Avantagés ou pas ?

Les joueurs de la NCAA repêchés par une équipe de la LNH peuvent rester à l’université en attendant leur autonomie

Il y a eu Kevin Hayes, Blake Wheeler, Justin Schultz, Jimmy Vesey et maintenant, Will Butcher et Alexander Kerfoot.

Chaque été, de jeunes joueurs de collèges américains boudent les clubs qui les ont repêchés après quatre ou cinq ans dans la NCAA et font monter les enchères auprès des plus offrants.

Les récentes embauches de Butcher par les Devils du New Jersey et de Kerfoot par l’Avalanche du Colorado ont provoqué un cri du cœur du vétéran Brandon Dubinsky sur les réseaux sociaux.

L’attaquant des Blue Jackets de Columbus a décrié l’avantage que peuvent détenir les hockeyeurs de la NCAA comparativement à ceux des rangs juniors, qui ont seulement deux ans pour signer un premier contrat. D’autres se demandent par ailleurs si la valeur des joueurs issus des rangs collégiaux ne diminuera pas compte tenu du nombre d’entre eux qui optent pour l’autonomie (règle générale, ils peuvent le faire après quatre ans ou 30 jours après l’obtention d’un diplôme).

La situation ne semble pas perturber le moindrement un dirigeant d’équipe de la LNH sondé ces derniers jours par La Presse.

« Les meilleurs espoirs repêchés aux premier et deuxième tours ne resteront pas quatre ans au collège de toute façon, répond-il. Tu n’auras pas de problèmes avec eux. La plupart de ceux dont on parle ont été repêchés dans des rondes plus tardives et se sont développés sur le tard. Comme ils voient leur valeur monter, ils décident de magasiner. »

Blake Wheeler est l’un des rares choix de premier tour, avec Kevin Hayes, à être demeuré plus longtemps au collège pour se prévaloir de son statut de joueur autonome. Repêché cinquième au total par les Coyotes de Phoenix en 2004, il s’est joint aux Bruins de Boston en 2008.

Justin Schultz est un choix de deuxième tour des Ducks d’Anaheim qui a choisi les Oilers d’Edmonton, avant d’être échangé aux Penguins de Pittsburgh. Jimmy Vesey est un choix de troisième tour des Predators de Nashville.

Butcher (Colorado) et Kerfoot (New Jersey) ont constitué des choix de cinquième tour.

« Je ne sais pas ce qui s’est passé dans le dossier de Justin Schultz, répond notre interlocuteur. Dans le cas de Vesey, on entend qu’il y avait mésentente entre les deux clans. Comme ils pouvaient magasiner et que les relations n’étaient pas au goût des joueurs, ils ont signé ailleurs. C’est important de travailler fort pour établir une relation avec ces joueurs-là. »

Priorité ?

Les joueurs de la NCAA pourraient néanmoins souffrir de la situation à certains égards. « Rendu en cinquième, sixième ou septième ronde, si tu as le choix entre un Européen, un joueur des rangs juniors ou un gars de collège, tu sais que le gars de collège va magasiner si sa valeur monte avec les années, répond notre homme de hockey. Tu dois en tenir compte dans ta prise de décision. Et je ne pense pas que les règlements changeront. Il faudrait renégocier dans la convention collective, elle ne sera pas échue avec quelques années, et je ne suis pas convaincu que ça sera une priorité. »

Ces courses aux joueurs autonomes font pourtant saliver les médias. Mais pour un Vesey ou un Schultz, il y a des dizaines de Mike Reilly, Drew LeBlanc, Brock Trotter et Junior Lessard.

« Les médias doivent produire du contenu nouveau 24 heures par jour, 365 jours par année, rappelle notre gestionnaire. C’est la chance pour les médias d’avoir du contenu. Les clubs savent que ce ne sont pas des valeurs sûres, mais ce qui rend ces joueurs attrayants pour eux, au-delà de leur potentiel comme joueurs, c’est qu’ils ne coûtent pas de choix au repêchage et que leur salaire est limité par les balises de la convention. En plus, ils deviennent joueurs autonomes en août, quand il y a moins de nouvelles dans le monde du hockey. »

L’agent de joueurs Kent Hughes abonde dans le même sens que le dirigeant de la LNH.

« Ce n’est pas un problème, selon moi. On en entend parler à l’occasion à une période précise de l’année, mais quand tu regardes le portrait global, ça reste mineur. Nous représentons Colin White, Michael Matheson, deux choix de premier tour, et ils n’auraient pas voulu attendre quatre ans au collège avant de signer leur contrat. Ça aurait constitué un compromis et un sacrifice énorme sur le plan contractuel et salarial. »

Le cas de Hayes représente une rare situation isolée pour un choix de premier tour, selon Hughes. « Kevin Hayes est resté au collège quatre ans, mais il s’est blessé gravement durant son passage là-bas et il avait besoin d’une année supplémentaire. En plus, son frère Jimmy n’avait pas été retenu par l’équipe qui l’a repêché, les Blackhawks de Chicago. »

Hughes a eu vent, lui aussi, des déclarations de Brandon Dubinsky. « Il a toujours eu de fortes opinions. Mais rappelons-nous qu’il y a plusieurs années, les joueurs de collège restaient la propriété des équipes et n’avaient aucun pouvoir de négociation, tandis que les joueurs juniors qui menaçaient de se soumettre à nouveau au repêchage après deux ans pouvaient en tirer profit. Chris Drury en a été victime à l’époque et il a touché beaucoup moins d’argent que ses confrères des rangs juniors en début de carrière. »

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