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Édition du 20 février 2017,
section ACTUALITÉS, écran 5
Avant de faire rénover sa maison par un entrepreneur, on lui demande des références et on vérifie s’il a été poursuivi. Mieux vaut faire la même chose avant de choisir son dentiste, conseille le syndic de l’Ordre, Mario Mailhot : « On ne doit pas être obnubilé parce que c’est un docteur et lui faire une confiance aveugle. »
On ne doit pas non plus se fier aux publicités. « J’ai choisi ma dentiste parce qu’elle annonçait dans les journaux qu’elle était "à la fine pointe de la profession" et qu’elle avait des "équipements à la fine pointe de la technologie"… Ça ne l’a pas empêchée de rater ma tumeur », confie Manon Tremblay, une victime d’Alma.
Lorsqu’il ne s’agit pas d’un traitement de routine, le patient doit recevoir un plan, une estimation écrite des coûts et des explications intelligibles – y compris au sujet des avantages et des inconvénients des options possibles, indique le Dr Mailhot : « Quand on paie des services, on a le droit de poser des questions. »
C’est aussi au dentiste d’assurer une certaine coordination. « Ce n’était pas suffisant de dire au client ce qu’il devait faire faire par un autre professionnel ; il aurait fallu établir un lien de communication entre denturologiste et dentiste, a précisé l’an dernier la Cour des petites créances. […] Monsieur est un agriculteur, fournisseur de légumes ; il n’est pas censé connaître la science médicale et un professionnel ne pouvait pas compter sur lui. »
Avant de consentir à un traitement, le patient doit avoir été informé des risques de séquelles et des probabilités d’échec – par le dentiste lui-même, pas seulement sur papier. L’évaluation du risque doit être personnalisée (notamment parce qu’un canal calcifié ou une racine courbée peuvent compliquer le traitement).
Si jamais un cas est trop complexe pour lui, le dentiste doit adresser son patient à un spécialiste.
Un dentiste qui agit dans les limites de ses compétences et dans les règles de l’art, après avoir obtenu un consentement éclairé, n’a pas à dédommager son patient si les choses tournent mal accidentellement (comme le bris d’une lame). Il doit par contre l’en informer et lui en expliquer les conséquences.
« Lorsque le montant en jeu est considérable, on recommande d’aller chercher un deuxième avis. Un dentiste qui vient de s’acheter un appareil dispendieux aura tendance à vouloir s’en servir, alors qu’il existe peut-être une option moins coûteuse ou ayant de meilleures chances de succès », dit le Dr Mailhot.
Autre raison d’oser aller voir ailleurs : plusieurs victimes de traitements ratés sont vainement retournées voir leur dentiste pour qu’il soulage une douleur persistante. Dans l’espoir d’échapper aux conséquences, ces derniers ont préféré leur cacher ce qui s’était produit (racine perforée, nerf atteint, lame brisée) que de les soigner ou de les adresser à un spécialiste. Alors qu’il faut généralement agir vite pour éviter qu’un problème – comme des engourdissements très handicapants – devienne irréversible.
Le Code de déontologie interdit aux dentistes de se faire payer à l’avance. « On voit régulièrement des dentistes vendre leur pratique et partir avec les montants avancés », prévient le Dr Mailhot.
Le Code interdit aussi aux dentistes de faire signer aux patients des décharges de responsabilité pour empêcher ces derniers de les poursuivre. Mais plusieurs en font fi. Consolation pour les patients : un tel document n’est pas valide et ne pourra donc être utilisé contre eux en cour, assure Me Jean-Pierre Ménard, spécialiste des causes d’erreurs médicales.
Porter plainte à l’Ordre ou poursuivre le dentiste en dommages peut protéger les autres patients, en attirant l’attention sur les fautifs. Cela peut aussi avoir un impact sur la sévérité des sanctions disciplinaires éventuelles, puisque le Conseil tient compte du nombre de patients lésés.
À savoir : les patients qui souhaitent se plaindre ont le droit d’avoir accès au contenu de leur dossier dentaire et d’en obtenir une copie. Un dentiste qui les en empêche – ou qui modifie le dossier pour les berner – commet une faute déontologique. Les dentistes ne peuvent détruire le dossier d’un patient avant qu’il se soit écoulé au moins cinq ans depuis sa dernière visite.