Une Vague de chaleur « hallucinante » frappe l’état
Sacramento — Les incendies de forêt font rage aux deux extrémités de la Californie. Gavin Newsom, le gouverneur de l’État, a mis en garde contre une chaleur « sans précédent ». Les trains de San Francisco ont réduit leur vitesse par crainte que les rails déformés par la chaleur n’entraînent des déraillements.
Alors que la Californie vivait son sixième jour sous un dôme de chaleur féroce mardi, des records de température ont été battus et les responsables du réseau électrique ont supplié les propriétaires de réduire leur climatisation, l’État ayant battu son propre record de consommation d’électricité. À Sacramento, où l’on s’attendait à ce que la température atteigne les 46 °C, les entraînements de football ont été annulés et les souffleuses à feuilles se sont tues alors que les jardiniers ont cessé de travailler à midi.
« Je suis ici depuis 30 ans et je ne me souviens pas qu’il ait fait aussi chaud pendant autant de jours d’affilée », a déclaré Jeff Williamson, 53 ans, un entrepreneur de toitures commerciales, qui se tenait à l’extérieur d’un café de Sacramento alors qu’un soleil aveuglant poussait l’air matinal vers les 32 °C avant le petit-déjeuner. Le ciel était si bleu que l’atmosphère même semblait dépourvue d’une couche.
« Vous pouvez le goûter. Les gens disent que c’est une chaleur sèche. Eh bien, c’est comme une flamme ouverte. »
— Jeff Williamson, entrepreneur
Après un week-end de fête du Travail caniculaire qui a alimenté des incendies de forêt mortels et des averses effrayantes dans le désert, les températures ont encore grimpé mardi, mettant l’État le plus peuplé du pays à risque de pannes liées à la chaleur pour la première fois en deux ans. Environ 42 millions d’Américains étaient sous le coup d’une alerte à la chaleur excessive, y compris dans certaines parties du Nevada et de l’Arizona, et un avertissement de risque d’incendie couvrait le nord-ouest du Pacifique, le Montana et l’Idaho.
En Californie, des températures dépassant les 47 °C étaient prévues dans la vallée Centrale. À Sacramento, les records de températures ont été battus, avec plus de 45 °C. Avec un mercure d’au moins 47 °C, la ville d’Ukiah a également battu son record pour une journée.
Les responsables du réseau électrique ont plaidé en faveur de la conservation de l’énergie, avertissant que l’État pourrait manquer d’électricité pour combler les besoins partout.
En milieu d’après-midi mardi, l’État a battu un record de 16 ans pour la consommation d’énergie.
M. Newsom a prévenu mardi que « le risque de pannes est réel » et que la vague de chaleur était « en passe de devenir la plus chaude et la plus longue jamais enregistrée ».
Daniel L. Swain, climatologue à l’Université de Californie à Los Angeles (UCLA), a indiqué que la chaleur qui s’était installée sur une grande partie de l’Ouest avait été « extraordinaire sur presque tous les aspects, sauf l’humidité ».
Le danger, a-t-il ajouté, ne résidait pas seulement dans cette chaleur exceptionnelle, mais aussi dans sa durée « hallucinante ». « Sacramento a rarement vu des températures de plus de 43 °C pendant trois, quatre jours d’affilée », a-t-il déclaré.
L’impact cumulé, selon M. Swain, a non seulement surchauffé les masses d’air pendant la journée, mais a également rendu les nuits plus chaudes, aggravant la sécheresse, transformant les arbres et les broussailles en amadou et intensifiant les risques d’incendie.
« Cela fait près d’une semaine maintenant que, dans une grande partie de l’État, les températures, même la nuit, ne descendent pas en dessous de 30 °C. Que pensez-vous que cela fait à la végétation ? Rien de bon. »
— Daniel L. Swain, climatologue à l’Université de Californie à Los Angeles
Après avoir subi des incendies calamiteux ces dernières années, les habitants de la Californie se préparent désormais chaque été et chaque automne à des semaines de brasiers et de cieux enfumés. Mais cette année, la saison des incendies a été, à bien des égards, moins intense. L’année dernière, d’énormes incendies ont brûlé plus de 1 million d’hectares en Californie ; en 2022, plus de 97 000 hectares ont déjà brûlés.
Pourtant, les semaines à venir représentent généralement le pire de la saison des incendies.
Plus d’une douzaine de grands incendies faisaient rage mardi dans tout l’État, et 45 nouveaux brasiers ont éclaté au cours de la seule journée de dimanche, selon le département californien des Forêts et de la Protection contre les incendies.
Mardi après-midi, l’incendie de Fairview, près de Hemet, s’était étendu sur 1600 hectares, tuant deux personnes qui semblaient avoir tenté de s’échapper, détruisant au moins sept structures et entraînant des évacuations. Le Hemet Unified School District a fermé les écoles mardi pour ses 24 000 élèves.
Ces décès s’ajoutent aux deux survenus ce week-end dans l’incendie Mill, qui s’est déclaré vendredi près d’une ancienne scierie dans la ville de Weed, près de la frontière de l’Oregon. Il était contenu à 55 % mardi après avoir consumé près de 1700 hectares et détruit au moins 100 maisons, selon les autorités locales, y compris dans le quartier de Lincoln Heights à Weed, une communauté historiquement noire fondée par des ouvriers de scierie dans les années 1920.
Quelques kilomètres à l’ouest, l’incendie de Mountain, dans le comté de Siskiyou, s’est étendu sur plus de 4400 hectares, une masse de terrain à peu près équivalente à la taille de la ville de Berkeley. Ravageant les canyons escarpés où pousse une végétation sèche, il n’a été maîtrisé qu’à 20 %, selon les services des incendies de l’État.
Dans certaines parties du comté de Los Angeles, l’interdiction d’arroser en plein air pendant 15 jours a amplifié la misère des quelque 4 millions de clients du Metropolitan Water District, alors que des équipes effectuaient des réparations planifiées sur une conduite qui achemine l’eau du fleuve Colorado vers la Californie du Sud. À San Diego, des parties du système de refroidissement sont tombées en panne dans un palais de justice de 22 étages du centre-ville. À l’UCLA, les étudiants et les professeurs qui terminaient leur semestre d’été ont été invités à travailler à distance plutôt que de passer du temps dans des dizaines de bâtiments qui ne seraient pas climatisés.
Certaines des plus grandes inquiétudes concernaient les villes d’Oakland et de San Francisco, où la brise marine est si fiable que peu de bâtiments sont climatisés. Les températures ont dépassé les 32 °C dans certains quartiers avant que les vents de l’après-midi n’apportent un soulagement bienvenu. Les autorités d’Oakland ont installé une grande tente blanche avec un grand ventilateur et un brumisateur près d’un campement de sans-abri sur l’autoroute et ont essayé de déplacer certaines personnes dans des petites maisons.
« C’est bien à l’ombre », a affirmé Jude Murcgacz, un résidant du campement âgé de 49 ans, tenant deux petits chiens. « Le soleil est assez dur. »
Même si mardi devait être le jour le plus extrême pendant cette période de chaleur, les météorologues ont déclaré qu’il était peu probable que la chaleur s’atténue avant jeudi en Californie et qu’elle pourrait persister au-delà dans d’autres parties de l’Ouest américain. À plus long terme, c’est le signe avant-coureur d’une nouvelle normalité, a déclaré M. Swain, de l’UCLA.
« Le nombre d’épisodes de chaleur qu’il aurait été impossible d’imaginer au XXe siècle et qui se sont produits au cours des trois derniers mois est stupéfiant, a-t-il ajouté. Des incendies sauvages brûlant des maisons en rangée à Londres. La vague de chaleur pendant des semaines en Chine. Et maintenant, ceci. L’extraordinaire est devenu ordinaire en matière de chaleur extrême. »
Cet article a été initialement publié dans le New York Times.