Universités

Un effet COVID sur la diplomation

On s’en doutait, mais voilà que les premiers chiffres confirment que la pandémie a eu un impact non négligeable sur la diplomation universitaire, notamment sur les campus de Montréal.

Au printemps 2020, la diplomation des étudiants du bac a reculé dans 9 des 15 universités du Québec par rapport à la moyenne des quatre années précédentes. L’impact n’est pas alarmant, comme vous le verrez, mais il faut savoir que ce sont les tout premiers effets de la pandémie, le Grand Confinement ayant été imposé en mars 2020, soit deux mois avant la fin de la session d’hiver.

Les données du ministère de l’Enseignement supérieur (MES) sont les plus récentes disponibles, et il faudra attendre pour bien connaître l’impact en 2021 et en 2022. Les données permettent par ailleurs de savoir quelle proportion d’étudiants obtiennent ultimement leur baccalauréat et quelles universités ont les meilleurs taux de diplomation. J’y reviendrai.

À la fin du trimestre d’hiver 2020, donc, le taux de diplomation après quatre ans des 46 577 étudiants de la cohorte de 2016 a été de 60,9 %. Ce taux est 1,4 point de pourcentage sous la moyenne des quatre années précédentes. Surtout, 9 des 15 universités ont vu leur taux diminuer.

Les campus de Montréal semblent avoir été les plus touchés. Polytechnique Montréal et l’École de technologie supérieure – qui forment toutes deux des ingénieurs – ont vu leurs taux de diplomation chuter de 4,7 et 5,6 points de pourcentage par rapport aux quatre années précédentes.

Leurs taux de diplomation après quatre ans d’étude – le minimum possible – sont respectivement de 25,3 % et 33,1 %, selon les chiffres du MES. À l’Université de Montréal, le taux est en baisse de 2,5 points et à l’Université du Québec à Montréal (UQAM), de 3,2 points. Les deux sont à 60,3 % de diplomation après quatre ans.

Difficile d’affirmer que cette baisse est attribuable au seul effet de la COVID-19, puisque la diplomation après quatre ans a généralement baissé ces dernières années, selon les chiffres du MES. Toutefois, dans septuniversités, l’année 2020 a été un creux pour la diplomation depuis au moins 2013, soit sept ans.

L’effet COVID est aussi observable quand on mesure en 2020 le taux de diplomation de la cohorte de 2014, donc six ans après l’admission. Ce taux, par ailleurs, donne une meilleure idée du taux final de diplomation de cette cohorte.

Ainsi, pour la cohorte de 2014, le taux de diplomation était de 79,1 % au printemps 2020. Il s’agit d’un recul de 1,0 point de pourcentage par rapport aux cohortes des 4 années précédentes.

« On a effectivement vu des étudiants qui ont abandonné leur trimestre au printemps 2020 », me dit Pierre Baptiste, directeur des affaires académiques par intérim de Polytechnique.

Selon lui, il y aura un rééquilibrage au cours des prochaines années, puisqu’il s’agit de cours reportés, essentiellement. « Je ne pense pas qu’on perde des diplômés au bout du compte », dit-il.

Selon le MES, le taux de diplomation après six ans à la Poly était de 76,7 % en 2020, contre une moyenne de 78,2 % pour les cohortes des quatre années précédentes.

HEC au sommet

Au Québec, c’est HEC Montréal qui a le plus fort taux de diplomation, qui atteint 92,5 % en 2020 pour la cohorte de 2014, donc six ans après l’admission. L’Université McGill suit à 89,1 %. Les deux étaient aussi en tête lors des quatre années précédentes.

À l’autre bout du spectre, on trouve l’UQAM, avec un taux de 72,6 % en 2020 (après six ans). L’Université de Montréal est à 76,7 %, sous la moyenne québécoise de 79,1 %.

Selon la porte-parole de l’UQAM, Jennifer Desrochers, la pandémie a pu affecter davantage les étudiants de l’UQAM, souvent plus âgés, de première génération ou avec des défis d’apprentissage, dit-elle.

Concernant le taux de diplomation plus faible à l’UQAM qu’ailleurs, Mme Desrochers fait valoir que l’UQAM compte une proportion plus élevée d’étudiants de 25 ans ou plus, au profil non traditionnel. Ces étudiants, admis souvent sur la base de leur expérience, « n’auraient pas poursuivi ni terminé leur cheminement universitaire sans l’UQAM », avance-t-elle.

Autre explication : l’absence à l’UQAM de programmes de génie, de médecine, de pharmacie et autres programmes de ce type en santé qui font monter la diplomation ailleurs.

Réponse semblable à cet égard à l’Université de Montréal, dont le taux de diplomation selon les données du MES exclut les écoles affiliées (HEC et Poly). En les incluant, le taux passerait de 76,6 % à 78,4 %, proche de celui de l’Université Laval (78,9 %), dont les programmes englobent l’administration et le génie.

Par ailleurs, l’Université de Montréal conteste la méthodologie du Ministère, en lien avec le système de gestion des effectifs universitaires (GDEU).

« Tous les établissements ne déclarent pas les données de la même façon, ce qui rend périlleuse la comparaison. Par exemple, nous avons effectué un changement de notre système informatique académique en 2013 […] qui explique une bonne partie de la hausse observée entre 2012 et 2013 », m’écrit la porte-parole Geneviève O’Meara.

À l’Université de Montréal, « la COVID n’est pas une hypothèse retenue pour expliquer [la baisse] des taux ».

Cela dit, ai-je pu constater, la moyenne sur cinq ans de l’UdeM et de ses écoles affiliées est de 80,6 %, selon les données du MES, ce qui la place au troisième rang derrière l’Université de Sherbrooke (82,7 %) et McGill (88,7 %), si l’on exclut HEC Montréal. Un effet méthodologique ?

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