Joel Armia et la pertinence
En retard 3-2 avec 64 secondes à jouer, samedi, Martin St-Louis demande son temps d’arrêt. C’est l’heure du caucus au banc du Canadien. Les suspects habituels se rassemblent au tableau : Cole Caufield, Nick Suzuki, Juraj Slafkovsky et Mike Matheson.
Fraîchement de retour au jeu, Alex Newhook y est aussi. Le sixième homme ? Ce n’est pas clair, mais Joel Armia écoute les instructions, assis à califourchon sur la bande.
Le suspense tenaille les 21 105 spectateurs ; qui sait si le réseau WiFi gratuit du Centre Bell n’a pas surchauffé ? Armia va-t-il enjamber la bande du côté de la patinoire pour participer à l’action, ou de l’autre côté pour se rasseoir au banc ? Si on avait été au Banquier, la réponse serait venue après la pause.
Vous comprendrez ici qu’on en beurre épais. Armia a bel et bien été désigné parmi les six patineurs. Mais d’une part, le Tricolore n’a finalement pas inscrit le but égalisateur et le pointage est demeuré 3-2 en faveur des Stars de Dallas.
D’autre part, les plus cyniques rappelleront que dans une formation à cinq attaquants et un seul défenseur, avec comme autres options des joueurs de soutien et des attaquants en panne comme Jake Evans et Tanner Pearson, être désigné n’est pas en soi un exploit.
Il reste que c’était la première fois de l’année qu’Armia était envoyé à six contre cinq alors que le CH avait réellement des chances de créer l’égalité. Et ce n’était pas par hasard.
« Il a joué un bon match. C’est un gars offensif, un gros gabarit. C’est sûrement en grande partie pour son match, mais ce n’est pas juste ça. C’est l’ensemble de sa game dans les derniers mois. »
— Martin St-Louis, au sujet de Joel Armia
Un rôle accru
Il y a des joueurs qui passent de la parole aux actes. Armia, lui, est passé directement aux actes, pour la simple et bonne raison qu’il n’y a pas vraiment eu de parole au préalable. Il n’y en a d’ailleurs pas eu davantage après le match, puisqu’il n’était pas au vestiaire pour rencontrer les journalistes.
Ce joueur, renvoyé à Laval après avoir été ignoré par 31 équipes au ballottage, est en train de profiter des occasions bonifiées pour redevenir un élément pertinent du Canadien.
Le match de samedi était son septième, sur les 10 derniers, où il dépassait les 17 minutes de jeu. Ça ne se traduit pas toujours par des résultats offensifs – il a d’ailleurs été blanchi pour le cinquième match de suite –, mais c’est un joueur qui se trouve tranquillement une utilité. Il a aussi bien failli égaler la marque en se servant de ses fameuses mains pour s’amener seul devant Jake Oettinger, avant de tirer trop haut. La seule note négative est sa malheureuse collision avec Rafaël Harvey-Pinard, qui a forcé ce dernier à rendre les armes.
Newhook a joué au sein du même trio qu’Armia pour la première fois cette saison. Il lui a offert les compliments habituels. « C’est amusant de voir ce qu’il peut faire avec sa grosse charpente. Il se sert de son corps pour créer des chances », a décrit le Terre-Neuvien.
On pourrait ajouter son travail colossal en désavantage numérique. Samedi, il a passé plus de sept minutes sur la patinoire à quatre contre cinq. Dans cette phase du jeu, les données de Natural Stat Trick indiquent qu’il est le joueur du CH contre qui l’adversaire marque le moins souvent cette saison (7,04 buts par tranche de 60 minutes).
Avec le Tricolore largué de la course aux séries, des noms commencent à circuler ici et là sur vos sites de rumeurs préférés. Celui d’Armia, avec une autre année de contrat à 3,4 millions de dollars, n’est pas précisément populaire. Évidemment, s’il joue ailleurs qu’à Montréal, les soirées de 17 minutes sur la patinoire seront probablement finies. Et Kent Hughes devrait assurément retenir une partie de son salaire. N’empêche que son impact à court d’un homme et ses succès aux côtés d’Eric Staal et Corey Perry au printemps 2021 militent en sa faveur. Ou en faveur de Hughes, c’est selon.
Profondeur recherchée
Cela dit, en attendant de savoir ce qu’il adviendra de lui, Armia fait partie des outils à la disposition de St-Louis afin de diversifier un brin son attaque. Car derrière le trio de Suzuki, c’est mince, et il faudrait au CH une certaine production secondaire.
C’est l’unité de Suzuki qui a inscrit les deux buts dans la défaite. C’est aussi elle qui a fourni trois des cinq filets dans la victoire de mardi à Washington.
Pendant ce temps, Josh Anderson n’a pas marqué en six matchs depuis son retour au jeu. Jesse Ylönen n’a pas touché la cible depuis le 16 novembre. Tanner Pearson a bien joué samedi à son cinquième match depuis son retour, mais était un courant d’air avant de se blesser. Jake Evans s’applique défensivement, mais il est sans buts à ses 23 dernières sorties.
« Le trio de Suzuki joue bien, on a besoin que ça continue. Mais tout le monde doit contribuer à l’attaque. Ce n’est pas facile d’y arriver dans cette ligue, mais on doit trouver manière », a résumé St-Louis.
La quête de solutions se poursuivra dès ce dimanche après-midi, contre les Blues.