Contestation du rôle d’évaluation

Valérie Plante refuse d’envisager un report de la date limite

Les Montréalais ont eu assez de temps pour agir avant la pandémie, selon son cabinet

Le propriétaire montréalais qui entend contester la valeur de son immeuble apparaissant au rôle foncier 2020-2021-2022 devra le faire en pleine pandémie au moment où les bureaux des évaluateurs sont fermés et où les déplacements individuels sont découragés.

Les évaluateurs craignent que l’insensibilité de l’administration municipale ne brime les droits des contribuables.

La mairesse Valérie Plante a indiqué mardi ne pas avoir l’intention de demander au gouvernement du Québec un report de la date limite du 30 avril 2020 pour déposer une demande de révision du rôle d’évaluation foncière. La mairesse prenait la parole dans le cadre d’une causerie en ligne organisée par la Chambre de commerce du Montréal métropolitain.

Ce choix surprend dans le contexte où le Québec est sur « pause » et que toutes sortes de délais sont accordés aux citoyens pour tenir compte de la situation exceptionnelle. Pensons à la date limite de production des déclarations de revenus qui a été reportée au 1er juin à la fois par Revenu Québec et par l’Agence de revenu du Canada.

L’administration municipale justifie sa position en faisant valoir que les contribuables ont eu tout le temps nécessaire pour déposer leurs demandes de révision avant la pandémie.

« En ce qui a trait aux demandes de révision du nouveau rôle d’évaluation foncière, dévoilé le 11 septembre 2019, toute personne en désaccord peut déposer depuis cette date une demande en vertu de la loi québécoise qui le régit. Il est aussi important de noter que le rôle 2020-2021-2022 reflète la valeur des propriétés au 1er juillet 2018, soit plusieurs mois avant le début de l’importante crise sanitaire qui sévit présentement », a répondu par courriel Geneviève Jutras, attachée de presse principale du cabinet de la mairesse de Montréal et du comité exécutif.

L’Union des municipalités du Québec fait front commun avec Montréal en s’opposant à tout report.

Le gouvernement provincial a le pouvoir de reporter la date limite pour déposer une demande de révision en vertu de la Loi sur la fiscalité municipale.

« Les grandes villes ont beaucoup d’influence sur le gouvernement pour ce genre de décision. »

— Pierre Goudreau, président de l’Ordre des évaluateurs agréés du Québec, dans un entretien

L’Ordre a d’ailleurs demandé officiellement un report de la date limite à la ministre des Affaires municipales, Andrée Laforest, le 31 mars.

« Considérant le fait que le dépôt d’une demande de révision ne nécessite pas la présence en personne aux bureaux de la municipalité, il n’est pas de notre intention pour le moment de reporter la date limite de dépôt. Le tout peut très bien se faire dans le respect des consignes sanitaires », justifie le cabinet de la ministre pour expliquer son refus.

Moins de contestations à prévoir

Une telle décision va se traduire par un nombre moindre de contestations, craint fort Pierre Goudreau.

Pour Nicolas Cloutier, avocat spécialisé dans le règlement des différends en fiscalité municipale, ce sont les petits propriétaires qui en feront les frais. Les grands propriétaires qui se font conseiller par des avocats vont plaider le cas de force majeure prévu dans la Loi sur la fiscalité municipale pour déposer leur demande de révision en retard. Le petit propriétaire de plex pris dans la tourmente de la pandémie passera son tour en subissant les conséquences, avance-t-il.

Outre l’Ordre des évaluateurs, l’Institut de développement urbain du Québec, la section québécoise de l’Association canadienne de taxe foncière de même que l’Association du Québec de l’Institut canadien des évaluateurs demandent tous le report de la date limite du 30 avril.

Dans sa lettre adressée à la ministre le 15 avril, cette dernière avance que les directives de la santé publique du Québec empêchent les évaluateurs de fournir tout service de consultations sur les valeurs foncières. L’association fait en outre valoir que quatre provinces ont accepté de reporter la date limite.

« Il nous apparaît évident que les droits et intérêts des contribuables sont lésés », écrit Cynthia Villeneuve, sa présidente.

Ce texte provenant de La Presse+ est une copie en format web. Consultez-le gratuitement en version interactive dans l’application La Presse+.