Pour ou contre le retour du masque ?

La recommandation du Collège des médecins de porter le masque dans les lieux publics fait jaser. Pour ou contre ? Avec le froid qui s’installe et la période des fêtes de bureau qui se pointe à l’horizon, La Presse a récolté des réactions dans les milieux de la santé, de l’éducation et des résidences pour aînés.

Il faut d’abord le dire : le port du masque était déjà recommandé dans les espaces publics quand il est difficile de respecter une distance avec les autres, souligne Judy Morris, présidente de l’Association des médecins d’urgence du Québec. Le Collège des médecins n’a fait qu’un « bon rappel » sur Twitter dimanche, ajoute la médecin.

Et ce n’est pas un hasard. « Les gens sont un peu tannés d’entendre dire ça, mais le système, il est saturé. Les urgences pédiatriques débordent. On voit aussi des personnes âgées dans les hôpitaux pour adultes avec l’influenza, la COVID-19 ou le virus respiratoire syncytial », dit-elle.

« Il faut que les gens tiennent compte de la situation actuelle », note l’urgentologue à l’hôpital du Sacré-Cœur.

La Dre Morris n’est pas en faveur du retour du masque obligatoire dans les espaces publics, mais elle croit que la Santé publique devrait lancer un message fort alors que le temps froid s’installe et que la population restera davantage à l’intérieur. « Il faut que les gens comprennent que c’est pour protéger les gens autour d’eux », dit-elle.

Lundi, le médecin hygiéniste en chef de l’Ontario a justement « recommandé fortement » le port du masque dans les lieux publics intérieurs, lors d’une mise à jour sur la saison des virus respiratoires pédiatriques. Le DKieran Moore étudie également la possibilité de rendre le masque obligatoire dans les écoles et les garderies ; comme au Québec, les hôpitaux pédiatriques ontariens débordent. En parallèle, Ottawa a annoncé lundi l’importation d’acétaminophène et d’ibuprofène pour nourrissons et enfants pour contrer la pénurie de médicaments qui perdure.

Et dans les classes ?

Dans les écoles du Québec, la plupart des enseignants ne portent plus le masque depuis mai. Ils n’y sont plus obligés, affirme Mélanie Hubert, présidente de la Fédération autonome de l’enseignement. « Il n’y a pas un appétit des professeurs de le porter à tout prix. Si la situation devait se détériorer à un point tel que la Santé publique en faisait une obligation, c’est sûr qu’on recommanderait à nos membres de suivre cet avis », dit-elle.

« S’il n’y a pas d’obligation, vous comprendrez que nos profs, ils sont partout sur l’échiquier de la société. Il y en a qui sont promasque, d’autres sont contre, d’autres sont mitigés. Nos membres ne sont pas différents du reste de la société. »

— Mélanie Hubert, présidente de la Fédération autonome de l’enseignement

Le président de la Centrale des syndicats du Québec, Éric Gingras, confirme que les enseignants et le personnel scolaire partagent la position de la population générale : ils n’ont pas envie d’un retour en arrière au sujet du port du masque. « Si ça devient obligatoire, on se rangera derrière les décisions scientifiques », convient-il.

« Par contre, si on identifie les écoles comme étant un endroit où il faut porter obligatoirement le masque, et qu’ailleurs, ce n’est pas le cas, ce sera inacceptable, si c’est pour remplacer la ventilation inadéquate », prévient-il.

Dans un échange écrit avec La Presse, l’Association québécoise des CPE a également confirmé qu’elle se pliera aux recommandations de la Santé publique et de la CNESST, s’il y a lieu. L’Association des pédiatres du Québec a préféré ne pas faire de commentaires.

« Beaucoup vont mal réagir »

Dans les résidences privées pour aînés (RPA), la majorité de la clientèle ne porte plus le masque, affirme Marc Fortin, président-directeur général du Regroupement québécois des résidences pour aînés. Et le retour du couvre-visage serait une bien mauvaise nouvelle pour les aînés et réveillerait de bien mauvais souvenirs. « Beaucoup vont mal réagir. On a tellement eu de surconfinement en RPA. Des personnes ont été confinées dans leur chambre, leur petit appartement ou leur grand appartement pendant six ou sept semaines. Il y a eu une dégradation de leur capacité motrice, et mentalement, beaucoup ont été déprimés », soutient-il.

Voir toutes les personnes âgées comme étant vulnérables, comme le fait le gouvernement, « c’est de l’âgisme », dit M. Fortin. Il est d’avis que les aînés dont le système immunitaire est affaibli devraient porter le masque dans les lieux publics, mais pas ceux qui ont une bonne santé.

En attendant, le ministère de la Santé et des Services sociaux a pour sa part indiqué qu’il « analyse la situation ». « Nous sommes préoccupés par la circulation des virus respiratoires présentement. Rappelons que le port du masque est recommandé en présence de personnes vulnérables, comme les personnes âgées, les personnes immunodéprimées et celles qui ont des maladies chroniques, et dans les lieux publics lorsqu’il est difficile de conserver une distance avec les autres », a écrit Marjorie Larouche, porte-parole du ministère, dans un courriel.

— Avec Ariane Krol

Les hospitalisations en forte baisse

Le Québec enregistre une forte baisse des hospitalisations liées à la COVID-19, malgré un nombre de décès élevé. La province a rapporté lundi une baisse de 76 hospitalisations. Les 1686 personnes hospitalisées présentement représentent une diminution de 9 % sur une semaine. Du nombre, 574 patients ont été hospitalisés directement en raison de leur infection à la COVID-19, les autres ayant été admis pour une autre raison. Aux soins intensifs, les 38 patients représentent une baisse de 32 % sur une semaine. Le nombre de personnes hospitalisées devrait continuer de diminuer au cours des prochains jours, le nombre de sorties surpassant les admissions. On recense en moyenne 25 patients de moins chaque jour. Bien que le bilan dans les hôpitaux s’améliore, le nombre de décès demeure élevé. Les 12 décès rapportés durant la fin de semaine, dont deux nouveaux lundi, portent la moyenne quotidienne calculée sur sept jours à 11. La tendance est en hausse de 41 % sur une semaine.

— Pierre-André Normandin, La Presse

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