une affaire de race.

Le point d’origine des Patriotes militants était la Société des Fils de la Liberté, une organisation paramilitaire fondée par de jeunes partisans du Parti patriote devenus impatients. L’organisation avait deux sections. La première, civile, était surtout dirigée par Louis-Joseph Papineau et son bras droit, Edmund Bailey O’Callaghan. La seconde était une section militaire dirigée par un Anglais, Thomas Storrow Brown.

Les vrais chefs guerriers, avec Brown, étaient deux Anglais, Robert et Wolfred Nelson. Il faut d’ailleurs être très clair : Papineau ne voulait pas d’une rébellion armée. C’est plutôt Wolfred Nelson qui a moussé l’idée.

DES ANGLOPHONES AU FRONT

Quand la rébellion a finalement commencé le 23 novembre 1837, ce sont les Patriotes commandés par Wolfred Nelson qui ont défait les forces britanniques durant la première bataille, à St-Denis. À Saint-Charles, le 25 novembre, Thomas StorrowBrown dirigeait environ 200 Patriotes qui attendaient de pied ferme 406 soldats britanniques et 20 cavaliers dans une bataille perdue d’avance.

Le leader nominal des Patriotes, Papineau, avait déjà quitté la scène, bien avant le début des hostilités, pour des raisons qui sont toujours obscures, sinon suspectes.

Dans le Haut-Canada, Mackenzie menait exactement la même bataille que son ami Papineau. Les deux groupes se parlaient avant la rébellion et après leur exil aux États-Unis. Ils ont même formé un groupe commun, Les Chasseurs Amis.

En 1838, ces deux hommes tentaient de fomenter une rébellion de plus grande envergure. Cette fois-ci, ils demandaient chacun de leur côté la création d’une république. Et contrairement à ce que veut la mythologie québécoise, c’est Robert Nelson, un Anglo-Canadien, qui a écrit la première déclaration d’indépendance.

Il est intéressant de noter que durant la guerre civile en Espagne dans les années 1930, le nom du bataillon canadien était « Mackenzie-Papineau ». La lutte pour la démocratie ne finit jamais !

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