Atelier Cocotte

le bois au cœur du luminaire

Le Québec foisonne de créateurs qui fabriquent de leurs mains des objets originaux, authentiques, uniques. La Presse part à la rencontre de ces artisans dont les gestes et le regard donnent ses couleurs au design d’ici.

Dans son local du Centre-Sud, à Montréal, Isabelle Auger s’active à monter l’un de ses luminaires en placage de bois canadien. Aujourd’hui, ce sera de l’érable, même s’il aurait pu être question de noyer, de chêne ou de merisier. Les gestes s’enchaînent quasi machinalement, avec une assurance acquise en plus de 10 ans. Et c’est ainsi qu’une lampe suspendue prend forme sous nos yeux tandis que l’artisane nous raconte son parcours sans en perdre moindrement le fil.

La signature d’Atelier Cocotte est reconnaissable entre toutes. Aérienne et naturelle, calquée sur des formes organiques inspirées d’une certaine poésie de la vie : une feuille, un fruit, une fleur, une larme... À moins qu’elle ne rappelle la flamboyance capillaire de Tina Turner. Dans tous les cas, le bois – matériau de prédilection d’Atelier Cocotte – est mis en lumière de charmante façon. L’utilisation de bandes de chant, devenue la signature de la maison, permet un montage en souplesse et un éventail de rondeurs.

« Je n’ai pas inventé la roue, affirme Isabelle Auger. Il y avait déjà des luminaires en bois avant que j’en fasse, mais rien qui n’utilise le placage naturel de cette façon. »

Un créneau

Le Québec ne manque pas de créateurs de luminaires inspirants. Atelier Cocotte a toutefois trouvé un créneau qui la distingue et une facture qui se prête aux décors scandinaves et épurés qui demeurent dans l’air du temps. Son style organique plaît.

« Parfois, je me pince... Je me sens privilégiée. J’ai beaucoup d’amis artisans pour qui ce n’est pas facile. » Son parcours s’est plutôt dessiné avec une certaine fluidité, propulsé au départ par des parutions dans les médias et des commandes provenant d’acteurs déterminants comme le Musée d’art contemporain et le Musée des beaux-arts de Montréal.

« Je suis chanceuse, mais je suis consciente que ça peut s’arrêter n’importe quand. »

— Isabelle Auger, d’Atelier Cocotte

La tendance laisse toutefois penser le contraire. De plus en plus, sa clientèle est constituée de gens qui souhaitent acheter local et qui comprennent la somme et la qualité du travail accompli.

Comme bien d’autres, l’histoire d’Atelier Cocotte a commencé « un peu par hasard » lors d’un deuxième congé de maternité. Isabelle Auger multipliait les petits projets avec une envie vorace de s’accomplir et un manque de motivation à se replonger dans les horaires éreintants d’une graphiste en publicité. L’utilisation de bandes de chant lors de la restauration de meubles a allumé l’idée de créer des luminaires à partir de ce produit malléable et accessible. Inspirée, la créatrice a réalisé un modèle, puis un autre, bâtissant ainsi l’ossature de sa collection.

Des quelques amis qui ont voulu mettre la main sur ses créations, la clientèle s’est vite étendue à des projets résidentiels ou commerciaux. Atelier Cocotte est ainsi devenue un troisième rejeton qui s’épanouit dans tout le Canada, notamment en Colombie-Britannique et en Ontario, où les demandes sont nombreuses.

À son rythme

« Avoir une entreprise seule, c’est exigeant, mais je peux travailler à mon rythme. J’aime avoir ma liberté et être ma propre boss », souligne l’artisane tout en poinçonnant ses lattes de bois.

Certains luminaires, comme la Noisette, sont de ceux qu’elle a peaufinés jusqu’à ce qu’ils soient « nickel » et qu’elle arrive aujourd’hui à monter les yeux fermés, seule à la barre, à coup de 12 à 16 par semaine. Un nouveau prototype vient enrichir chaque année la collection qui compte 65 suspensions ou lampes de table.

« Il y a quelque chose de méditatif dans le fait de travailler de ses mains sans avoir à trop penser. Quelque chose de naturel aussi à manipuler cette matière qui fait partie de l’ADN de la famille. »

— Isabelle Auger, d’Atelier Cocotte

Son grand-père était l’un des grands marchands de bois de Québec. Cet intérêt est partagé de près par les générations suivantes. « Comme tous les artisans, j’ai connu des hauts et des bas. Chaque fois que j’ai l’impression que c’est fini, d’autres commandes arrivent et ça repart. Je croise les doigts pour que jamais ça ne s’arrête. Et si un jour c’était le cas, j’aurai un autre projet. Lequel ? Je ne sais pas. Mais ce sera certainement en bois. »

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