Calepin de campagne

Choisir une réelle opposition

Si la tendance des derniers mois se maintenait, la Coalition avenir Québec (CAQ) avalerait le Parti québécois (PQ) et risquerait d’obtenir près de 100 sièges sur 125 à l’Assemblée nationale. En 2018, avec seulement 37,4 % des appuis, elle en avait obtenu 76.

Près de 100 sièges pour la CAQ ! Peut-être… mais en a-t-on vraiment besoin ? D’un gouvernement dont les résultats sont si insignifiants mis à part quelques bonbons sur le plan identitaire ?

En quoi la CAQ mériterait-elle une centaine de sièges au Parlement québécois, dites-moi ? Est-il permis de penser qu’elle ne mérite même pas d’être majoritaire ?

Le gouvernement Legault était occupé à gérer la pandémie, dit-on. Qui aurait fait mieux ? Soyons honnêtes. Rappelons que le Québec est la province canadienne où il y a eu le plus de morts de la COVID-19 pour 100 000 habitants. Difficile d’imaginer pire.

Au lieu de faire appel à un concert d’experts plus sensibles aux conséquences humaines et économiques des confinements et fermetures d’entreprises, François Legault a non seulement encouragé la peur, la délation et l’exclusion, il a agi comme éteignoir des nécessaires contre-pouvoirs dans une démocratie et un Parlement qui se respectent.

Le succès populaire de François Legault serait-il la combinaison, en son sein, des thèmes portant sur le nationalisme et l’économie ? Un nationalisme gériatrique et une économie subventionnée seraient plus justes. Et si l’économie repose essentiellement sur le secteur public, alors là, oui ! Quelle performance ! Grossi les rangs de la fonction publique et privé le « privé » d’une main-d’œuvre se faisant déjà rare. Ça, c’est réussi, ma foi !

À mon avis toutefois, son succès populaire repose sur le fait que François Legault est un « média-junkie ». Avec la complicité de ses réseaux d’influence, il a bénéficié d’un quasi-monopole en termes de visibilité médiatique dans un contexte où la peur menait notre monde.

Au sortir des multiples vagues de la pandémie, le style autocratique1 de François Legault et le culte de la personnalité du chef sont des modes de gouvernance rétrogrades. L’unanimisme observé ces dernières années est malsain. La sacralisation d’une gouvernance aussi centralisée, des monopoles encroûtés et d’une bureaucratie stagnante est dépassée. En santé, par exemple, la succession d’organigrammes revus et corrigés n’ont rien amélioré. L’injection de nouveaux milliards depuis plusieurs années non plus.

Nous y voilà donc. Le choc démographique frappe de plein fouet. La pénurie de main-d’œuvre étouffe les élans de nos entreprises. Le déficit d’entretien de nos infrastructures a doublé en sept ans, passant de 15 à 30 milliards2. Nos systèmes de santé et d’éducation sont négligés de même que nos lacs, rivières et forêts.

Que nous proposent les partis ? La CAQ veut être l’architecte de l’économie du Québec et son chef rêve de nouveaux barrages électriques, le PQ promet un référendum dans un premier mandat, le Parti libéral du Québec tente de vendre sa pertinence, Québec solidaire impose ni plus ni moins l’écotopie, et le Parti conservateur du Québec (PCQ) s’en prend à une gouvernance qui divise et propose des voies alternatives pour garantir et livrer les services publics aux citoyens.

Et puis, peut-on revenir sur terre et cesser de berner l’électorat ? Non. Le Québec ne sauvera pas la planète. La décroissance durable est utopique et est loin d’être un projet humaniste.

La bataille entourant la diminution des gaz à effet de serre, telle que présentée, est irréaliste. Et non, il n’y a rien « d’audacieux » dans la brutalité des plans de supposée transition énergétique qui instaureront grand nombre de politiques punitives et contraignantes pour les citoyens les plus vulnérables.

Peut-on rappeler que le Québec n’est responsable que d’environ 0,18 % des émissions mondiales ? En 2019, on estimait qu’il suffisait de 11 jours à la Chine pour annuler la totalité des objectifs de réduction des GES du Québec sur 30 ans3. C’est certainement pire aujourd’hui.

Et puis, si l’on veut gérer à coups de sondages, allons-y gaiement. L’adhésion des Québécois aux idées du PCQ est plus forte qu’on ne le croit. Sur l’ajout du privé en santé, sur l’exploitation de nos richesses naturelles, et sur l’abaissement du fardeau fiscal. Quant au tramway et le tunnel Québec-Lévis tel que proposé par le gouvernement, une majorité des citoyens de la région jugent qu’il s’agit de projets trop risqués et d’un gaspillage éhonté.

Il est rare que les Québécois n’accordent pas un deuxième mandat à un gouvernement. Soit.

Mais pourquoi les Québécois continueraient-ils d’être victimes d’attente et de fermeture de services essentiels par un État en manque d’imagination ?

Pourquoi ne s’offriraient-ils pas ce qui existe déjà dans d’autres sociétés sociales-démocrates ? L’offre du PCQ leur propose exactement cela : une garantie d’en avoir pour leur argent et de pouvoir au moins espérer que si gouvernement caquiste il y a, le PCQ sera là pour le talonner, se recentrer sur ses missions essentielles, encourager la gestion privée en santé, et développer les richesses naturelles du Québec. Ce serait déjà ça.

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