Mélanie Authier Contrariétés et contrepoints

Entre-deux ludique

Mélanie Authier revient dans sa ville natale avec une superbe exposition d’œuvres récentes à l’UQAM. Une vingtaine de panneaux démontrant que la peinture reste une discipline pertinente, que l’abstraction a encore des voies à explorer.

La dernière présence de Mélanie Authier à Montréal remonte à une exposition collective à l’UQAM en 2013. Son retour par la grande porte, Contrariétés et contrepoints, visite sept villes canadiennes, mais la galerie de l’UQAM est le seul endroit qui accueille deux œuvres inédites de 2017.

L’artiste installée à Ottawa poursuit son riche travail d’opposition visuelle dans un espace imaginaire. Abstraction, oui, mais en utilisant certaines stratégies de la représentation. C’est dans cet entre-deux ludique qu’elle agit. Mélanie Authier s’intéresse à la précarité de la beauté. Chaque tableau est un numéro d’équilibre.

« J’aime travailler en pensant à l’histoire de l’art, à ce que l’on considère comme des faux pas, des interdits, et en les transgressant. »

« C’est en me battant avec la toile que je trouve ma créativité. J’aime créer des problèmes, partir d’une mauvaise idée, par exemple, et lui trouver une solution. »

— Mélanie Authier

Comme l’indique judicieusement le commissaire Robert Enright, la magie de l’artiste opère entre « intelligible et insaisissable ». Mais la peinture de Mélanie Authier n’est pas inaccessible pour autant. Au contraire, on y retrouve beaucoup de vivacité, d’énergie et de mouvement.

« Souvent, les spectateurs vont me dire qu’ils ressentent quelque chose qui leur rappelle tels objet ou réalité, comme le détail d’une feuille d’arbre ou une onde sur l’eau, affirme l’artiste. Mais comme elles restent abstraites, mes peintures ne confirment jamais ces visions. En même temps, ce que le spectateur croit voir représente un ancrage dans le tableau et l’aide à composer l’ordre qu’il veut bien y trouver. »

Voyage dans l’abstraction

La riche expérience visuelle que propose Mélanie Authier nous amène à promener le regard sur les grandes surfaces, comme si on voyageait dans l’abstraction – un périple qui évoque, voire convoque, des émotions, des idées. L’espace dans ses œuvres semble infini, tout en paraissant fort précis et confiné par endroits.

« J’aime créer des scénarios quelque peu truqués et ludiques, ce qui peut parfois désorienter. »

— Mélanie Authier

« Quand je crée, je commence par l’idée d’un espace. Je commence la peinture avec l’idée ou le souvenir vague d’un espace concave comme une grotte, par exemple, ou la surface d’une falaise. C’est l’illusion d’un espace avec laquelle je débute le travail, mais je traduis tout dans un langage visuel abstrait. » 

Même si certains y voient des accents romantiques ou des excès plus baroques, Mélanie Authier ne cherche pas à représenter tel ou tel autre courant de l’histoire de l’art. La beauté de l’abstraction qu’elle pratique, c’est qu’il s’agit d’une invitation à plonger dans notre propre imaginaire.

Pour les amateurs qui suivent son travail depuis quelques années, il est intéressant de voir de nouveaux contrastes émerger, de nouveaux chevauchements de formes et de couleurs, de nouvelles façons de créer des illusions et de brouiller les pistes

« Je suis en contrôle, mais j’écoute aussi ce qui se passe sur la toile. Je ne laisse jamais tomber une peinture. La toile est finie quand je me rends compte qu’en y ajoutant quelque chose, ce serait le début d’une autre création », indique Mélanie Authier. 

« J’ai toujours des canevas prêts afin de commencer autre chose plutôt que défaire l’équilibre atteint dans la peinture que je finis, poursuit l’artiste. En ce sens, chaque nouvelle œuvre est la suite de la précédente. Je crée des paramètres pour qu’il y ait toujours un défi pour moi, un espace créatif pour y jouer et avoir la liberté d’évoluer dans ma pratique. »

À la Galerie de l’UQAM jusqu’au 9 décembre

Ce texte provenant de La Presse+ est une copie en format web. Consultez-le gratuitement en version interactive dans l’application La Presse+.