Cinq grammes de dentifrice ou dix centilitres d’huile de cuisson : étranglés par le coût de la vie, les Nigérians achètent désormais leurs produits de première nécessité en petite quantité, emballés dans de minuscules sachets plastiques, à consommer dans la journée.
Les grandes marques à l’origine de cette « sachétisation de l’économie » y voient là une« innovation », permettant un accès à la consommation pour tous les Nigérians, dont la majorité survivent au jour le jour. Pour d’autres, c’est une aberration économique et écologique.
Dans les rues de Lagos, la dynamique capitale économique du pays le plus peuplé d’Afrique, les sachets font désormais partie du décor : ils colorient ses rues, bariolant les milliers de boutiques de bois et de tôle que l’on retrouve partout.
« Tout acheter en petite quantité »
Assis sur un tabouret, Ibrahim Atahire tient depuis 30 ans l’une de ces petites épiceries dans une voie animée d’Obalende, un quartier populaire. L’homme de 55 ans à la barbe grisonnante l’assure : « Chez moi, tu peux tout acheter en petite quantité. »
Et c’est vrai. Sur son stand, tout est vendu en sachets : du café ou du lait en poudre pour une tasse seulement, quelques grammes de céréales pour un bol, du dentifrice pour un brossage de dents, des rasoirs emballés et vendus individuellement, de la lessive en poudre pour un unique lavage.
Même la crème antimoustique pour soulager les piqûres est vendue dans un emballage plastique plus petit qu’une paume de main.
Pour chaque repas
Pour le déjeuner, l’huile de cuisson s’achète aussi en sachets, tout comme les épices, la sauce tomate. Un sachet, pour chaque ingrédient et pour chaque repas.
« Depuis des années, je propose des sachets à la vente, mais récemment les gens n’ont plus les moyens d’acheter en quantité normale, donc je ne vends plus que ça », explique le vendeur.
Dans une rue parallèle, Sanni Aïcha, porte-monnaie à la main, fait le tour des échoppes à la recherche du sachet d’huile de cuisson le moins cher. Cette mère de deux enfants, vendeuse de cacahuètes, et dont le mari est un policier à la retraite, confie « ne plus s’en sortir ».
La première économie du continent a été frappée de plein fouet par la pandémie de coronavirus qui a fait grimper les prix en 2021 de 17 %, et particulièrement ceux des produits alimentaires, faisant tomber dans la pauvreté six millions de Nigérians supplémentaires.
— Agence France-Presse