Inondations

« La mousson monstre de la décennie »

Déjà 1000 morts depuis juin. Et le pire est peut-être à venir.

Le sud du Pakistan, particulièrement touché par les inondations qui ont déjà fait plus de 1000 morts dans le pays, se prépare à un nouveau déluge dans les prochains jours, provoqué par les crues des rivières.

Alimenté par des dizaines de rivières et de ruisseaux de montagne sortis de leur lit à la suite de pluies record et de la fonte des glaciers, l’Indus, fleuve qui traverse la province du Sindh dans le sud du pays, ne cesse de grossir.

« L’Indus est en pleine crue », confirme le responsable de l’imposant barrage datant de l’époque coloniale, situé près de la ville de Sukkur, où vivent quelque 500 000 habitants.

L’Autorité nationale de gestion des catastrophes du Pakistan a signalé que le nombre de morts depuis le début de la mousson à la mi-juin cette année, soit plus tôt que la normale, s’élève à 1061. Selon l’Autorité, les inondations de cette année sont comparables à celles de 2010 – les pires jamais enregistrées – lorsque plus de 2000 personnes sont mortes et près d’un cinquième du pays était sous l’eau.

Sherry Rehman, sénatrice pakistanaise et plus haute responsable du pays sur les questions climatiques, a dit dans une vidéo publiée sur Twitter que le Pakistan connaît une « grave catastrophe climatique, l’une des plus dures de la décennie ».

« Nous sommes en ce moment au point zéro de la ligne de front des évènements météorologiques extrêmes, dans une cascade incessante de canicules, d’incendies de forêt, d’inondations soudaines, de multiples débordements de lacs glaciaires, d’inondations, et maintenant la mousson monstre de la décennie est en train de faire des ravages dans tout le pays. »

— Sherry Rehman, sénatrice pakistanaise

Les inondations soudaines ont emporté des villages alors que des soldats et des secouristes ont évacué les résidants bloqués vers des camps de secours et fourni de la nourriture à des milliers de Pakistanais déplacés. Plus de 33 millions de personnes ont été affectées d’une façon ou d’une autre par les inondations au Pakistan, a affirmé la ministre Rehman à Reuters.

Les provinces du Baloutchistan, qui manquait déjà d’infrastructures clés, et du Sindh sont les régions les plus touchées. Les inondations de la rivière Swat ont affecté la province du nord-ouest de Khyber Pakhtunkhwa, et 350 000 personnes ont été évacuées des districts de Charsadda et Nowshera de Khyber Pakhtunkhwa.

Khaista Rehman, 55 ans, sans lien avec la ministre du Climat, s’est réfugié avec sa femme et ses trois enfants sur le bord de l’autoroute Islamabad-Peshawar après que sa maison de Charsadda a été submergée pendant la nuit.

« Dieu merci, nous sommes en sécurité maintenant sur cette route assez élevée par rapport à la zone inondée, a-t-il dit en soupirant en entrevue avec l’Associated Press. Nos récoltes ont disparu et notre maison est détruite, mais je suis reconnaissant à Allah que nous soyons en vie et je recommencerai ma vie avec mes fils. »

Habitations détruites

La mousson sans précédent a touché les quatre provinces du pays. Près de 300 000 habitations ont été détruites, de nombreuses routes ont été rendues impraticables, et les coupures d’électricité se sont généralisées, affectant des millions de personnes.

Le sort de centaines de milliers d’autres Pakistanais dépend d’un barrage vieux de 90 ans contrôlant le fleuve Indus. Le barrage de Sukkur redistribue l’eau sur les terres agricoles via presque 10 000 kilomètres de canaux. Après des années de négligence, ceux-ci ne permettent plus aujourd’hui de traiter les volumes record enregistrés, et une catastrophe est à redouter si le barrage ne parvient pas à contrôler le débit d’eau.

Le pape François a dit dimanche vouloir affirmer sa « proximité avec les populations du Pakistan frappées par des inondations aux proportions désastreuses ». S’exprimant lors d’un pèlerinage dans la ville italienne de L’Aquila, qui a été frappée par un tremblement de terre meurtrier en 2009, François a dit qu’il priait « pour les nombreuses victimes, pour les blessés et les évacués, et pour que la solidarité internationale soit rapide et généreuse ».

La sénatrice Rehman a déclaré au média turc TRT World qu’au moment où les pluies se retireraient, « nous pourrions bien avoir un quart ou un tiers du Pakistan sous l’eau ».

« C’est une crise mondiale et bien sûr nous aurons besoin d’une meilleure planification et d’un développement durable sur le terrain. […] Nous aurons besoin de cultures et de structures résilientes au climat », a-t-elle ajouté.

Évènements extrêmes

En mai, Sherry Rehman a déclaré à BBC Newshour que le nord et le sud du pays étaient témoins d’évènements météorologiques extrêmes en raison de la hausse des températures. « Dans le nord, en ce moment, nous subissons beaucoup de ce que l’on appelle des inondations de lacs glaciers parce que le Pakistan abrite le plus grand nombre de glaciers en dehors de la région polaire. »

Des responsables ont averti que des torrents d’eau devraient atteindre la province du Sindh dans les prochains jours, ajoutant à la misère de millions de personnes déjà touchées par les inondations.

Le premier ministre Shabaz Sharif a rendu visite aux victimes des inondations dans la ville de Jafferabad, au Baloutchistan. Il a juré que le gouvernement fournirait un logement à tous ceux qui ont perdu leur maison.

— Avec The Guardian

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