Cyclisme

« Je suis vraiment un cycliste maintenant »

Ils seront 18 Canadiens, sur 146 coureurs, à prendre le départ du 10e Grand Prix cycliste de Québec, aujourd’hui. Michael Woods, qui a connu la consécration au pays après sa première participation au Tour de France, fait partie du lot.

Québec — Le jeune Nicolas Zukowsky étant retenu par ses travaux scolaires, ils étaient 17 cyclistes canadiens à assister à une rencontre médiatique informelle. Avec la trentaine de journalistes, caméramans et photographes présents, ça faisait beaucoup de monde dans le petit lounge aménagé par l’organisation du Grand Prix de Québec, à la veille de l’épreuve présentée aujourd’hui.

Hugo Houle s’est amusé à dérider ses collègues pour mettre un peu de vie dans la photo de famille. Son baptême réussi au dernier Tour de France n’a fait que renforcer le respect qu’imposait déjà l’athlète de Sainte-Perpétue à ses pairs.

Sans être le coureur protégé de son équipe Astana (ce rôle échoira sans doute à Magnus Cort Neilsen et Davide Ballerini), il aura l’occasion de jouer sa propre carte dans le Vieux-Québec, contrairement à l’an dernier, où il avait dû se sacrifier assez tôt dans la course.

« J’ai travaillé fort, je suis en forme, je veux leur faire plaisir, je veux me faire plaisir », a indiqué Houle en songeant aux encouragements qu’il s’attend à recevoir. « J’ai essayé de garder la forme du Tour de France le plus longtemps possible, je n’ai pas fait d’excès, je devrais être en bonne forme et j’espère que ça va répondre [aujourd’hui] et dimanche. »

Son but ? « Être en mesure d’être avec les meilleurs au dernier tour sur Grande Allée, d’être présent dans le sprint final. On verra ce que ça donne, il y a des gars qui sont très rapides, comme Sagan, Alaphilippe, Thomas, des gars qui ont eu le maillot jaune au Tour de France, qui visent le Championnat du monde dans deux semaines. »

« Le Tour m’a fait passer à un autre niveau »

Michael Woods fait partie de ceux-là. À la même date l’an dernier, le coureur d’Ottawa remportait la 17e étape de la Vuelta, révélant du même souffle qu’il avait été inspiré par Hunter, son fils mort-né après 37 semaines de grossesse.

Trois semaines plus tard, il gagnait la médaille de bronze à la course sur route du Mondial d’Innsbruck, deuxième Canadien à réussir l’exploit après Steve Bauer en 1984.

Pourtant, à l’image de Houle, le membre d’EF Education First a dû attendre sa première participation au Tour de France, où il s’est distingué dans les Alpes en juillet malgré deux côtes fracturées, pour recevoir la consécration au pays.

« Le Tour m’a fait passer à un autre niveau, a-t-il constaté. Je suis vraiment un cycliste maintenant. »

« Avant le Tour, je n’étais pas vraiment connu. Mais maintenant, je vais à l’épicerie et des gens me reconnaissent. C’est vraiment fou et spécial. Je suis très chanceux de vivre ça. »

— Michael Woods

Son passé de coureur à pied étoile (il a franchi le mile en moins de quatre minutes à 18 ans) en a fait un sujet d’intérêt dans les grands médias. Forbes, le New York Times, Business Insider lui ont consacré des articles. Il est passé à NBC et BBC.

Et comme Woods aime beaucoup parler, en français comme en anglais, son entraîneur Paulo Saldanha a dû mettre un frein à la valse des entrevues la semaine dernière. Il avait un bloc d’entraînement « très, très, très dur » à lui soumettre dans la région de Sutton et souhaitait que son protégé préserve ses énergies au maximum.

L’idée était de l’affûter pour Québec et surtout Montréal, où Woods aura plus de visées, mais avant tout pour le Mondial du Yorkshire (29 septembre) et le Tour de Lombardie, qu’il rêve d’accrocher à son palmarès. « Ce camp est aussi une préparation en vue des Jeux olympiques l’année prochaine », a fait savoir Saldanha.

Woods a déjà acheté son billet pour Tokyo, avec départ de Paris le 19 juillet, date d’arrivée du prochain Tour. « C’est le seul vol en soirée pour Tokyo à partir de Paris ce jour-là », a-t-il expliqué.

« Hunter m’inspire chaque jour »

Avec sa femme Elly, il rêve d’avoir un autre enfant. Avec le recul, il sent que le drame vécu l’an dernier a fait de lui un meilleur athlète.

« Hunter m’inspire chaque jour. Il m’a donné une perspective unique. Maintenant, ma femme et moi, on sait qu’on est vraiment chanceux de faire ce qu’on fait. […] Il m’a donné un peu de liberté dans les courses. J’ai le sentiment que ce n’est pas la chose la plus importante dans ma vie. Ma famille est la chose la plus importante. J’ai de bons amis, une bonne famille. À cause de ça, je ne sens pas la même pression que plusieurs autres coureurs, à mon avis. »

Une belle leçon à transmettre à ces jeunes coéquipiers comme Zukowsky, Charles-Étienne Chrétien ou Laurent Gervais, qui aspirent à suivre ses traces.

CARTE POSTALE

J’ai roulé avec Peter Sagan

Je devais rouler à 30 km/h sur la promenade Samuel-De Champlain, cette piste cyclable qui longe le fleuve, quand j’ai senti une petite brise sur mon épaule gauche. Une fraction de seconde plus tard, les sept membres de l’équipe UAE Emirates passaient à côté. L’Italien Diego Ulissi, gagnant à Montréal en 2017, l’ex-champion mondial Rui Costa, l’Irlandais Dan Martin, un vainqueur de Liège-Bastogne-Liège reconnaissable à son dos arrondi…

J’ai pris leur roue jusqu’au bout de la piste, qui finit brusquement quelques kilomètres plus loin, à l’ombre du pont de Québec. Ils ont sorti leur téléphone pour prendre quelques photos avant de s’arrêter pour pisser.

J’ai fait demi-tour pour remonter sur la piste cyclable dans Sillery, direction chemin Saint-Louis. Voilà que l’Allemand Marcus Burghardt arrive à ma hauteur, fait un signe de tête, annonçant le passage de ses coéquipiers de Bora-Hansgrohe. Dans sa roue, Peter Sagan et son fidèle comparse Daniel Oss, l’homme à la queue de cheval. On dira ce qu’on voudra, ça fait son effet.

Deux cyclos locaux suivaient derrière. Je me suis joint à eux jusqu’au bas de la côte de Cap-Rouge, où l’Australien Jay McCarthy a crevé. Le temps que la voiture d’équipe le dépanne, les gars ont décidé d’interrompre la sortie pour un café sur la terrasse de Chez Victor, rue Saint-Félix. Le moment était venu de rentrer, après un crochet par Lévis.

Sport sympathique, quand même, où ses principaux protagonistes s’accommodent de la présence de quidams à leurs côtés la veille de la course. Comme si Jonathan Drouin venait s’échauffer à l’aréna du coin avant un match contre les Bruins.

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