Autisme

Dimanche dernier, nous avons publié une lettre sur la neurodiversité qui nous avait été soumise par Michael Perusko, autiste. Or, cette lettre a plutôt été écrite par Mélanie Ouimet, qui l’avait publiée dans un autre média il y a plusieurs années. De son propre chef, M. Perusko nous a averti du plagiat après la publication et s’est sincèrement excusé auprès des lecteurs de La Presse ainsi que de la véritable auteure dont nous publions aujourd’hui une autre lettre. Vous pouvez la lire ci-contre. Nos excuses.

Éducation

Accueillir la neurodiversité

Depuis les dernières décennies, le modèle d’éducation repose sur une vision de plus en plus médicale. Ce modèle opte pour une approche neurologique pour laquelle le cerveau est rapidement considéré comme dysfonctionnel lorsque des élèves rencontrent des difficultés scolaires. S’il est bien de souligner la diversité neurologique des cerveaux, devons-nous rendre pathologiques tous les défis et toutes les manières singulières d’apprendre ?

Pour tout ce qui a trait à l’éducation des enfants, « nous sommes devenus sculpteurs au lieu des maîtres jardiniers que nos jeunes enfants requièrent »1, remarque Deborah Macnamara, docteure, spécialiste du développement et membre du corps professoral de l’Institut Neufeld. Alors que notre rôle devrait être simplement d’observer, de trouver et d’ajuster l’environnement dans lequel l’enfant évolue afin de lui permettre de grandir. En sculptant nos enfants, même avec tout notre sentiment d’amour pour eux, nous ne les respectons pas, malheureusement.

Dans notre système d’éducation, nous créons insidieusement une normalité de plus en plus étroite dans laquelle les élèves doivent entrer. Tristement, un élève neurodivergent n’entre que très rarement dans ce moule et se retrouve souvent en difficulté ou en situation d’échec.

Rapidement, cet élève se reçoit un diagnostic psychiatrique ou est identifié comme ayant des troubles d’apprentissage (autisme, TDAH, douance, dyslexie, etc.). Le système d’éducation se concentre alors sur les déficits de l’élève et tente d’y remédier à l’aide d’un plan d’intervention spécifique. Cependant, savoir quels sont les déficits d’un enfant ne nous aide en rien à favoriser son épanouissement. Cela ne nous informe aucunement sur celui-ci, mis à part qu’il est « incapable de ». Nous aurons beau mettre en place tous les plans d’intervention imaginables, si nous ne varions pas notre approche, si nous ne reconnaissons pas la neurodiversité et si l’enseignement n’est pas adapté au mode d’apprentissage de l’élève, les efforts seront vains.

Une richesse à mettre à profit

Notre système d’éducation aurait tout à gagner à assumer pleinement la neurodiversité. C’est-à-dire reconnaître la diversité des profils cognitifs, la diversité des modes d’apprentissage, non pas comme étant des lacunes ou des déficits, mais comme une richesse naturelle à mettre à profit. Une approche éducative basée sur le modèle de la neurodiversité s’appuie sur la diversité. Les fondements théoriques de la neurodiversité s’appuient sur les capacités des enfants ; l’accent est mis sur les forces, les talents et les intérêts de chaque enfant afin de minimiser les défis rencontrés. L’essentiel est de créer un environnement, une niche selon le terme de Thomas Armstrong, favorable à l’épanouissement de chacun d’eux, selon leur unicité.

Laisser un enfant apprendre selon ses motivations profondes ne signifie pas pour autant le laisser faire « ce qu’il veut », « quand il veut », « comme il veut ». Cela signifie tout d’abord lui offrir un espace sécuritaire dans lequel il sera libre d’explorer.

C’est lui offrir des choix d’activités et de sujets qui combineront plusieurs matières, des aspects moteurs, intellectuels, émotionnels, sociaux et créatifs. C’est inclure les élèves dans le processus et favoriser leur autonomie collective et individuelle. Tous des éléments qui permettent l’épanouissement de tous les profils cognitifs.

À l’instar des végétaux, les enfants possèdent en eux tout ce qui est nécessaire pour s’épanouir. Lorsque nous regardons les végétaux, nous constatons à quel point la diversité est présente, riche, complexe et en interaction avec tout ce qui est présent dans leur écosystème. Pour qu’une graine, un bulbe ou un tubercule prenne racine et croisse, ils ont besoin d’un environnement favorable : un terreau, de la luminosité, de l’ombre, de l’eau. Tous des paramètres variables selon le moment de croissance et aussi selon chaque variété. Quand nous jardinons et que nous mettons une graine de tournesol en terre, nous savons que si nous prenons soin de son environnement, la graine deviendra un tournesol. Nous savons que la graine possède en elle tout ce dont elle a besoin pour devenir une fleur. Bien enracinée, la graine se transforme progressivement, elle croît, elle se métamorphose jusqu’à l’épanouissement de la fleur. Le tournesol ne ressemble dès lors plus à la petite graine que nous avons mise en terre. Nous avons eu confiance qu’en veillant à lui offrir un bon environnement, la graine deviendrait une plante, qui donnerait un bourgeon et que la fleur s’épanouirait.

Si nous étions des maîtres jardiniers pour nos enfants. Si nous assumions la neurodiversité comme étant une nécessité biologique et non plus comme des troubles psychiatriques, peut-être verrions-nous davantage les forces, les talents, la créativité des élèves neurodivergents. Nous ne serions plus dans la peur que ces élèves échouent. Nous aurions pleinement confiance en eux, en nous et nous saurions qu’ils suivent leur rythme normal de développement, même lorsque ce rythme bouleverse nos croyances et nos attentes.

1. Jouer, grandir, s’épanouir, le rôle de l’attachement dans le développement de l’enfant, Deborah MacNamara, Éditions au carré, 2017

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