Aide médicale à mourir

Un « manque de préparation » reproché au CHUM

C’est ce que révèle une décision du Tribunal administratif du travail au sujet d’une infirmière qui dit avoir vécu un stress post-traumatique à la suite de la première demande d’aide médicale à mourir au CHUM.

Pas de protocole implanté, pas de formation dispensée. Malgré une période de 18 mois pour se préparer, le Centre hospitalier de l’Université de Montréal (CHUM) n’était pas prêt à gérer son premier cas d’aide médicale à mourir lorsqu’il est survenu, fin 2015, révèle une décision de justice.

Une infirmière des soins palliatifs de l’hôpital a évoqué ce retard en tentant de faire reconnaître que la mort accélérée de ce premier patient lui avait causé un stress post-traumatique.

« La preuve révèle que malgré que la date de l’entrée en vigueur des dispositions de la loi ait été connue à l’avance, l’équipe n’était pas prête pour intervenir », a écrit le juge administratif Michel Larouche, du Tribunal administratif du travail, dans une décision récente où il souligne un « manque de préparation ».

Il a toutefois rejeté la demande de l’infirmière qui souhaitait être indemnisée.

Le CHUM ne contredit pas directement les conclusions de M. Larouche, mais indique que « le protocole était bel et bien développé au moment de la première demande d’aide médicale à mourir ». Était-il implanté ? Pas de réponse du CHUM.

Selon la décision, « des documents étaient en cours de validation » en décembre 2015 lorsqu’un homme atteint d’un cancer de la gorge et hospitalisé aux soins palliatifs a demandé à mourir. Il s’agirait du premier cas à survenir au CHUM. « L’unité des soins palliatifs est prise au dépourvu », écrit M. Larouche.

Refus de participer

L’infirmière M.F. était habituée à voir des patients mourir dans son travail au sein de cette unité. Mais de là à contribuer activement à la mort d’un patient, il y a un pas que la professionnelle ne voulait pas franchir. Alors que les infirmières avaient été réunies pour discuter de la marche à suivre, l’infirmière M.F. a informé son patron qu’elle refusait d’y participer. Demande acceptée.

Mais le surlendemain, jour choisi pour l’administration de l’aide médicale à mourir, on lui demande de trouver une veine sur le patient et d’aider à le déplacer sur une civière, ce qu’elle fait. Elle apporte aussi du soutien à la famille du malade. Elle n’est toutefois pas impliquée directement dans sa mort.

Dans les jours suivants, l’infirmière vit « des cauchemars, une perte d’énergie et une grande tristesse ». Un médecin pose un diagnostic de stress post-traumatique, mais un « rapport médical final » retient plutôt un diagnostic d’ « anxiété post-traumatique », relate la décision.

Pas un accident de travail

Le juge administratif Larouche a conclu que « c’est le fait qu’un patient ait décidé de se pourvoir du protocole sur l’aide médicale à mourir qui est à la source de son état », mais que comme ce sont les « convictions » de l’infirmière qui sont choquées, il ne s’agit pas d’une lésion professionnelle que la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST, l’ex-CSST) doit couvrir. Il confirmait ainsi la décision de l’organisme.

« Le manque de formation du personnel n’a eu aucun impact », a déterminé M. Larouche.

L’infirmière M.F. a refusé la demande d’entrevue de La Presse.

« Chaque demande d’aide médicale à mourir représente une charge émotive pour toutes les personnes qui y participent, dont les professionnels », a déclaré le CHUM par la voix de sa porte-parole Isabelle Lavigne.

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