Danser pour se sentir bien

Le Krump est un style de danse à la gestuelle violente qui a permis aux jeunes des ghettos de Los Angeles d’extérioriser leur colère de façon positive. Avec la Voguing et le Waacking, les communautés LGBTQ trouvaient une façon d’affirmer leur identité. Le Dancehall ? On le dansait pour célébrer la culture jamaïcaine, la joie, la nature.

« Ces histoires-là, on les raconte aux jeunes pour que chacun d’entre eux puisse s’identifier », explique Katrina Journeau, cofondatrice de Prima Danse.

Prima Danse est un organisme qui utilise la danse comme un moyen d’intervention sociale pour promouvoir la santé physique et mentale, d’abord auprès des populations vulnérables. Nous avons rencontré sa cofondatrice un lundi matin de décembre, à l’école Saint-Nom-de-Jésus, dans Hochelaga-Maisonneuve. Depuis l’an dernier, et pour une autre année encore, des danseurs professionnels offrent des ateliers de danse dans cinq classes de cette école primaire. À la demande de l’établissement, Prima Danse met l’accent sur la prévention de la violence. Au programme, donc, des danses urbaines comme le hip-hop, le break et le Krump.

« La thématique des ateliers varie d’un milieu à l’autre, mais ici, on travaille beaucoup la gestion des émotions », explique Katrina Journeau, qui a collaboré avec des organismes pour monter le plan de cours.

« Quand tu ressens une colère, un stress, une anxiété de performance, quels sont les outils qui te permettraient de ressentir ces émotions-là sans les projeter sur quelqu’un d’autre ? »

– Katrina Journeau

L’intervenante Tamara Journeau demande aux élèves de 5e année s’ils se souviennent pourquoi ils ont appris des danses de rue comme le hip-hop, le Krump et le break. Julien, 12 ans, se rappelle en tout cas le rôle qu’ont joué ces danses, dans les années 1970 et 1980. « Les populations pauvres, au lieu de s’entretuer ou de faire des combats de rue, elles faisaient des combats de danse », dit-il.

Comme premier exercice, les élèves se mettent face à face, se tiennent par l’avant-bras, et plient les genoux en exerçant une force équivalente vers l’arrière, pour garder l’équilibre. « Tu dois être vraiment à l’écoute de l’autre personne », leur conseille l’intervenant Kevin Qian, alias K-Ching. Au terme de l’exercice, sa collègue et lui en profitent pour avoir une discussion avec les élèves sur l’écoute de l’autre et sur les relations saines. Une pierre, deux coups.

Si certains jeunes ont encore un peu de difficulté à s’abandonner aux mouvements, d’autres participent avec cœur. Surtout les garçons. Katrina Journeau le confirme : les filles semblent davantage avoir peur du jugement, au début, du moins.

« À leur âge, ce n’est pas facile de ne pas faire attention à ce que les autres pensent, note l’enseignante Amélie Jacques, qui participe aussi aux ateliers. Mais ils y arrivent de mieux en mieux. Il y en a qui sont très effacés en classe, mais que je vois sous un nouveau jour dans ces ateliers-là. »

Les élèves, eux, apprécient l’effet que la danse a sur eux. « Des fois, ça me calme, dit Estéban, 10 ans. Aussi, j’ai plus d’énergie et j’ai plus le goût de bouger. »

« Ça me défoule quand je suis fâchée. J’adore ça », dit Téa.

« Ça me rend bien, renchérit Arthur. Ça me rend plus énergique et plus dans mon travail. »

La pandémie a eu l’effet d’agrandir la clientèle de Prima Danse, qui existe depuis 2010. « Avant, il fallait convaincre les gens que la danse pouvait faire du bien, dit Katrina Journeau. Aujourd’hui, on se fait appeler. »

Consultez le site de Prima Danse

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