Équipe de la NBA à Montréal

Le projet de 1 milliard de Michael Fortier

Le retour des Expos et des Nordiques passionne les amateurs de sport québécois. Mais un troisième projet, visant à amener une équipe de la NBA à Montréal, chemine plus discrètement depuis un an. Alors que la NBA présente son match hors concours annuel presque à guichets fermés ce soir au Centre Bell, l’ex-ministre et banquier Michael Fortier fait le point sur son projet de 1 milliard de dollars – qui intéresse déjà des investisseurs québécois à hauteur de plusieurs centaines de millions.

Fin janvier 2015 à New York. Un homme d’affaires québécois serre la main du commissaire. Pendant les prochaines minutes, il tentera de le convaincre des charmes économiques et sportifs de Montréal.

Cette scène ne se passe pas dans les bureaux du commissaire de la Ligue nationale de hockey, Gary Bettman. Ni dans ceux de Rob Manfred, le grand patron du baseball majeur. L’homme d’affaires montréalais Michael Fortier a plutôt l’attention d’Adam Silver, commissaire de la NBA.

Depuis un an, M. Fortier fait avancer discrètement son plus récent projet, qui ne manque pas d’ambition : obtenir une équipe de la NBA à Montréal. Déjà, au sein de Québec inc., deux investisseurs ont démontré un intérêt à investir chacun une centaine de millions si le projet se concrétise.

« J’ai eu des rencontres et fait des appels avec des investisseurs potentiels. Ce que j’essaie de faire, c’est de monter le projet pour que, le moment venu, on puisse avoir un montage financier et un groupe d’hommes d’affaires qui pourraient agir vite si l’occasion se présentait. Je pense que ça va prendre 1 milliard US [pour acquérir une équipe] », dit Michael Fortier en entrevue avec La Presse.

Cette idée à 1 milliard de dollars a commencé à germer dans la tête de l’ex-ministre fédéral, maintenant vice-président du conseil de RBC Marchés des capitaux, il y a environ un an, alors que les Raptors de Toronto ont attiré à nouveau 20 000 spectateurs au Centre Bell pour leur match hors concours annuel à Montréal.

Convaincu de la viabilité économique du projet, il a obtenu une rencontre avec le commissaire Adam Silver en janvier dernier en compagnie de Kevin Gilmore, vice-président exécutif et chef de l’exploitation du Canadien de Montréal.

« Il est clair que je lui ai ouvert les yeux [au commissaire Adam Silver] sur Montréal, sur l’intérêt et la profondeur du marché montréalais, dit Michael Fortier. Montréal est un gros marché. La NBA joue à guichets fermés presque à chaque match à Montréal ; les gens de la NBA réalisent qu’il y a un intérêt, que le basket est de plus en plus populaire au Canada. »

PAS D'EXPANSION EN VUE

La NBA a été intriguée, mais elle a aussi été franche avec M. Fortier. « La ligue a été très claire : elle n’a pas de plan d’expansion », dit-il.

Plan d’expansion ou pas, il a continué ses démarches. Il a multiplié les appels et sollicité des rencontres, en plus de ses fonctions chez RBC Marchés des capitaux. Il a parlé à plusieurs occasions à M. Silver depuis leur rencontre à New York en janvier. Les deux hommes doivent d’ailleurs se rencontrer à nouveau au cours des prochains mois. Bref, le dialogue informel se poursuit.

En même temps, Michael Fortier tente de trouver des investisseurs prêts à injecter environ 1 milliard US dans ce projet. Un milliard, soit autant que la valeur du Canadien de Montréal selon Forbes ? En juin dernier, les Hawks d’Atlanta ont été vendus pour 850 millions US (la transaction incluait aussi l’amphithéâtre).

Difficile de trouver 1 milliard de dollars américains au Canada pour une équipe de la NBA. C’est pourquoi il faudra probablement des investisseurs étrangers au sein d’un éventuel consortium, croit le banquier montréalais, qui rencontrera justement bientôt « un groupe américain très important, avec des poches profondes et intrigué par la possibilité d’avoir une équipe de la NBA ».

Si la NBA voulait tenter une expansion, peu de villes américaines pourraient accueillir une équipe. La candidate la plus sérieuse, Seattle, n’a pas d’amphithéâtre pour l’instant.

« Cela dit, si le projet se concrétise, c’est très important d’avoir des actionnaires locaux dans le groupe, continue M. Fortier. Et ça, je l’ai. » Ainsi, deux investisseurs québécois se disent chacun prêt à acquérir 10 % d’une équipe de la NBA à Montréal – ce qui assure au moins 200 millions de la part d’actionnaires québécois pour l’instant.

LOCATAIRE DU CENTRE BELL

Le Groupe CH n’est pas prêt à investir dans une équipe de la NBA à Montréal, comme l’entreprise le précisait en mars dernier au chroniqueur Réjean Tremblay du Journal de Montréal.

Si le projet de M. Fortier se concrétise, l’équipe de la NBA serait toutefois locataire du Centre Bell, propriété du Groupe CH. Kevin Gilmore, vice-président exécutif du Canadien, a fait profiter Michael Fortier de ses contacts dans les hautes sphères de la NBA, lui qui a longtemps travaillé pour la multinationale AEG, un actionnaire des Lakers de Los Angeles.

M. Fortier a aussi établi des contacts avec MLSE, le conglomérat qui possède notamment les Raptors de Toronto. « J’ai parlé à Larry Tanenbaum [président du C.A. et actionnaire minoritaire de MLSE] et il m’a assuré qu’il ne serait pas un obstacle, dit-il. Le jour venu, si ce jour vient, il serait favorable au projet dans la mesure où toutes les conditions sont remplies. »

« Le Canada est important pour la NBA, et le pays pourrait facilement accueillir deux équipes. »

— Michael Fortier

Michael Fortier, qui sera aux premières loges pour regarder le match hors concours de ce soir entre les Raptors et les Wizards de Washington, est bien conscient que son projet ne sera pas évident à concrétiser. La patience sera de mise.

« La NBA n’a pas de projet d’expansion, elle n’a même pas de comité qui étudie une expansion », dit-il.

Mais ce banquier, qui connaît bien le monde du sport pour avoir notamment négocié les deux dernières ententes du Grand Prix du Canada avec Bernie Ecclestone, sait aussi qu’il a plusieurs cartes intéressantes dans son jeu, dont un marché de 3,5 millions de personnes qui remplit le Centre Bell pour un match hors concours et un amphithéâtre prêt à accueillir une équipe. La prochaine étape : trouver suffisamment d’investisseurs.

« J’ai un édifice, donc je me concentre sur le plan financier, dit-il. Mon objectif pour 2016 est de dire [à la NBA] que j’ai accès à pas loin de 1 milliard de dollars pour une équipe. »

Tour d'horizon

Le basketball professionnel à Montréal

Quelques équipes professionnelles de basketball ont tenté de s’implanter à Montréal au sein de circuits mineurs. Mais chaque fois, l’expérience s’est avérée un fiasco. Voici un tour d’horizon des différents clubs à avoir tenté leur chance dans la métropole.

DRAGONS

La première équipe professionnelle de basketball de Montréal, les Dragons, a fait son apparition en 1993 dans la National Basketball League et disputait ses matchs locaux à l’auditorium de Verdun. L’aventure a toutefois été de très courte durée. Des difficultés financières ont forcé le club à cesser ses activités avant la fin de sa première saison. La ligue a elle-même connu un sort similaire l’année suivante.

MATRIX

Il faudra attendre plus d’une décennie avant de revoir une équipe de basketball montréalaise évoluant dans les rangs professionnels. En l’occurrence, le Matrix de Montréal, qui s’est joint à l’American Basketball Association en 2005. Rebaptisée « Royal de Montréal » pour la saison 2007-2008, l’équipe a repris son nom original la saison suivante, avant de disparaître pour de bon.

SASQUATCH

Peu de temps après l’échec du Matrix, une autre équipe de basketball est arrivée dans la métropole. Cette fois, il s’agit du Sasquatch de Montréal, qui s’est joint à la Premier Basketball League pour la saison 2008-2009. L’organisation a cependant été dissoute quand on a appris que les joueurs n’étaient pas payés. Un nouveau propriétaire a fait renaître l’équipe de ses cendres un peu plus tard, de sorte qu’elle a pu terminer la saison de peine et de misère avant d'être retirée de la ligue.

JAZZ

Le basketball professionnel est revenu à Montréal en 2012 dans l’uniforme du Jazz, équipe de la Ligue nationale de basketball du Canada. Elle a remplacé les Kebs de Laval, qui venaient de déclarer faillite. Mais comme ce fut le cas pour tous ses prédécesseurs, l’aventure fut des plus brèves. La ligue a décidé de suspendre les activités du Jazz après une saison, après que le club eut été incapable de se trouver de nouveaux propriétaires. L’équipe a conclu sa seule campagne avec une fiche de 2 victoires et 38 défaites.

MATCHS HORS CONCOURS DE LA NBA

À défaut d’avoir une équipe issue de la ville, Montréal accueille depuis quelques années des matchs hors concours de la NBA impliquant les Raptors de Toronto. D’ailleurs, ceux-ci se mesureront aux Wizards de Washington ce soir, au Centre Bell. L’affrontement s’inscrit dans le cadre de la NBA Canada Series, qui présente également des matchs préparatoires à Ottawa, Winnipeg et Vancouver.

— Jean-Philippe Arcand, La Presse

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