DÉPISTAGE

« On vient de perdre un repère »

Comment évaluer le nombre de cas positifs de COVID-19 maintenant que la vague Omicron est si importante que le dépistage par tests PCR n’est plus offert à la population générale ? Explications.

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Pourquoi connaître le nombre de cas est-il crucial ? « C’est un outil qui nous donne une meilleure idée de la tendance de la propagation du virus, explique le virologue Benoit Barbeau, professeur au département de sciences biologiques de l’Université du Québec à Montréal (UQAM). Ça nous permet de savoir à quel point il est plus transmissible que le variant précédent, si on vit une croissance exponentielle, et on sait qu’Omicron se transmet plus vite que la varicelle. C’est un message qui permet à la Santé publique de réagir, et c’est un point de repère qu’on vient de perdre. »

Dix fois plus en Alberta

La médecin hygiéniste en chef de l’Alberta a affirmé cette semaine que les plus de 57 000 cas actifs de COVID-19 dans la province ne représentaient qu’une infime partie de la véritable propagation du virus. « Je ne pourrais pas donner de chiffre précis, mais il est très clair qu’avec un taux de positivité de 40 %, la transmission est plus élevée qu’elle ne l’a jamais été auparavant, a déclaré la Dre Deena Hinshaw aux journalistes lundi, a rapporté La Presse Canadienne. Nous devrions supposer qu’au minimum, nous avons environ 10 fois plus de cas que ceux que nous diagnostiquons grâce aux [tests] PCR. »

Se fier au taux de positivité ?

Comme le dépistage n’est plus offert à tous, la donnée qui intéresse maintenant les experts est le taux de positivité des tests effectués, qui est à 20 % environ au Québec. « Le taux de positivité ne nous dit pas tout : si ça avait suffi, on n’aurait pas eu à utiliser tous ces tests PCR, dit Benoit Barbeau. Ce taux nous donne un certain reflet de la situation, mais ce n’est qu’une partie du tableau, car on priorise les groupes les plus vulnérables, qui peuvent faire plus attention que la population générale. » M. Barbeau se fie désormais au nombre de cas d’hospitalisation. « C’est la nouvelle donnée essentielle. Elle nous donne une certaine idée de la transmission, même s’il y a un délai avec les cas d’infection. Aussi longtemps qu’on ne voit pas un plateau et une diminution dans les hospitalisations, on comprend que la transmission est toujours active. »

« À peu près tout le monde [va être infecté par le variant Omicron] »

— Le DAnthony Fauci, conseiller médical en chef du président des États-Unis, en entrevue mardi avec le Center for Strategic and International Studies

20 fois

C’est le risque plus élevé de mourir de la COVID-19 que courent les personnes non vaccinées par rapport à celles qui sont adéquatement vaccinées, selon la Maison-Blanche.

Le risque d’hospitalisation, quant à lui, est 17 fois plus élevé.

Alors que le risque d’infection est 10 fois plus élevé.

Les eaux usées négligées ?

Mardi, des chercheurs de Boston ont annoncé que le sommet de la vague Omicron avait peut-être été atteint dans la ville, alors que les plus récentes lectures montraient une diminution des cas après un nombre record. Leurs données ne provenaient pas du dépistage, mais plutôt de l’analyse des eaux usées, une façon peu coûteuse d’avoir un portrait de la pandémie. Au Québec, Sarah Dorner, professeure au département des génies civil, géologique et des mines de Polytechnique Montréal, faisait partie du projet pilote de CentrEAU-COVID qui a analysé les eaux usées dans la province l’an dernier, projet qui a pris fin après la troisième vague, alors que la Santé publique n’était pas débordée, et arrivait à bien dépister les cas. « Aujourd’hui, l’analyse des eaux usées serait pratique, car le nombre de cas, on ne le connaît pas », dit Mme Dorner, ajoutant qu’à peine quelques milliers de dollars par semaine suffiraient pour analyser les eaux usées d’une ville de la taille de Laval. « Dans un contexte de pandémie, l’analyse des eaux usées est un outil qu’on gagnerait à utiliser davantage au Québec, même à long terme, pour avoir une idée de ce qui s’en vient », dit-elle.

Omicron présent au Canada depuis la mi-novembre

C’est le moment où la présence du variant Omicron a commencé à être perceptible dans les eaux usées en Nouvelle-Écosse, selon les analyses subséquentes faites par le Centre d’études sur les ressources en eau de l’Université Dalhousie. C’est donc dire que le variant était présent au Canada même avant qu’il ne soit officiellement rapporté en Afrique du Sud, le 24 novembre.

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