Troubles anxieux

Un juste degré d’anxiété

Le niveau d’anxiété qu’on vit a un effet sur nos performances. Trop, c’est comme pas assez. Explications.

Illustration inspirée de la loi de Yerkes-Dodson, qui établit un lien entre la performance cognitive et le degré de stimulation.

Un juste degré d’anxiété

Optimal

« Être stressé ou anxieux avant un examen va faire en sorte que je vais mettre des choses en place : je vais étudier, me préparer à l’avance, demander de l’aide à mon professeur s’il y a des notions que je comprends mal. Ça, c’est de l’anxiété normale », dit Nathalie Couture, auteure d’Incroyable moi combat l’anxiété. Dans un cas comme celui-là, le fait d’appréhender un échec augmente la vigilance et suscite des actions constructives.

Un juste degré d’anxiété

Faible

L’anxiété est orientée vers le futur. Elle est marquée par l’anticipation et implique d’appréhender les conséquences de nos actes, rappelle Ariane Hébert dans Anxiété – La boîte à outils. L’incapacité à se projeter dans l’avenir peut faire qu’un enfant va négliger sa préparation à un examen, par exemple, puisqu’il ne songera pas à la possibilité d’un échec ni à son impact. Dans pareil cas, le niveau d’anxiété est trop faible pour provoquer une réaction qui pourrait être saine.

Un juste degré d’anxiété

Élevé

Étudier de manière compulsive des notions qu’on maîtrise déjà témoigne d’un niveau d’anxiété hors de la normale. « Ça devient un problème quand il y a une perte de qualité de vie, quand l’enfant se sent envahi par ces émotions-là », dit Ariane Hébert. Elle parle alors de « rupture de fonctionnement », situation où on peut par exemple observer des difficultés de sommeil ou l’incapacité à faire un devoir (ou un examen).

Troubles anxieux

De l’anxiété à l’optimisme

Avoir peur, s’inquiéter ou vivre de l’anxiété est normal. Sain, même. Sauf quand ça devient envahissant. Comment repérer l’anxiété malsaine ? Que faire pour ne pas la nourrir ?

UN RÉFLEXE NATUREL

Le mot lui-même a beau faire un peu peur, il y a des situations où il est naturel de vivre de l’anxiété. Comment reprocher à un enfant d’avoir mal au ventre à une semaine de la rentrée ? Même les enseignants ont parfois des papillons dans le ventre au moment de se présenter devant une vingtaine de nouvelles paires d’yeux. Si tout le monde traverse ce genre de moments de stress et d’inconfort, tout le monde n’y réagit pas de la même façon. L’anticipation peut facilement se transformer en appréhension : peur de la nouveauté, peur de perdre la face, peur de dormir chez un ami, peur de perdre ses parents, peur de rater un examen… Se projeter dans un avenir inconnu est, pour certains enfants, source d’anxiété.

PEURS NOCIVES

« L’adulte qui a peur de quelque chose se fait un film, voit l’événement catastrophique se produire et peut même ressentir les émotions qu’il ressentirait dans une telle situation. Ce n’est pas aussi clair pour les enfants. Leurs pensées sont un peu plus brouillées. Ils vont savoir qu’ils ont des peurs, avoir des espèces de flashs, mais ce n’est pas un film continu », explique Ariane Hébert, psychologue et auteure d’Anxiété – La boîte à outils. Comment savoir si le stress ou la peur de notre enfant sont normaux ou envahissants ? « C’est toujours une question de quantité, de fréquence et d’intensité », dit Nathalie Couture, elle aussi psychologue et auteure de guides destinés aux petits, dont Incroyable moi maîtrise son anxiété. Les deux spécialistes s’entendent pour dire que l’anxiété devient problématique si elle empêche l’enfant de participer à des activités (une fête d’amis, par exemple) ou nuit à son développement personnel, social ou scolaire.

PLUS ANXIEUX QU’AVANT ?

Aucune donnée scientifique ne permet de conclure qu’il y a plus d’enfants anxieux qu’avant. Ariane Hébert signale néanmoins que « la pensée commune » chez les penseurs et chercheurs intéressés par la question incite à croire que, oui, il y en a plus qu’avant, « en raison de notre rythme de vie ». Il se peut aussi que les parents d’aujourd’hui favorisent involontairement l’anxiété chez leurs petits… Leurs exigences et leurs attentes seraient « nettement plus élevées qu’autrefois », juge d’une part Ariane Hébert. Entre le programme international, les cours d’arts martiaux et l’apprentissage d’une troisième langue, les enfants subiraient plus de pression. Par ailleurs, les parents actuels étant aussi « très engagés » envers leurs enfants, ils seraient aussi « très peu tolérants à l’inconfort » vécu par leur progéniture.

PARENTALITÉ ANXIOGÈNE ?

« Un parent qui sent son enfant anxieux va s’activer beaucoup, raconte la psychologue. Souvent, on maintient l’enfant dans l’anxiété parce qu’en essayant de l’apaiser à tout prix, on lui évite d’être confronté à des situations anxiogènes, ce qui lui évite aussi d’apprendre des stratégies pour calmer son anxiété. Ces stratégies-là se vivent dans le malaise et, comme parent, on a du mal à tolérer ça. » Ariane Hébert dit ne blâmer personne, seulement poser un constat. Nathalie Couture, elle, juge d’abord qu’un parent qui essaie de comprendre les émotions de son enfant, « c’est toujours gagnant ». Puis, elle nuance : « Si on est présent dans la surprotection, peut-être que ça n’aidera pas. Si un parent ne laisse pas son enfant vivre ses propres expériences de peur qu’il arrive quelque chose, peut-être que l’enfant va se bâtir en étant incertain de ses capacités, dit-elle. Ça fait partie des facteurs de risque de développer de l’anxiété. »

GUIDER VERS L’OPTIMISME

Que faire ? Rassurer l’enfant, bien sûr. Valider son émotion. Ensuite ? « L’important, c’est de lui remettre [le problème] sur les épaules, lui demander : qu’est-ce que tu pourrais faire ? », suggère Ariane Hébert. Il est important selon elle que l’enfant comprenne que l’anxiété vient de l’intérieur. Dans son livre Incroyable moi maîtrise son anxiété, Nathalie Couture explique entre autres aux petits qu’ils ont en eux un « Petit Plus » et un « Petit Minus » et que, en gros, quand ils sont anxieux, c’est qu’ils écoutent plus « Petit Minus ». Ariane Hébert suggère par ailleurs de « créer un réflexe d’optimisme » chez l’enfant en l’incitant notamment à voir aussi le positif dans toute situation. Pourquoi ne pas demander à notre enfant qui vient soi-disant de passer une mauvaise journée à l’école, de la raconter de nouveau, mais en prenant le temps de se rappeler ce qui s’est bien passé, ce qui a été agréable ? Un truc tout simple qui pourrait aussi bénéficier à bien des adultes !

Incroyable moi maîtrise son anxiété

Nathalie Couture et Geneviève Marcotte

Éditions Midi Trente, 48 pages

Anxiété – La boîte à outils

Ariane Hébert

Éditions de Mortagne, 176 pages

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