Dépendances

Emmanuelle, 34 ans

Les Fêtes arrivent, les réunions familiales aussi. Pour Emmanuelle*, ces rassemblements évoquent quelques souvenirs qu’elle aimerait oublier. Des souvenirs de son mari, ivre.

« Je me rappelle encore une fête de famille où mon chum a pris le micro et s’est mis à faire le con, complètement paqueté, raconte la jeune femme. Le monde rit, mais rit… Et moi, je suis dans mon coin, tellement en colère ! Pour moi, le monde ne rit pas de ce qu’il dit : le monde rit de lui. »

Emmanuelle s’est éloignée pour appeler un membre d’Al-Anon de son téléphone portable. Ça lui a fait du bien.

Le mari d’Emmanuelle est alcoolique toxicomane : alcool et cocaïne.

« Plusieurs périodes de consommation très active, d’autres plus faibles, et quelques périodes d’abstinence. On a deux enfants. Ça fait plus de 15 ans qu’on est ensemble. »

— Emmanuelle

Quand Emmanuelle l’a rencontré, vers la fin de l’adolescence, il buvait un peu plus que la moyenne, mais c’était un gars bâti. Emmanuelle se disait qu’il était capable d’en prendre.

Ils ont vécu de belles années ensemble jusqu’à ce que son mari sombre dans la consommation, il y a une dizaine d’années, après avoir vécu des conflits avec sa famille et au travail.

« Il voulait la paix, dit Emmanuelle, dont les enfants étaient tout petits à l’époque. Parfois, je devais être achalante aussi. Quand il n’était pas là, j’assumais, mais quand il était là, je pouvais être sur son cas, parce que j’avais besoin de lui. »

Son mari a le réflexe de partir quand il consomme, sans doute pour que sa femme et ses enfants ne le voient pas ainsi. En période de consommation active, Emmanuelle tient la maison à bout de bras. Son mari, qui travaille beaucoup, consomme alors son salaire. « Même plus. »

« Quand il revient, il n’attend pas d’être correct, souligne Emmanuelle. On peut le retrouver par terre, ça peut être l’ambulance qu’on appelle. Ça peut être dramatique. C’est l’horreur. »

Tant qu’elle le pourra, et tant qu’il essayera de s’en sortir, Emmanuelle souhaite rester à ses côtés, bien qu’elle ignore si elle pourra subir encore longtemps les conséquences de sa consommation et qu’elle sait que certains seront portés à la juger.

« Lorsqu’il est sobre, il revient rapidement à lui et je peux vous assurer que je suis une femme comblée », dit Emmanuelle, qui souligne à quel point elle aime sa personnalité, son charme et son humour. Elle aime tout de lui. Tout, sauf cette maladie.

* Les noms ont été changés pour préserver l’anonymat des protagonistes. 

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