Biggie en concert virtuel

L’ère des avatars ne fait que commencer et l’industrie du spectacle s’ouvre aux mondes virtuels : après Travis Scott dans Fortnite, voici que Notorious B.I.G. ressuscitera dans Horizon Worlds de Meta pour un concert exclusif auquel participera aussi Sean « Diddy » Combs. Biggie, mort il y a 25 ans, sera le point d’ancrage de cet évènement campé dans le Brooklyn des années 1990, rebaptisé The Brook, précise le magazine Variety. L’avatar du rappeur né Christopher Wallace interprétera ses chansons les plus marquantes et racontera sa vie. L’évènement virtuel The Notorious B.I.G. – Sky’s the Limit aura lieu le 16 décembre à 21 h, heure de l’Est. En plus des évènements dans des mondes virtuels, les concerts « virtuels » sont en vogue depuis quelques années avec l’amélioration des techniques de projections pouvant donner l’illusion du 3D. En plus de l’icône virtuelle japonaise Hatsune Miku, on a pu voir Tupac à Coachella, Roy Orbison en tournée et ABBA en concert.

— Alexandre Vigneault, La Presse

Salon du livre des Premières Nations

Le cheerleader des littératures autochtones

« Force est de constater que les littératures autochtones, maintenant, sont partout », se réjouit l’écrivain wendat Louis-Karl Picard-Sioui. Ce qui ne signifie pas du tout que le Salon du livre des Premières Nations, dont la 11e édition se déroule jusqu’à dimanche, n’a plus sa raison d’être. État des lieux avec un directeur général qui aimerait bien que les porte-parole médiatiques se multiplient parmi les siens.

Il y a 11 ans ? « Ça n’intéressait pas encore grand monde, les littératures autochtones », résume Louis-Karl Picard-Sioui, qui a publié son premier livre, Yawendara et la forêt des Têtes-Coupées, en 2005, et qui a cofondé en 2015 Kwahiatonhk !, un organisme qui travaille à trouver et à créer des tribunes dignes de leur richesse aux textes des Premiers Peuples.

À la tête du Salon du livre des Premières Nations depuis la même année, celui qui se définit comme un « cheerleader des littératures autochtones » se souvient qu’encore récemment, il ne s’agissait pas de souffler dans les ailes de ses camarades, mais carrément de défendre l’existence de cette littérature. « Il y a 11 ans, les festivals, les salons, les revues n’invitaient pas d’auteurs autochtones. »

Mais en 2022 ? « On est dans un monde différent », insiste-t-il. Un monde dans lequel les romans de l’Innu Michel Jean sont installés à demeure au sommet des palmarès de vente, où Maya Cousineau Mollen devenait mercredi la première autrice innue à remporter un Prix du Gouverneur général pour un livre de poésie de langue française (Enfants du lichen) et où Joséphine Bacon est désormais considérée avec les mêmes pieux égards qu’un Gilles Vigneault.

Le problème ? « Le problème, c’est qu’il y a tellement de demandes que certains auteurs sont épuisés », lance celui qui confie, en riant, recevoir beaucoup d’invitations adressées à Michel Jean ou à Natasha Kanapé Fontaine, même s’il n’est pas leur agent. « C’est comme si leurs boîtes courriel débordaient dans la mienne. »

« La demande pour des activités de médiation, de création avec des auteurs autochtones grandit exponentiellement et l’offre n’a pas entièrement suivi. »

— Louis-Karl Picard-Sioui, directeur général du Salon du livre des Premières Nations

« Je ne sais pas comment Michel, Joséphine ou Natasha font pour gérer la demande, poursuit-il plus sérieusement. Et j’ai un énorme respect pour eux, parce qu’ils renvoient toujours la lumière vers les autres. Mais le star-système étant ce qu’il est, on met souvent les mêmes gens en valeur. C’est pour ça que, ne serait-ce que pour les épargner un peu, il faut générer de nouveaux auteurs et en faire connaître d’autres. »

Se donner des permissions

D’où l’importance d’un évènement du genre du Salon du livre des Premières Nations, pense M. Picard-Sioui, qui souhaite mettre en lumière auprès d’un lectorat encore plus vaste des autrices comme Isabelle Picard, dont la série de romans jeunesse Nish (Les Malins) jouit déjà d’un indéniable succès, ou J. D. Kurtness, qui renouait un peu plus tôt cette année avec le genre de la dystopie écologique dans Bienvenue, Alyson (Hannenorak).

« La bonne nouvelle, c’est que les auteurs se donnent de plus en plus la permission de développer des voix personnelles. Moins une littérature est diversifiée, plus c’est difficile pour le public d’y trouver son compte, mais aujourd’hui, si tu disais “Je n’aime pas la littérature autochtone”, ce serait aussi fou que de dire “Je n’aime pas le cinéma”. »

— Louis-Karl Picard-Sioui

Louis-Karl Picard-Sioui incarne lui-même magnifiquement cette multiplication des types de voix que font résonner les littératures autochtones avec Éveil à Kitchike : la saignée des possibles, son récent roman par nouvelles d’une merveilleuse drôlerie, la suite de Chroniques de Kitchike : la grande débarque. Au cœur d’une communauté inventée, mais pas si fictive que ça, Kitchike l’écrivain explore sur le mode de la satire des archétypes propres aux réserves, tout en les déconstruisant, et observe des gens tenter, plus ou moins gracieusement, de s’arracher à un horizon bouché.

« Chez les Premières Nations, peu importe la communauté, l’humour relève de l’instinct de survie, souligne le romancier. Même quand la réalité est noire, il te reste toujours l’humour, qui peut accomplir une sorte de guérison. Les gens des Premières Nations adorent rire, rient pour tout et pour rien, mais jusqu’à maintenant, dans nos écrits, ça s’incarne assez peu. »

L’auteur de ces lignes, pas autochtone du tout, manquerait-il de sensibilité s’il disait avoir reconnu dans Kitchike des traits – commérage, tirage de couverture, increvable solidarité – de la petite ville dans laquelle il a grandi ?

« Non, pas du tout ! L’histoire a une teneur autochtone que tous mes lecteurs n’ont pas vécue, mais il y a dans cette logique de guerre de clocher quelque chose d’universel. Et c’est à partir du moment où on admet que chaque peuple a quelque chose à apporter à notre humanité commune que les liens entre nous tous deviennent possibles. C’est à partir de ce moment-là qu’on peut apprécier les trésors de l’humanité, partout où ils se trouvent. »

Salon du livre des Premières Nations, jusqu’au 20 novembre à Québec

Ce texte provenant de La Presse+ est une copie en format web. Consultez-le gratuitement en version interactive dans l’application La Presse+.