Italie

« Restez chez vous »

Durement touchée, l’Italie passe aux choses sérieuses en confinant l’ensemble du pays. Pendant ce temps, le Québec se prépare en ouvrant des cliniques de dépistage.

« L’Italie est dans un état de siège »

Nouveau mot d’ordre pour les 60 millions d’Italiens : « Restez chez vous. » Rome a décidé, lundi soir, de généraliser les mesures de confinement à l’ensemble du pays, qui devient le premier du monde à imposer des mesures aussi draconiennes pour tenter d’enrayer la propagation du COVID-19. Avec plus de 113 000 cas d’infection recensés dans le monde et 4000 décès, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) estime que la menace de pandémie « est devenue très réelle ».

« Je vais signer un décret que l’on peut résumer ainsi : “Je reste chez moi.” Il n’y aura plus de “zone rouge dans la péninsule”. […] L’Italie tout entière deviendra une zone protégée », a affirmé sur un ton grave le chef du gouvernement italien, Giuseppe Conte, lors d’un point presse au siège du gouvernement, à Rome.

« Sur tout le territoire national est interdite toute forme de rassemblement de personnes dans des lieux publics ou ouverts au public », indique le décret.

Les mesures de confinement imposées au quart des Italiens, dimanche, concernent désormais l’ensemble de la population, selon ce décret signé lundi soir. Les mesures entrent en vigueur ce mardi et seront valables jusqu’au 3 avril pour l’ensemble de l’Italie, là où le coronavirus a déjà fait 463 morts.

« Il faudra éviter [les déplacements] sur tout le territoire de la péninsule, sauf s’ils sont motivés par des motifs professionnels justifiés, par des cas de nécessité ou encore par des motifs de santé. » 

— Extrait du décret signé lundi soir, à Rome

Initialement prévue jusqu’au 15 mars, la fermeture des écoles et des universités restera en vigueur jusqu’au 3 avril. Tous les événements sportifs, « de tout niveau et de toute discipline », sont annulés, y compris le championnat de soccer – véritable institution dans le pays. Seules les compétitions organisées par des institutions internationales pourront se tenir, mais à huis clos, selon le décret. Les entreprises, publiques et privées, sont invitées à mettre leur personnel en congé. Les cérémonies religieuses (mariage, baptême, funérailles) sont aussi interdites.

ISOLEMENT, PROVISIONS ET CONFUSION

Le Québécois Guy Djandji devait visiter l’Italie dans quelques jours. Il a espéré jusqu’à la dernière minute pouvoir visiter la péninsule.

« On avait fait des réservations pour les Musées du Vatican et ils m’ont informé par courriel que tout serait fermé. Lundi, la personne à qui je louais l’appartement m’a annoncé qu’elle était coincée chez elle et qu’elle ne pouvait donc plus me louer son appartement. J’ai des cousins qui devaient faire du ski, on les a mis à la porte, la station a fermé », énumère M. Djandji, joint par téléphone lundi soir, en Espagne.

Tous les musées et lieux de culture seront fermés. Les stations de ski dans tout le pays seront fermées jusqu’au 3 avril. Les piscines, salles de sport, centres culturels et centres de bien-être doivent aussi suspendre leurs activités. Les bars et restaurants peuvent rester ouverts, de 8 h à 18 h, mais ils doivent respecter la distance de sécurité d’au moins un mètre entre les clients.

« Toute l’Italie est dans un état de siège, carrément. Tout le monde me déconseille d’y aller. Il n’y a que le gouvernement du Canada qui n’a pas émis d’avis “d’éviter tout voyage non essentiel” sur l’ensemble de l’Italie. Et c’est embêtant parce que c’est seulement avec un avis du gouvernement que les cartes de crédit peuvent nous rembourser les dépenses perdues », regrette le voyageur, qui annulera quand même toutes ses réservations en Italie.

À l’annonce du décret, lundi soir, des Italiens apeurés ont pris d’assaut des supermarchés ouverts 24 h. 

Des images véhiculées par des médias locaux montraient des employés à l’entrée des supermarchés de Rome ou de Naples réguler les entrées des consommateurs, qui faisaient sagement la file. Les titres des journaux italiens de mardi ne manqueront pas d’allonger les files d’attente : « L’Italie fermée », « Tous à la maison », « Protection totale », « Tout ferme » pourront lire les Italiens.

Or, le gouvernement a indiqué que les supermarchés resteront ouverts et seront « régulièrement » approvisionnés. Il recommande à la population de ne pas « s’affoler pour acheter des denrées alimentaires ou des biens de première nécessité, qui pourront être achetés dans les prochains jours ».

Une centaine de pays sont touchés, si bien que « la menace d’une pandémie [une propagation mondiale d’une nouvelle maladie] est devenue très réelle », a dit lundi Tedros Adhanom Ghebreyesus, directeur général de l’Organisation mondiale de la santé. Dans le même souffle, il a souligné que si tel est le cas, « ce serait la première pandémie de l’histoire qui pourrait être contrôlée ». « Même si nous appelons cela une pandémie, nous pouvons encore la contrôler, a-t-il répété. Nous devons nous rappeler qu’avec des actions rapides et décisives, nous pouvons ralentir le coronavirus et empêcher de nouvelles infections. » À l’échelle mondiale, l’OMS dénombrait lundi plus de 113 000 cas confirmés dans 101 pays et territoires, et un peu plus de 4000 décès.

Un premier mort au Canada

Le COVID-19 a fait un premier mort au Canada. La victime est un homme qui se trouvait dans un centre de soins de la Colombie-Britannique. En date du 9 mars, au moins 72 cas ont été confirmés au Canada : 34 en Ontario, 27 en Colombie-Britannique, 7 en Alberta et 4 au Québec. 

En France et en Allemagne, les rassemblements de plus de 1000 personnes ont été interdits. Toute personne qui entrera en Israël devra observer une quarantaine de deux semaines. L’Irlande a annulé ses défilés de la Saint-Patrick. La mairie de Moscou a annoncé des amendes (allant jusqu’à 1500 $) pour ceux qui ne respecteraient pas les quarantaines. Chypre a indiqué lundi avoir enregistré ses deux premiers cas de personnes atteintes par le nouveau coronavirus, une annonce qui signifie que l’ensemble des 27 pays de l’Union européenne sont désormais touchés par l’épidémie. L’Albanie a aussi annoncé son premier cas, tout comme la Mongolie. L’Allemagne a annoncé deux premiers décès.

Aussi bien au Canada qu’aux États-Unis, les autorités recommandent maintenant d’éviter les croisières. Le gouvernement canadien procède au rapatriement de 230 passagers canadiens qui étaient à bord du Grand Princess, où au moins 2 passagers et 19 membres de l’équipage sont malades. Ceux qui présentent des symptômes ne pourront cependant pas être rapatriés à bord de l’avion affrété par Ottawa, dont le décollage était prévu lundi soir, et ils seront au besoin pris en charge par les services de santé américains. Ceux qui auront le feu vert pour rentrer au Canada devront passer 14 jours en quarantaine à la base militaire de Trenton, en Ontario. Quant aux voyages en avion, le Centre de contrôle des maladies, aux États-Unis, recommande aussi de les éviter si l’on fait partie des personnes les plus à risque, soit les personnes âgées ayant déjà un problème de santé.

Le Canada reste ouvert

La ministre fédérale de la Santé, Patty Hajdu, a réitéré lundi qu’il était hors de question de fermer les frontières aux voyageurs en provenance de certains pays où le COVID-19 frappe plus fort que d’autres. Elle a dû le préciser de nouveau après s’être fait poser la question par l’opposition conservatrice. « Nous savons que les frontières n’empêchent pas la propagation du virus, et l’Italie est un très bon exemple de cela », a-t-elle exposé à sa sortie de la Chambre des communes. C’est mieux de savoir qui franchit la frontière afin de mieux pouvoir les retracer au besoin, et c’est par ailleurs la préférence affichée par les provinces et des territoires, a indiqué Mme Hajdu.

Par ailleurs, un premier député de la Chambre des communes, le libéral Anthony Housefather, s’est placé en isolation volontaire, et ce, par « excès de prudence ». Il aurait pu être exposé au COVID-19 alors qu’il participait au congrès de l’American Israel Public Affairs Committee, événement qui a attiré 20 000 personnes à Washington, le 1er mars. « Nous avons reçu hier [dimanche] un courriel disant qu’un participant de Toronto a reçu un diagnostic positif au virus », a-t-il écrit à La Presse, lundi. « Je me sens parfaitement bien, et cela fait déjà une semaine que j’ai quitté le congrès », a indiqué l’élu, qui s’est réfugié dans son domicile à Montréal.

La vice-première ministre Chrystia Freeland a indiqué en Chambre que le gouvernement planchait sur « des mesures additionnelles » afin d’appuyer les travailleurs que le COVID-19 pourrait forcer à s’absenter du travail. Le chef du Nouveau Parti démocratique, Jagmeet Singh, propose qu’un montant soit versé à ceux qui veulent faire leur part afin de freiner la propagation de la maladie, mais qui n’ont pas forcément une banque de congés de maladie suffisamment garnie. Le premier ministre Justin Trudeau a écrit à ses homologues des provinces et des territoires lundi pour leur demander d’informer Ottawa de leur « état de préparation » et de « tout problème d’approvisionnement ou de capacité » d’ici la rencontre à laquelle il les a conviés vendredi.

Des élus américains en quarantaine

Cinq élus du Congrès américain se sont aussi placés en quarantaine volontaire. Au moins deux d’entre eux ont eu des contacts avec Donald Trump après avoir été exposés au coronavirus.

L’élu de la Chambre des représentants Matt Gaetz voyageait, lundi même, à bord de l’avion présidentiel Air Force One qui ramenait Donald Trump vers Washington. Il a signalé un peu plus tard avoir été exposé « il y a 11 jours » à une personne qui a depuis subi un test positif au COVID-19. Un autre élu républicain de la Chambre, Doug Collins, a rencontré Donald Trump vendredi et lui a serré la main. Lundi, il a annoncé se mettre volontairement en quarantaine parce qu’il avait été exposé au coronavirus à la fin de février. Les élus ont été exposés au virus lors d’une grande conférence conservatrice (CPAC) à laquelle M. Trump et son vice-président Mike Pence ont aussi participé.

Les autorités de santé publique aux États-Unis ont invité les Américains âgés et qui ont un problème de santé à faire des provisions de vivres et de médicaments. S’il ne faut pas céder à la panique et se ruer vers les épiceries, les Américains à risque « seraient bien avisés de se tenir prêts », a dit la Dre Nancy Messonnier, l’une des responsables des Centres pour le contrôle et la prévention des maladies des États-Unis. Les États-Unis en sont à 19 décès (18 dans l’État de Washington, 1 en Californie). La Dre Messonnier a rappelé que près de 80 % des personnes infectées s’en tirent bien, tandis que 20 % deviennent plus malades et que ce sont les personnes qui à la fois sont âgées et ont un problème de santé qui sont le plus à risque. Les personnes de plus de 80 ans sont les plus exposées, tandis que les enfants semblent jusqu’ici s’en tirer le mieux, les autorités chinoises n’ayant notamment rapporté aucun cas sévère de COVID-19 chez les jeunes de moins de 10 ans.

— Avec l’Agence France-Presse

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Si vous avez des symptômes du coronavirus : 811

Québec ouvre trois cliniques de dépistage

Pour répondre à une éventuelle hausse des cas suspectés de COVID-19, Québec a annoncé lundi l’ouverture de trois cliniques exclusivement vouées au dépistage du coronavirus. La Fédération interprofessionnelle de la santé (FIQ) s’inquiète toutefois de n’avoir « aucune idée » des plans de la Santé publique si le nombre de cas diagnostiqués augmentait de façon rapide et importante.

À l’heure actuelle, le Québec recense quatre cas « confirmés » et un cas « probable » de COVID-19, alors que 25 personnes sont « sous investigation ».

« Oui, c’est un fait qu’il n’y a pas beaucoup de cas déclarés présentement, mais s’il y en avait, c’est quoi votre plan de match ? C’est ça qu’on n’est pas capables d’avoir », a affirmé lundi en entrevue Linda Lapointe, vice-présidente de la Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec (FIQ) qui représente 76 000 infirmières, infirmières auxiliaires, inhalothérapeutes et perfusionnistes dans le réseau.

« S’il y a un débordement, on va faire quoi ? Et la journée où j’ai 20 infirmières et 15 infirmières auxiliaires qui sont chez elles en quarantaine ? On est déjà en temps supplémentaire obligé accoté », rappelle-t-elle aux autorités de la Santé publique. Pour appuyer ses propos, elle souligne que le deuxième patient atteint de COVID-19 s’est d’abord présenté à l’hôpital de Mont-Laurier, où il a été en contact avec 20 employés et visiteurs, dont plusieurs ont ensuite dû être placés en quarantaine à la maison.

Cette dernière déplore que l’information soit surtout diffusée au sein des cellules de gestionnaires. 

« On en apprend plus par les journalistes dans les médias que par le Ministère ou la Santé publique. »

— Linda Lapointe, vice-présidente de la FIQ

« L’information, elle ne descend pas de façon convenable partout sur le terrain, particulièrement au niveau des CLSC et des groupes de médecine familiale (GMF). Ça, c’est comme terrible, il n’y a rien. Ça fait des années qu’on dit aux gens de ne pas se présenter aux urgences et d’aller dans les CLSC. Les CLSC n’ont même pas de lignes directrices. Il y a même une présidente d’un syndicat local qui me disait qu’il n’y avait que deux ou trois masques protecteurs N95 dans un GMF alors qu’il existe trois grandeurs de masques. »

Trois cliniques de dépistage

C’est pour éviter que les patients atteints de COVID-19 ne se présentent dans des hôpitaux ou des cliniques où se trouvent d’autres malades que la ministre de la Santé, Danielle McCann, a annoncé lundi l’ouverture de trois cliniques de dépistage qui offriront un service de prélèvement sur place. La première a ouvert ses portes lundi dans les anciennes urgences de l’Hôtel-Dieu à Montréal. Elle sera ouverte 7 jours sur 7, 24 heures sur 24.

Mercredi, une clinique sera ouverte à Québec dans le secteur de Beauport, tandis qu’une troisième sera établie les soirs à Greenfield Park, en Montérégie, à compter de lundi prochain.

Les cas avérés devront se soumettre à une période de quarantaine à la maison. S’ils nécessitent une hospitalisation, ils seront ensuite transférés à l’un des quatre hôpitaux désignés par Québec.

« Le risque de contracter le virus demeure faible, mais nous prenons toutes les précautions nécessaires pour agir prestement, de manière préventive et sécuritaire pour tous. »

— Danielle McCann, ministre de la Santé

Les travailleurs de la santé sont appelés à travailler dans ces cliniques de façon volontaire. Malgré la pénurie de personnel qui sévit dans le domaine de la santé, la ministre McCann estime que le réseau est « capable de se réorganiser ».

Avant de se présenter dans ces cliniques ou dans tout autre centre de santé, les personnes qui présentent des symptômes devraient composer le 811 pour d’abord parler à une infirmière.

« Bien que le Québec demeure pour le moment relativement peu touché par le COVID-19, la situation mondiale évolue très vite, et nous devons faire preuve d’une extrême vigilance », a pour sa part affirmé le Dr Horacio Arruda, directeur national de la Santé publique.

« Le système se comporte bien »

Les patients gravement atteints du COVID-19 seront hospitalisés dans des chambres à pression négative, qui permettent l’évacuation des particules infectieuses. Quatre hôpitaux ont été désignés au Québec pour accueillir les patients ayant subi un test positif qui éprouvent des difficultés : le CHU Sainte-Justine et le CHU de Québec–Université Laval pour les enfants, ainsi que l’Hôpital général juif de Montréal et l’Institut universitaire de cardiologie et de pneumologie de Québec pour les adultes.

Du côté des adultes, l’Hôpital général juif compte 89 chambres à pression négative, dont 18 aux soins intensifs qui pourraient être utilisées pour les cas gravissimes.

« Ici, à Québec, l’Institut de cardiologie et de pneumologie compte quatre chambres à pression négative avec une possibilité d’en transformer quatre autres. Mais si on a plus que huit [patients atteints] ? Qu’est-ce qu’il se passe ? Toute cette information-là, on ne l’a pas », déplore Linda Lapointe.

« Si on vient dans le rouge […] dans un état critique, c’est quoi votre plan de match ? Est-ce que l’on ferme des blocs opératoires ? On n’a aucune idée des plans qui sont en construction, on ne sait même pas s’ils sont faits. Et ça, c’est un peu inquiétant parce qu’on se demande, y en a-t-il un, plan ? On espère que oui, mais on ne le sait pas », a-t-elle ajouté.

De son côté, le président de la Fédération des médecins omnipraticiens, le Dr Louis Godin, estime que le Québec fait ce qu’il faut en ce moment pour répondre à la crise. « Jusqu’à présent, le système se comporte bien, il faut agir avec prudence et stratégie pour s’assurer que l’on maximise l’utilisation de nos ressources et que l’on prend de bonnes décisions. C’est une situation vraiment exceptionnelle. Moi, je pense que le système de santé québécois est capable de faire face à ça, mais c’est sûr qu’on va avoir besoin d’ajustements », dit-il.

Les cas confirmés au Québec

Vendredi 28 février

Un premier cas de COVID-19 a été confirmé dans la grande région de Montréal le 28 février. La patiente était de retour d’Iran et avait fait une escale à Doha, au Quatar. Elle a consulté un médecin de l’hôpital de Verdun le soir même de son arrivée, le 24 février. Elle a été placée en isolement chez elle, dans la région de Montréal.

Jeudi 5 mars

Le deuxième cas au Québec, confirmé le 5 mars, est un homme des Laurentides. Il était de retour d’Inde et son état a été jugé suffisamment grave pour qu’il soit hospitalisé. L’homme s’est d’abord présenté à l’hôpital de Mont-Laurier avant d’être transféré, mercredi dernier, à l’Hôpital général juif de Montréal.

Lundi 9 mars

Deux cas ont été confirmés le 9 mars. Le troisième est celui d’une personne revenue de la France le 3 mars. Elle a appris une fois au Québec qu’elle avait été en contact avec une personne infectée par le COVID-19. Elle s’est présentée dans un centre hospitalier de la Montérégie, suivant les consignes d’isolement données par Info-Santé.

Lundi 9 mars

Le quatrième cas confirmé est celui d’une personne qui a visité l’Europe du Nord-Ouest. Le ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS) n’a pas précisé le pays. À son retour au Québec, la personne a consulté un hôpital de Montréal et est présentement hospitalisée à l’Hôpital général juif, à Montréal, l’un des quatre centres désignés dans un pôle d’expertise en infectiologie.

— Audrey Ruel-Manseau, La Presse

Les écoles ont « un rôle important à jouer »

« Sens du devoir », « sens du civisme et des responsabilités » : pour éviter de se retrouver avec des cas de coronavirus entre leurs murs, les écoles québécoises font appel aux parents qui ont voyagé avec leurs enfants pendant la semaine de relâche pour qu’ils redoublent de vigilance.

Le ministère de l’Éducation a transmis dimanche une directive à toutes les écoles, incluant les établissements postsecondaires, leur demandant de « faire circuler l’information diffusée par le ministère de la Santé et des Services sociaux » à propos du COVID-19.

« Toutes les organisations scolaires et tous les établissements d’enseignement ont un rôle important à jouer », écrit le sous-ministre de l’Éducation, Éric Blackburn. « Sachez que les directions régionales de santé publique peuvent vous soutenir dans l’élaboration d’une réponse spécifique à vos besoins si une situation survient dans vos établissements », ajoute-t-il dans cette même lettre.

Pour l’instant, aucun cas de COVID-19 n’a été rapporté dans une école de la province.

Les directives envoyées aux parents varient selon les écoles et les commissions scolaires. Dans une lettre envoyée au personnel et aux parents, la Commission scolaire de Montréal (CSDM) assure qu’elle suit la situation de près en cette semaine de retour de relâche.

« Même si, à l’heure actuelle au Québec, le risque de contracter le virus est jugé faible, la prudence et la prévention sont de mise. »

— Robert Gendron, directeur général de la CSDM

Comme la CSDM, la commission scolaire Marguerite-Bourgeoys (CSMB) renvoie les parents vers les recommandations de la santé publique, comme se laver les mains pendant au moins 20 secondes et jeter chaque mouchoir à la poubelle après une utilisation. « Nous vous demandons d’en prendre connaissance et d’encourager vos enfants à mettre en pratique ces actions par souci de prévention », écrit son directeur général, Dominic Bertrand.

À l’Académie Michèle Provost, un établissement privé de Montréal, la direction demande quant à elle aux personnes ayant voyagé dans une zone à risque « comme la Chine, la France, l’Italie, l’Iran… de respecter une quarantaine de 14 jours ».

Ces recommandations ne sont pas en phase avec celles transmises par le ministère de l’Éducation, qui rappelle que seuls les voyageurs en provenance de la province de Hubei, en Chine, et de l’Iran « sont invités à s’isoler volontairement ». Quant à la France, le gouvernement canadien ne la classe pas dans les zones à risque. Le directeur général de l’établissement n’a pas souhaité s’entretenir avec La Presse à ce sujet lundi.

Les enseignants plutôt rassurés

Dans les écoles, la vie a repris son cours normal après les vacances et l’inquiétude par rapport au coronavirus ne semble pas avoir gagné le personnel.

« On a eu très peu d’appels concernant [le coronavirus], mais ce qu’on se dit, c’est que plus les cas vont se rapprocher de notre territoire, plus il y aura de questions », dit Éric Gingras, président du Syndicat de Champlain, qui représente des enseignants de la Rive-Sud de Montréal.

Il note que la commission scolaire Marie-Victorin a envoyé des directives aux écoles pour demander de rappeler aux élèves les mesures d’hygiène de base, comme se laver les mains et tousser dans le pli du coude. Des affiches sont installées devant les lavabos, par exemple.

Éric Gingras estime qu’il y a eu un « avant et un après la grippe H1N1 » dans les écoles en matière d’hygiène et que l’arrivée du COVID-19 ne fait que rappeler la nécessité de suivre les consignes. Avec la menace du coronavirus qui plane, « on dit aux gens de remettre les pancartes », explique-t-il.

Une blague tourne au vinaigre pour un restaurateur

Un restaurateur montréalais a appris à ses dépens que le coronavirus touchait une corde sensible chez certaines personnes. Ce qui se voulait une blague sur le COVID-19 pour attirer des clients a plutôt éveillé des sentiments de persécution chez une passante d’origine asiatique en visite à Montréal. 

Jeudi soir, les propriétaires du restaurant Licence IV, rue Saint-Paul, dans le Vieux-Montréal, tenaient une fête privée avec des amis et des clients. Dans une fenêtre, on pouvait lire : « Urgent, No coronavirus here », écrit par le propriétaire lui-même.

« Il n’y avait vraiment aucune intention raciste, ça ne visait aucune nationalité. On voulait dire que la place était sécuritaire pour que les gens entrent à l’intérieur », a expliqué à La Presse le propriétaire, Ludovic Marionnet. Il était tard, l’ambiance était festive, et l’alcool ayant fait son œuvre, il admet qu’il cognait dans la fenêtre pour attirer l’attention des passants.

Or, l’une de ces passantes était une Britanno-Colombienne d’origine asiatique qui y a vu non pas une blague, mais un propos de bien mauvais goût, voire un commentaire raciste envers les personnes asiatiques. Insultée, Tiffany Rolls (selon son nom sur Facebook) a fait connaître sa façon de penser en criant à travers la fenêtre et elle a plus tard publié des photos sur sa page Facebook accompagnées d’un message portant d’abord sur le racisme lié au COVID-19, suivi d’une tirade contre les propriétaires du restaurant.

Voir la publication (en anglais) : 

https://www.facebook.com/504077854/posts/10158145302967855/?d=n

L’expérience de la Vancouvéroise a été citée en exemple par un média national de la Colombie-Britannique dans un article sur l’augmentation des cas de racisme liés au coronavirus.

« [Tiffany Rolls] envisage de rendre sa publication Facebook publique pour faire honte au couple de Montréal », peut-on lire dans l’article publié sur le site internet de CBC Colombie-Britannique.

M. Marionnet admet que la blague était de mauvais goût, mais il se défend d’avoir eu une intention raciste : « Je suis moi-même français et on est tous des immigrants au restaurant ! »

Devant l’effet boule de neige causé par l’évènement de la nuit de jeudi à vendredi, notamment sur les réseaux sociaux, M. Marionnet a publié un mea culpa sur la page Facebook du restaurant Licence IV.

« Ça prend des proportions énormes, on a dû parler avec nos avocats. C’est une blague qui a très mal tourné, mais on ne peut pas nous accuser à tort et nous prêter des intentions qu’on n’avait pas », se défend M. Marionnet, qui dit avoir écrit à Mme Rolls pour s’excuser dès le lendemain, sans obtenir de réponse. Mme Rolls n’a pas répondu à la demande d’entrevue de La Presse.

Lisez la lettre d’excuse (en anglais) : 

https://www.facebook.com/notes/licence-iv/no-coronavirus-here-you-are-safe-to-join-our-party/1087171214949092/

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