« L’aide à mourir anticipée, ça presse ! »

Sandra Demontigny, autrice du livre L’urgence de vivre : ma vie avec l’alzheimer précoce, vient d’apprendre que sa situation s’était détériorée au cours des derniers mois. La militante pour l’accès à l’aide à mourir anticipée implore les autorités gouvernementales de changer les lois rapidement, pour ne pas qu’elle et d’autres terminent leur vie dans la détresse et la douleur.

Depuis quelques mois, la mère de trois enfants (14, 18 et 22 ans) sentait que sa mémoire à court terme fléchissait. Son amoureux pouvait lui répéter à plusieurs reprises ce qu’ils allaient manger pour souper, elle posait et reposait la question quand même.

Lorsque récemment le diagnostic est tombé et qu’elle a appris qu’elle était passée au stade « modéré » de l’évolution de la maladie, elle n’était donc pas bien surprise. Mais elle était tout de même bouleversée. Car le prochain stade, « avancé », est le dernier.

« Léger, modéré, avancé, a énuméré Sandra Demontigny, 41 ans. Je suis donc rendue dans la phase du milieu. Ça fait mal… »

Une des raisons pour lesquelles elle a écrit un livre sur sa maladie et qu’elle prend la parole dans l’espace public, c'est pour convaincre les autorités de l’importance d’élargir l’aide à mourir. Elle souhaite que des personnes comme elle qui reçoivent un diagnostic de maladie grave comme l’alzheimer puissent faire une demande d’aide à mourir anticipée. Ainsi, même si elle n’est plus apte mentalement à faire la demande lorsqu’il sera le temps de le faire, elle y aura droit.

« Parce qu’en ce moment, l’aide à mourir exclut tous ceux qui ne peuvent pas donner leur consentement une semaine avant de la recevoir », a expliqué Mme Demontigny.

Son père, aussi atteint d’alzheimer précoce, est mort à 53 ans.

« Vers la fin, il était dans un lit d’hôpital, contentionné au torse, aux jambes et aux bras… C’était l’horreur. Mon frère et moi, on a des images. On voyait la détresse dans ses yeux, il était apeuré, fou, il ne pouvait plus bouger, il ne reconnaissait plus personne… On se souvient encore des sons qu’il faisait quand il criait. »

— Sandra Demontigny

Elle ne veut pas se rendre à ce stade. Pas du tout. Elle a déjà son plan B, si jamais la loi sur les soins de fin de vie ne lui permet pas de mourir près de ses proches, devant la rivière qui coule près de sa résidence : elle ira en Suisse, où la loi lui permettra d’exaucer son souhait. « Moi, j’ai les moyens d’y aller, mais c’est très cher. C’est au moins 25 000 $. Et ce que je trouve plate, c’est que cet argent-là, c’est de l’argent de moins en héritage à mes enfants. Et ils sont jeunes. »

Avec la population vieillissante et les baby-boomers que Sandra Demontigny décrit comme une génération qui « prône une belle qualité de vie », elle est persuadée que l’aide à mourir anticipée sera de plus en plus demandée et que ce n’est qu’une question de temps avant que ce soit permis.

Elle milite ainsi pour mourir avant d’être dépendante des autres sur tous les plans, aussi pour faire avancer la cause, « faire œuvre utile avec quelque chose de foncièrement négatif pour moi ». Et aussi, et surtout : « Je souhaite que si éventuellement… mais on touche du bois pour que ce ne soit pas le cas… si mes enfants sont atteints de la maladie, qu’ils n’aient pas à faire le même cheminement que moi pour mourir comme ils le souhaitent. »

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