Opinion Santé

La prévention des infections dans les hôpitaux

Patients et visiteurs doivent être mis à contribution.

Les bactéries multirésistantes occupent une place grandissante dans l’espace médiatique. Le plus récent rapport de surveillance des infections nosocomiales de l’Institut national de santé publique du Québec nous apprend que, bien que leur incidence soit à la baisse, les infections acquises à l’hôpital causées par des bactéries comme le Staphylococcus aureus résistant à la méthicilline ou le Clostridium difficile sont bien présentes au Québec et menacent les patients hospitalisés. Depuis quelques années, on assiste aussi au Québec à l’arrivée fracassante des bactéries résistantes aux carbapénèmes, des antibiotiques de dernier recours.

Comme médecins spécialistes en microbiologie-infectiologie, une partie de notre travail consiste à traiter, mais aussi à prévenir la propagation de ces infections dans nos hôpitaux. De concert avec les équipes de prévention des infections et les professionnels impliqués dans les soins directs aux patients, nous élaborons et mettons en place des protocoles visant à prévenir la propagation de ces bactéries souvent mortelles :  mesures d’isolement des patients porteurs de bactéries multirésistantes, promotion de l’utilisation rationnelle des antibiotiques, etc. 

Malgré leur apparente lourdeur, ces mesures sont indispensables pour freiner la propagation de ces bactéries.

Récemment, je me suis retrouvé dans un rôle qui m’est moins familier… Celui du proche accompagnant un être cher hospitalisé. Ma jeune fille de 6 ans (Flavie) s’est malheureusement infligé une fracture nécessitant une chirurgie complexe, l’installation de quatre tiges métalliques et une hospitalisation. Cet événement difficile m’a cependant permis d’observer un milieu de soins que je côtoie quotidiennement d’un angle nouveau.

Durant cette hospitalisation à l’unité de pédiatrie, j’ai vu un nombre non négligeable de parents outrepasser les consignes de l’unité, notamment en lien avec le respect de l’hygiène des mains et les mesures d’isolement (telles que le port de blouses, de gants et/ou de masques). Les protocoles les plus stricts ne parviendront pas à contrôler les infections acquises à l’hôpital s’ils ne sont pas respectés. Les patients et leurs proches ne peuvent pas connaître tous les mécanismes menant à la transmission des infections dans les milieux hospitaliers. C’est pour cette raison que les chambres de patients nécessitant des mesures d’isolement sont décorées d’affiches très voyantes expliquant des mesures simples à appliquer. On ne peut plus plaider l’ignorance.

Bien sûr, il est aussi possible que le non-respect des patients soit le reflet de la pratique des soignants. Si ces derniers ne respectent pas eux-mêmes les règles de prévention et contrôle des infections, les patients peuvent conclure que ces mesures ne sont pas nécessaires, qu’elles sont optionnelles. 

Notre message pour tous doit donc être clair : le respect du port des équipements de protection et l’hygiène des mains sont des composantes clés pour limiter la propagation des bactéries multirésistantes.

En conclusion, la guerre aux microbes est déjà commencée dans nos hôpitaux. Les professionnels de la santé ont un rôle majeur à jouer dans cette lutte, mais celui des patients est tout aussi important. Sans l’implication de tous, la survenue d’une infection résistante à tous les antibiotiques actuellement disponibles n’est peut-être pas si loin…

* Alex Carignan est également professeur agrégé et chercheur à la faculté de médecine et des sciences de la santé de l’Université de Sherbrooke (papa de Flavie).

Yves Longtin est aussi professeur agrégé à la faculté de médecine de l’Université McGill.

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