famille hamdan

La paix, enfin

Joliette — Dans le nouveau logement de la famille Hamdan, les décorations de Noël sont omniprésentes. Des poinsettias sont disposés au salon. Dans la cuisine, un petit sapin est illuminé, décoré de fleurs artificielles mauves. Le rouge est omniprésent. « J’adore les fleurs, les couleurs, la verdure », dit Eman Al-Samkri, 29 ans. Dans ses bras, sa fille Rose, âgée de 8 mois, babille, sourit.

Arrivés en février, les Hamdan insistent pour s’imprégner de l’ambiance du temps des Fêtes. Et ce, même s’ils sont musulmans. « Quand les Canadiens rient, nous rions ; quand ils pleurent, nous pleurons. Nous voulons participer à leurs joies, à leurs peines », confie Mohamed Hamdan, 39 ans.

Dehors, un homme est en train de pelleter. Une dizaine de centimètres de neige sont tombés. C’est la première bordée de la saison. À travers la fenêtre, Rose regarde la scène, amusée. De retour de l’école sous peu, Maher, 9 ans, et Gaith, 6 ans, s’amuseront assurément, fébriles, sous les flocons.

Eman et Mohamed préfèrent l’automne, qui leur a laissé une première impression magique. « On avait vu des photos, on croyait que toutes ces couleurs étaient créées par Photoshop. Maintenant, on sait que c’est vraiment la nature d’ici », raconte Mohamed, en jetant un coup d’œil à la télévision. Il est mordu de la chaîne Chasse et Pêche, précise sa femme.

En Syrie, l’homme chassait le lapin et la perdrix. Ça lui manque. Il aimerait bien chasser le chevreuil. « Et le caribou », ajoute-t-il, les yeux grands.

La barrière de la langue

Pour l’instant, tous ses efforts sont consacrés à l’apprentissage du français. Il suit des cours depuis juin. L’entrevue se déroule en arabe, à l’aide d’une interprète.

« La barrière de la langue est notre principale difficulté. Quand on est face à une secrétaire médicale, on ne sait pas comment s’exprimer. Même chose au supermarché. Dans les allées, les gens nous aident spontanément à nommer les produits en français », s’étonne-t-il, reconnaissant. « Les gens sont compréhensifs, ils semblent conscients des six ans de terreur que nous avons vécus. On a plein de soucis dans la tête et un simple 5 + 5 peut être parfois compliqué. »

Les Hamdan ont quitté leur ville natale d’Al-Kadam, au sud de Damas, en 2011, lors des premiers affrontements en Syrie. Ils ont changé de quartier, sont allés à la campagne chez les parents d’Eman. Ils n’étaient plus à l’abri nulle part. « Témoin d’attaques, Gaith a longtemps fait des terreurs nocturnes », raconte sa mère. Ils ont tous fui en Jordanie, où ils ont séjourné dans un camp de réfugiés pendant deux ans. Eman y a enseigné les sciences et les mathématiques à des enfants de 8 à 12 ans. Puis, ils se sont envolés vers le Canada.

huit familles syriennes à joliette

Depuis l’an dernier, Joliette a accueilli huit familles syriennes avec l’aide du Comité régional d’éducation pour le développement international de Lanaudière (CREDIL). Au moins quatre nouvelles familles sont attendues d’ici la fin de 2016. « Nous sommes une seule et même grande famille, souligne Mohamed. Nous nous fréquentons, nous veillons les uns sur les autres. »

En cours d’année, les Hamdan ont déniché un logement plus grand, plus coquet, en bordure des terres agricoles. Les garçons se sont fait des copains dans le quartier. L’état de santé de Rose, née prématurément, s’est beaucoup amélioré. « On a enfin l’impression de souffler, de se poser », confie Mohamed.

Rose pleure, s’agite. « Je dois aller l’allaiter », s’excuse Eman, en souriant. La vie, simplement.

— Avec la collaboration de Salima Addadi, médiatrice interculturelle et traductrice au CREDIL

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