CHronique

La radio sans cloison

La radio vit l’une des plus belles périodes de son histoire. On assiste à une extraordinaire démocratisation de cette industrie. Enfin, on a accès à toutes les radios du monde en qualité supérieure. En 50 ans, on est passé du son grésillant des radios AM à un nombre incalculable de fréquences que les nouvelles technologies nous offrent à la carte.

Imaginez le plaisir pour l’amateur de radio en moi. Je zappe et je surfe sans arrêt, je découvre des stations rares et inusitées loin de chez nous, je me réserve des émissions pour une écoute ultérieure comme on garde les bonbons rouges pour la fin. La radio s’offre dans toute sa diversité, toutes ses couleurs. À nous d’en profiter.

J’avoue que j’ai du mal à comprendre ceux qui s’en remettent à une seule fréquence. Les amateurs de télé ne regardent pas une seule chaîne, ils choisissent les meilleures émissions sur l’ensemble des chaînes. Pourquoi n’en est-il pas de même avec la radio ?

Dans mon cas, les choix se font d’abord en fonction de mes attentes. Être informé ou diverti ? Telle est la question. Mais mes choix se font aussi en fonction de mes activités et de mes états d’âme. Certaines émissions doivent accompagner mon horaire du temps sinon l’esprit recherché lors de l’activité n’est pas le même.

Le matin, j’alterne entre Gravel (ICI Première) et Arcand (98,5). Les défauts de l’un me renvoient aux qualités de l’autre. En fin d’après-midi, Paul Houde et son équipe du 98,5 me comblent parfaitement. Avec eux, j’ai tout ce qu’il me faut. Je cuisine le samedi midi avec Michel Lacombe (Faut pas croire tout ce qu’on dit sur ICI Première) dont j’apprécie la mémoire et l’expérience (ça compte en info).

Évidemment, l’apéro du samedi et du dimanche se prend avec la bande de délinquants de La soirée est (encore) jeune. Mes idoles. Je dis l’apéro, je devrais dire les apéros. Voilà pourquoi, plus l’émission avance, plus on les trouve drôles. Futés, les garçons…

Les courses du samedi se font avec Radio PY de CKOI. J’ai besoin de la drive de Pierre-Yves Lord pour zigzaguer dans les rues de Montréal. Quand je veux savoir ce qui est dans l’air du temps en semaine, j’écoute Benoît Dutrizac ou Isabelle Maréchal au 98,5. Énergie est excellent pour se donner du courage à exécuter quelque chose qui fait partie de la catégorie « remets à demain ce qui t’écœure aujourd’hui ».

Mes dimanches commencent avec Franco Nuovo et sa bande sur ICI Première. Ils se prolongent avec Michel Desaultels, le prince de la radio publique à Montréal (ce gars-là n’a pas de défauts). Je demeure un infidèle-fidèle d’Espace Musique. J’aime d’eux qu’ils me surprennent, même avec une chanson pouet-pouet, genre Tel qu’il est de Fréhel.

Je ne suis pas un snob de la radio qui regarde avec dédain la radio privée. Il y a de bonnes et de mauvaises choses au privé, comme il y a des choses passionnantes et ennuyantes à la radio publique. 

Je ne lève pas le nez sur Julie Bélanger, Mitsou, Sébastien Benoit, Marie-Soleil Michon, Patrick Marsolais ou Jean-Philippe Dion, les vedettes de Rythme FM. J’ai parfois besoin de leur énergie positive.

J’aime me faire couper les cheveux au son de Rouge FM. Me semble que la pommade tient mieux. Mon marché se fait au son de Radio Classique. Un vrai retour du chalet s’effectue avec la reprise d’À la semaine prochaine, le dimanche, sur ICI Première.

Quand certaines émissions ne cadrent pas dans mes temps libres, je les écoute en balado ou sur le web. C’est ce que je fais avec Plus on est de fous, plus on lit (ICI Première) et certaines émissions de France Inter, Radio Bleu ou de la BBC. Je vis alors un grand moment d’intimité, car je les écoute en marchant.

Je me suis procuré le système Sonos il y a trois ans. Grâce à ce bidule, j’ai accès à des centaines de radios du monde entier. J’ai récemment découvert une formidable radio de jazz rétro de Palm Springs (Mod FM). Je l’écoute et j’ai chaud.

Bref, le saute-bouton que je suis n’est peut-être pas le meilleur auditeur pour les firmes de sondage et les directeurs de stations de radio, mais il l’est pour ceux qui font de la radio. 

Je fais des choix nombreux et éclectiques. Je suis un auditeur passionné et curieux. Je suis également intransigeant et sévère. Tout comme vous, je parle aux animateurs cons ou énervants.

On a pris connaissance jeudi dernier des résultats du plus récent sondage Numeris. Cela démontre que notre radio est en santé, qu’elle s’adapte bien aux changements, même si ceux-ci sont nombreux. C’est sûr que le web et les autres moyens de rendre accessibles les radios internationales vont créer une concurrence féroce pour les radiodiffuseurs. C’est pourquoi le contenu local et le lien avec les vedettes de l’antenne seront très importants. C’est le succès local des radios qui maintiendra les annonceurs en place. On verra ce que l’avenir nous réservera à cet effet.

Nous croyons assister à une révolution. Nous ne voyons que la pointe de l’iceberg. Les prochaines années seront excitantes pour la radio. Pourvu qu’on l’aime. Et qu’on cesse de la cloisonner.

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