Maison

Fièvre du printemps

Peu importe les dimensions de leur terrain, l’arrivée du printemps fait renaître la même fébrilité chez les passionnés du jardinage. L’apparition des premiers bourgeons suscite le même plaisir renouvelé, aux quatre coins du Québec. Voici un aperçu de l’animation qui règne dans les coulisses de trois oasis qui accueilleront des visiteurs au cours de l’été.

Jardin Harmonia

C’est avec plaisir qu’Huguette Larocque et Clément Bessette assistent à l’éveil de la nature dans leur propriété de près de 100 000 pi2, située au pied du mont Saint-Bruno. Leur premier geste, en avril, a été de retirer les immenses toiles noires qui recouvraient les 25 sculptures et le mobilier disséminés un peu partout. L’effet positif sur leur moral a été immédiat. Ils ont ensuite tourné leur attention vers les plates-bandes, composées principalement de vivaces, pour les nettoyer et constater les dégâts.

« Au printemps, on prend aussi trois pas de recul pour évaluer ce qu’on va faire, indique M. Bessette. On a toujours des projets pour rendre le jardin plus intéressant. On élabore un plan d’attaque et on y va étape par étape. »

Fruit de leur passion commune, le jardin Harmonia a évolué au cours des 40 dernières années. Il en englobe maintenant six, d’inspirations anglaise, balinaise, japonaise et française, de facture romantique et de style Land Art. La Cité perdue s’est quant à elle ajoutée en 2016. Dans cet environnement hors de l’ordinaire, où se rencontrent les cultures occidentale et orientale, Huguette Larocque laisse libre cours à son imagination. Elle sculpte aussi les arbustes et leur donne une transparence inusitée. Son mari s’acquitte de l’entretien général, lequel le tient particulièrement occupé ces temps-ci.

Pendant l’été, ils ouvriront leur jardin pendant cinq fins de semaine, en recueillant des dons pour trois causes qui leur tiennent à cœur : les auxiliaires bénévoles de l’hôpital Charles-Le Moyne, Maison Répit Vacances et L’Arche Montérégie. Des ateliers et des concerts extérieurs seront également proposés. « Les témoignages des visiteurs nous stimulent beaucoup, confie M. Bessette. Notre jardin a un style très particulier. On voit qu’il fait du bien. » Cela encourage les propriétaires à chercher sans cesse à l’améliorer.

Le Jardin de François

Tombé sous le charme des rosiers thé, il y a une vingtaine d’années, François Marcil leur a réservé une place grandissante dans sa vaste propriété, à Saint-Sauveur. Il en a profité pour faire ressortir la beauté naturelle du lieu, qu’il continue de mettre en valeur.

Tout l’hiver, il a ourdi de nouveaux plans, qu’il met à exécution depuis son retour de Floride. Il laisse à deux jardiniers le soin de nettoyer les plates-bandes et le terrain, pendant qu’il trime pour aménager deux belvédères. Ceux-ci s’ajouteront aux deux autres qui permettent de mieux admirer la rivière à Simon. Il s’active aussi à construire un pont suspendu, fait de bois de cèdre recueilli dans la propriété. Il s’agit de la deuxième passerelle qu’il se plaît à bâtir, après le « pont de l’amour », qui se trouve dans une section voisine et enjambe un ruisseau asséché.

En ajoutant deux chevaux miniatures aux poules et aux lapins qui vivent tranquillement chez lui, il a pensé à ses petits-enfants, mais aussi aux nombreux visiteurs, petits et grands, que des bénévoles et lui accueillent les mercredis et samedis matin, pendant l’été. « C’est une attraction, au même titre que la maison dans les arbres », explique l’homme d’affaires, plutôt porté sur les vivaces, qui dictent l’allure du jardin au fil des semaines.

Témoin des émotions suscitées tout au long du parcours, M. Marcil en tire autant de fierté que de savoir combien de fonds sont amassés au profit de la Société Alzheimer Laurentides. Les réservations se font d’ailleurs sur le site de l’organisme communautaire, qui reçoit directement les dons de 25 $ par personne. « J’ai toujours aimé rendre heureux. J’ai été très chanceux dans ma vie. C’est ma façon de redonner. »

Les Jardins de Métis

Depuis la mi-février, Patricia Gallant, horticultrice en chef des Jardins de Métis, s’active dans deux serres et sur le terrain, en prévision de la prochaine saison. Les magnifiques jardins historiques créés par Elsie Reford il y a près de 100 ans, qui couvrent sept hectares, sont sous sa responsabilité. L’ampleur de la tâche est hallucinante.

« Il y a 3500 variétés de vivaces, révèle Mme Gallant. Les annuelles représentent de 15 à 20 % des cultivars. On en plante 25 000 par année. Cela paraît beaucoup, mais il y a 50 ou 100 plants d’une sorte, 1000 d’une autre, de 400 variétés différentes. » Les annuelles sont cultivées à l’intérieur de deux serres de 3200 pi2 (297 m2) et 1800 pi2 (167 m2). « Il n’y a pas tant d’espace que cela, indique Mme Gallant. C’est une grosse gymnastique. »

Avril a été un mois intense. « Il faut s’assurer qu’on aura ce qu’il faut pour combler les trous, précise-t-elle. Je ne suis pas comme tout le monde : j’aime bien un printemps qui s’étire un peu. On suit la température de près. » La neige est au rendez-vous plus longtemps à Grand-Métis, en Gaspésie, que dans beaucoup d’autres régions du Québec. Cela a un avantage, fait-elle remarquer. À la fin du mois de mai et au début du mois de juin, grâce au microclimat qui y règne, les visiteurs ont la chance de revivre un deuxième printemps, avec des pommetiers et des lilas en fleurs. « Notre saison étant très courte, beaucoup de choses fleurissent en même temps », souligne l’horticultrice, qui en est à sa 33année dans les Jardins de Métis et qui ne se lasse pas de s’y promener.

L’écrivain Alexander Reford, arrière-petit-fils d’Elsie Reford, directeur des Jardins de Métis et fondateur du Festival international des jardins, a la tête pleine de projets. « On souhaite offrir une programmation à la hauteur des attentes, dit-il. La beauté sera ici, peu importe les conditions sanitaires. »

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