Du vert et du positif

Une lectrice m’a demandé l’autre jour d’écrire des choses positives.

J’aimerais lui dire que j’essaie. J’essaie très fort de voir toutes sortes de choses positives autour de moi.

Elles existent.

Les journées qui allongent sans cesse.

Les muscaris et les scillas qui prennent le relais des crocus.

La salade cuite de chez Sumac, avec du pain pita tout frais et chaud.

Les enfants de mes voisins qui apprennent à faire du vélo.

Je peux vous faire une belle liste.

Mais il y a aussi la maudite COVID-19 et les changements climatiques, pour ne nommer que ces deux calamités dont on ne se sort pas. Et je n’y peux rien. Et on ne peut quand même pas ne pas en parler.

Mais je vous propose un compromis : parler de changements positifs face à tout le négatif des changements climatiques.

Ça vous va ?

Je vous propose de parler des 84 % d’entreprises partout au Canada qui reconnaissent qu’il est de leur responsabilité d’adopter des pratiques, de faire des choix d’affaires pour protéger l’environnement. Des 20 % de « leaders » qui ont déjà commencé concrètement à le faire de façon poussée.

Du fait, aussi, que ces données, issues d’un sondage auprès de 1500 entreprises à travers le pays, mené à la demande de la Banque de développement du Canada (BDC), confirment des résultats semblables déjà colligés l’an dernier à pareille date, mais jamais rendus publics, puisque nous étions alors au début d’une crise pandémique majeure qui oblitérait l’intérêt pour à peu près tout autre sujet.

Donc, on est dans une tendance qui a commencé avant la crise de la COVID-19. Ces résultats ne sont pas le fruit d’une soudaine envie d’être plus vertueux pour bien paraître – puisque c’est un message qu’on entend effectivement beaucoup : profiter de la remise en question de tout par le virus pour devenir « meilleur » et adopter de bonnes valeurs. Et les chiffres montrent en même temps que la pandémie ne sert pas d’alibi pour remettre à plus tard les préoccupations environnementales.

L’étude, dont les résultats seront rendus publics ce jeudi, donne comme exemple plusieurs entrepreneurs qui ont fait individuellement une différence dans la prise de décisions écolos de leur société.

Parce que c’est là aussi une donnée frappante qui ressort de l’étude, m’a expliqué en entrevue Pierre Cléroux, vice-président à la recherche et économiste en chef de la BDC. « La différence vient souvent de la volonté de l’entrepreneur, d’un individu. »

Une personne qui choisit de mettre le cap sur un horizon plus vert.

Le rapport de la BDC montre en couverture une entrepreneure qu’on connaît bien au Québec, Anie Rouleau, qui a décidé de fonder The Unscented Company pour répondre aux réticences de plus en plus grandes des consommateurs – dont la sienne, personnellement – à utiliser des produits d’hygiène personnelle et de maison qui contiennent des parfums.

Qu’est-ce que les parfums ont à voir avec les changements climatiques ?

Dans son cas, les produits trop parfumés lui causent des migraines. Mais les groupes environnementaux, dont le célèbre lobby américain Environmental Working Group, qui donne le ton dans ce secteur en Amérique du Nord, décrient depuis toujours les mesures de protection du secret industriel qui permettent aux fabricants de lessives, shampooings et compagnie de cacher toutes sortes d’ingrédients possiblement toxiques pour les humains et la planète sous l’étiquette « parfum ».

Mme Rouleau, dont l’entreprise a obtenu la certification B Corp – qui en garantit les valeurs éthiques et écologiques, notamment –, a étendu l’écologisme de son approche sans parfum à d’autres aspects de The Unscented Company, en offrant notamment des emballages en carton plutôt qu’en plastique, ou des bouteilles de verre qu’on peut remplir à l’infini dans des boutiques « zéro déchet ».

Autre exemple fourni par la BDC – une autre entreprise aidée par la banque d’investissement : la Foghorn Brewing Company, une brasserie de Quispamsis, au Nouveau-Brunswick, qui a décidé de profiter d’un projet d’agrandissement pour faire un virage à l’énergie solaire, un geste qui venait accentuer des choix écolos plus petits faits par les cofondateurs Steve Russell et Andrew Estabrooks depuis les débuts de l’entreprise, comme l’utilisation de carton recyclé ou la réutilisation des résidus de la fabrication de la bière pour nourrir des animaux de ferme.

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Le virage écologique n’est pas toujours facile et il reste beaucoup à faire, note M. Cléroux. Plus du quart des entreprises sont « débutantes » et plus de la moitié, soit 54 %, sont encore « en transition ».

Tout le monde n’est pas aussi dynamique et proactif que ces « leaders », ces entreprises qui ont mis en place des mesures avancées pour faire pencher la balance. Mais, note l’économiste en chef de la BDC, les entreprises « leaders » sont dans tous les secteurs, même le secteur manufacturier.

La taille de l’échantillon, toutefois, ne permet pas d’analyser en profondeur ce qui se passe dans des secteurs précis où les défis environnementaux sont importants, comme l’industrie des mines ou celle du pétrole.

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Autre élément intéressant du rapport : l’éclairage porté à la question des prix des produits et services des entreprises qui font des choix écologiques.

Selon l’étude, le prix demeure le principal critère d’achat des consommateurs canadiens. C’est la première chose qu’on regarde.

Cela dit, 80 % des consommateurs sont prêts à payer plus cher pour faire un choix écologique.

Pour 25 % des consommateurs, une hausse de prix de 5 % est acceptable ; pour 32 % d’entre eux, des hausses de 5 % à 10 % sont acceptables. Un cinquième des consommateurs est même prêt à accepter 20 % ou plus de « prime verte ». Mais 20 % des consommateurs refusent de payer plus cher pour faire un choix plus vert.

Mais vous savez quoi ?

Chez les 18 à 35 ans, ce sont pratiquement les deux tiers des consommateurs qui sont prêts à payer plus pour être écolos. Donc la pensée des consommateurs change !

Super positif, non ?

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