Opinion

La métropole a besoin du REM

Alors que débutent les travaux du Réseau express métropolitain (REM), cet immense projet de transport en commun continue d’alimenter l’actualité et la polémique. Les opposants jouent leurs cartes en marge de la campagne électorale. Dans la cacophonie des débats politiques et des scoops sur les détails des différentes ententes, il nous apparaît essentiel de revenir sur quelques éléments fondamentaux du projet.

La construction du nouveau pont Champlain constitue la bougie d’allumage du REM. L’infrastructure prévoit en effet un corridor réservé au transport en commun, une opportunité à exploiter. En 2015, à la surprise générale, le gouvernement confie à la Caisse de dépôt et placement (CDPQ) le mandat de proposer un lien de transport collectif sur le pont Champlain, dans le cadre d’un PPP nouveau genre. Le mandat inclut également un éventuel train de l’Ouest.

En novembre 2016, la CDPQ soumet un scénario que peu avaient vu venir. Elle imagine de joindre les deux projets de manière audacieuse. Le grand réseau intégré qu’elle propose va de Brossard jusque dans le nord-ouest de l’agglomération, avec des branches vers Deux-Montagnes, vers l’aéroport et le long de l’A40, en passant par le tunnel du mont Royal.

En soi, il s’agit d’une petite révolution : le projet permettrait dorénavant, depuis Deux-Montagnes, de se rendre directement sur la Rive-Sud, en plus de régler la sempiternelle question de la liaison aéroportuaire. Ce projet était-il pour autant suffisamment intéressant pour y consacrer collectivement des milliards de dollars ? Malgré des avantages indéniables, à ce moment-là, la réponse était non. Avec la gare Centrale pour seul point de desserte du centre-ville, donc une correspondance unique avec le métro, le projet demeurait ni plus ni moins qu’un super train de banlieue, tentant, mais insuffisant.

Projet structurant

Le REM est devenu un projet de transport en commun vraiment structurant lors de la confirmation que les stations McGill (ligne verte) et Édouard-Montpetit (ligne bleue), plus une station au sud du centre-ville, seraient construites dès la phase initiale. 

C’est cet ajout qui a fait passer le projet de super train de banlieue trop cher à nouvelle ligne de métro intégrée au réseau.

Pour mesurer la force de cette proposition, il faut comprendre l’ampleur des opportunités nouvelles pour les usagers qui profiteront d’une liberté de déplacement significativement rehaussée. D’un seul coup, l’accès au centre-ville s’élargit pour les citoyens de la Rive-Sud et de l’Ouest-de-l’Île. Le secteur de l’Université de Montréal est désenclavé et la ligne bleue gagne, à côté de la surchargée ligne orange, un nouveau lien direct vers le centre-ville. Le tout, à une fréquence minimale de 15 minutes, toute la journée ! Même les usagers du train de l’Est, qui auront dorénavant à faire une correspondance, auront davantage d’options.

Les détracteurs du REM insistent sur les ressources financières qu’il canalisera et qui ne pourront soutenir d’autres projets. La rigueur budgétaire est certes nécessaire, mais nous croyons qu’il est temps, en matière de transport en commun, de cesser de faire du surplace en attendant le plan parfait.

S’il fallait réduire l’ampleur du projet de REM pour dégager une marge de manœuvre financière, c’est du côté de la branche Sainte-Anne-de-Bellevue qu’il faudrait regarder. 

Elle a en effet le rapport coût-bénéfice le moins intéressant, ne figure pas au Plan métropolitain d’aménagement et de développement et est la plus susceptible d’induire un étalement urbain, en raison de ses grands stationnements incitatifs. La remise en question de cette branche ne disqualifie cependant pas l’ensemble du projet.

Le transport collectif a fini d’être le parent pauvre de nos infrastructures. Il faut monter la barre et multiplier les projets au lieu de les opposer. Investir en transport collectif à la même hauteur que l’Ontario pour la prochaine décennie, soit 5600 $ par habitant – cinq fois plus que le Québec – , permettrait de réaliser non seulement le REM et le prolongement de la ligne bleue, mais aussi plusieurs lignes de tramway et autres projets structurants.

Il est temps de réapprendre à saisir les « fenêtres d’opportunité » politiques et financières afin de faire avancer la mobilité durable et les grands projets. Le REM, projet à la fois pour le centre-ville et métropolitain, dont les nombreuses connexions au réseau existant multiplient les opportunités de déplacement, en est une. Le Québec, la métropole et son cœur ont indéniablement besoin du REM.

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